LA GUERRE DE RELIGION A-T-ELLE COMMENCÉ ?
Enfin un journaliste franc et juste sur
l'histoire
Il serait grand temps que nous nous apercevions - enfin - qu'une nouvelle
guerre de religion a éclaté et, cette fois, à l'échelle planétaire.
Les Islamistes massacrent les
chrétiens en Égypte, en Irak, aux Philippines, en Indonésie, au Pakistan, au
Nigéria, un peu partout.
Malraux
avait dit : « Le XXIe siècle sera religieux ou il ne sera pas ».
On a bien l'impression que ce siècle qui
commence va voir le déchaînement sans pitié d'un Islam renaissant, voulant
dominer le monde et faire payer à la civilisation chrétienne les quelques
siècles pendant lesquels elle a régné sur la planète.
Cette haine
du chrétien dépasse de beaucoup tous les problèmes de la foi. En s'attaquant
aux églises, aux prêtres, aux religieuses, aux fidèles, les islamistes veulent
abattre la civilisation occidentale, la démocratie, le capitalisme, ce qu'ils
appellent le « néo-colonialisme », la parité hommes-femmes, les
Droits de l'Homme, le progrès tel que nous le concevons.
Le XXe
siècle a été marqué par l'affrontement est-ouest, le bloc communiste contre les
pays « libres ». Marx, Lénine et Staline se sont effondrés
d'eux-mêmes sous les incohérences, bien souvent monstrueuses, de leur
idéologie. Mais ils ont aussitôt été remplacés par Allah et son Prophète. Le
Coran a pris la place du Communisme, le drapeau vert de l'Islam celle du
drapeau rouge, les imams prédicateurs des mosquées celle des commissaires
politiques.
Le XXIe
siècle sera une guerre sans merci car les foules immenses du Tiers-monde
islamisé (et des banlieues de nos grandes métropoles) sont autrement plus
dangereuses que ne l'ont jamais été les chars du Pacte de Varsovie.
Nous pleurons, avec nos larmes de
crocodiles habituelles, les coptes massacrés à Alexandrie et les chrétiens
assassinés à Bagdad. Mais nous restons les bras ballants.
Il faut
bien dire qu'on voit mal ce que nous pourrions faire. Ce n'est plus guère le
temps des croisades et nos dernières expériences en Afghanistan ou en Irak (où
nous commençons à regretter la belle époque de Saddam Hussein qui savait, lui,
au moins, faire respecter la laïcité baasiste) n'ont pas été très concluantes,
c'est le moins qu'on puisse dire.
Il est bien
loin le temps où Napoléon III pouvait envoyer un corps expéditionnaire protéger
les maronites du Liban que massacraient les Druzes. Mais au moins restons
lucides et surtout arrêtons de ressortir une fois de plus la fameuse
« repentance » qui nous sert désormais pour maquiller toutes nos
lâchetés.
Hier, un imbécile de service nous a
longuement expliqué à la télévision que si les islamistes égyptiens
massacraient les coptes c'était parce que ces chrétiens de la vallée du Nil
étaient « les représentants de l'Occident », les
ambassadeurs de la « culture européenne », les symboles vivants du
capitalisme, du néocolonialisme, du dollar et du coca-cola. En un mot, les
ultimes survivants de l'époque coloniale. Autant dire, à l'en croire, que les
Islamistes avaient parfaitement raison de vouloir éliminer ces survivances d'un
passé détesté.
L'imbécile
était, en plus, un inculte. Les coptes sont les descendants du
peuple des pharaons. « Copte » veut dire « égyptien ». Ils
étaient sur les bords du Nil bien avant la conquête arabe et musulmane. S'ils
sont plus nombreux au sud, entre Assiout et Assouan, c'est précisément parce
qu'ils ont fui les cavaliers conquérants venus d'Arabie. Ils avaient leurs
églises bien avant que nous ne construisions nos cathédrales.
On peut
d'ailleurs dire exactement la même chose de tous les chrétiens d'Orient qu'ils
soient catholiques (de rite d'Antioche, de rite syriaque comme les maronites
libanais, de rite byzantin, de rite arménien, de rite d'Alexandrie) ou
« non chalcédoniens » comme les coptes, ou orthodoxes (ayant leur
patriarcat soit à Istanbul, soit à Alexandrie, soit à Jérusalem, soit à Damas).
Tous sont « chez eux » dans
ces pays-là depuis des millénaires, certains parlant encore l'araméen, la
langue du Christ. En faire des ambassadeurs de l'Occident, des
représentants du capitalisme colonial est évidemment une absurdité. Même si, en
effet, ils sont « de culture chrétienne ». Mais ils l'étaient avant
nous.
Nous ne
pouvons rien faire pour les protéger, mais au moins ne les trahissons pas en
reprenant à notre compte les accusations odieuses de leurs assassins. Nous
pouvons les accueillir, comme nous nous devons d'accueillir tous ceux qui sont
persécutés. Beaucoup ont déjà fui leur pays. Mais, en tous les cas, ne continuons pas à nous boucher les yeux, à
parler de « l'amitié islamo-chrétienne », d'un « Islam à
l'occidentale », de « la cohabitation harmonieuse des trois monothéismes ».
Soyons
intransigeants avec les règles de notre laïcité, mais ne nous laissons
entraîner ni vers la stigmatisation ni vers la discrimination (surtout si elle
devait être « positive », comme le souhaite certains), car ce serait,
évidemment, faire le jeu des fanatiques.
Aujourd'hui,
la grande mode est d'évoquer, d'invoquer à tout bout de champ « les années
les plus sombres de notre histoire ». C'est souvent absurde et parfois
odieux. Mais s'il y a une leçon qu'il ne faut jamais oublier c'est bien celle
de Munich. Churchill avait dit : « Ils ont préféré le déshonneur à la
guerre et ils auront les deux ». Il ne faut jamais tenter de pactiser avec ceux qui vous ont déclaré la
guerre.
Thierry Desjardins
Journaliste et Reporter, né en 1941,
Directeur général adjoint du Figaro.
Auteur d'un nombre considérable d'ouvrages politiques.
Lauréat de l'Académie française.
Prix Albert Londres 1975.
Prix Louis Pauwels
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