Nouvel examen de la loi de bioéthique
Déclaration du cardinal Vingt-Trois
à la veille
du nouvel examen de la loi de bioéthique à l’Assemblée Nationale
UN RECUL DE LA CIVILISATION !
La révision
de la loi de bioéthique a été préparée par un vaste débat national avec les
États-Généraux et les nombreuses contributions qui ont jalonné le parcours. Ce
long processus aboutissait à des positions relativement équilibrées dont le
vote des députés en première lecture était le reflet. Si tant de personnes se
sont impliquées avec conviction dans ce débat, c’est sans doute parce que nous
percevons bien que, par le biais de décisions apparemment techniques, s’exprime
un choix de civilisation. Vers quelle société voulons-nous progresser ?
Malheureusement,
si les modifications introduites dans le projet de loi par le Sénat
étaient entérinées par l’Assemblée Nationale, une certaine conception de l’être
humain serait très gravement compromise.
En effet,
la levée de l’interdiction habituelle des recherches provoquant la destruction
des embryons humains ouvrirait largement le champ à une instrumentalisation de
l’être humain, au moment même où la Commission européenne travaille à la
protection des embryons des animaux, ce qui constitue un sinistre paradoxe !
Est-il besoin de rappeler que les résultats scientifiques enregistrés à ce jour
devraient plutôt stimuler d’autres pistes de recherche aujourd’hui moins
encouragées bien que leur efficacité soit vérifiée ? Autre paradoxe
étonnant ! Faut-il donc imaginer que des lobbies économiques évaluent que
la recherche sur l’être humain est plus rapide et moins coûteuse que les
expérimentations animales ?
Où irions-nous avec ces seules
évaluations ? N’y a-t-il pas d’évaluation éthique de la recherche ?
De plus, la
systématisation juridique du diagnostic prénatal nous conduirait inévitablement
à un eugénisme d’État. Quel message adresserions-nous ainsi aux personnes
handicapées que nous affirmons vouloir respecter et intégrer dans la société ?
Quel signal donne-rions-nous à leurs familles ? Leur dirons-nous que la
solution idéale eut été que leurs enfants n’aient pas vu le jour ? Et
pourquoi ne pas consacrer les sommes considérables que l’on engloutirait dans
ce dépistage systématique pour financer la recherche, en particulier concernant
la trisomie 21 ?
Ces
questions seront sans doute évitées dans la prochaine campagne électorale.
Pourtant, des réponses que nous y apportons aujourd’hui, dépend le type de
société que nous préparons pour nos enfants et vers lequel nous serons
acheminés. Les plus faibles et les plus vulnérables y auront-ils encore leur
place ? Le respect inconditionnel de l’être humain vaut mieux que des
démissions peu réfléchies et peu courageuses qui font reculer notre
civilisation en la poussant vers des choix extrêmes.
Le lundi 23
mai 2011
Cardinal
André VINGT-TROIS
Archevêque
de Paris
Président
de la Conférence des Évêques de France
--