« PROPOSER LA LUMIÈRE DE DIEU »
Annonce « kerygrnatique » (du grec kerygma
annonce du crieur public),
ou accompagnement de la « recherche » d'un
détenu ?
Deux pastorales contrastées, sinon opposées.
Père Yves
Aubry : Aumônier de la prison de Bois-d’Arcy (Yvelines) pendant quinze
ans, le Père Aubry est le fondateur des associations « Le Bon
Larron » pour l’annonce de la Parole de Dieu aux détenus et « Les
Amis de Tibériade » pour la réinsertion des détenus dans l’Église et dans
la société.
« Seuls ceux saisis par l’Esprit-Saint sont assez fous pour annoncer
la Parole de Dieu. Parole de consolation, de guérison pour celui qui
l’accueille. Être ainsi saisi.., c’est là la première et indispensable
condition pour oser annoncer la Parole de Dieu et la voir pénétrer, comme je
l’ai vu si souvent en prison, le cœur des auditeurs. Annoncer la Parole de Dieu
devient alors un vrai besoin.., une nécessité pour celui touché en profondeur
par l’Amour venant du Cœur de Dieu.
Malheur à moi, dit
saint Paul, si ayant fait cette expérience je n’annonçais pas le Christ
Jésus ! Souvenons-nous qu’après avoir reçu l’Esprit et avant de commencer
ses tournées apostoliques, la première Parole du Christ a été : « Je suis venu pour libérer les
captifs, pour délivrer les prisonniers, tous les prisonniers, ceux qui sont
derrière les barreaux mais aussi tous les autres, et pour cela, leur proposer
mon Esprit ».
S’ils L’accueillent, Il
les conduira de l’intérieur et leur donnera la force de libération. Ils seront
recrées par l’Amour. J’ai vécu, j’ai ressenti, j’ai partagé la détresse de tous
ces hommes. Il faut le savoir, les détenus souffrent intensément. ils sont arrachés à leurs affections, arrachés aux fruits de
leur travail, arrachés à leur liberté, et à leur sécurité. Ils sont enfermés un
peu comme des bêtes dangereuses. Pour beaucoup c’est l’angoisse, la honte, la
culpabilité, la découverte du mal fait aux autres... Ils sont tourmentés par un
sentiment d’infériorité, d’impuissance, et bien sûr par le remords, ce jugement
contre soi-même et qui de l’intérieur ronge inlassablement comme un impitoyable
bourreau.
« Si nous n’annonçons pas Jésus Sauveur, qui le
fera ? »
Dieu s’est incarné pour
les cœurs brisés, et Lui seul a la capacité de guérir
ceux qui accueillent la Parole annoncée avec Amour. Lui seul peut pénétrer dans
le secret des êtres, les éclairer, les guérir. Il est l’unique Sauveur !
L’humanisation des
prisons dépend en grande partie de l’évangélisation de ces hommes, recréés dans
leur dignité. Ainsi, pour annoncer Dieu en prison, il faut certes que les
chrétiens s’engagent au coude à coude avec les autres hommes pour faire une
prison plus humaine. Il ne s’agit pas de négliger l’action sociale, la
collaboration avec les autres intervenants.
Cependant, le premier
devoir du chrétien est l’annonce sans détour et avec amour de l’unique Sauveur.
S’ils ne le font pas, qui le fera ? Est-ce, comme certains chrétiens le
disent, aller contre la liberté de ces malheureux que de leur proposer la
Lumière ? Non ! Peut-on dire des choses pareilles et être en même
temps disciples du Christ ?
L’encyclique
Redemptoris missio nous le rappelle énergiquement, “le temps est venu d’engager
toutes les forces de l’Église dans la Nouvelle Évangélisation. Aucun de ceux
qui croient au Christ, aucune institution d’Église, ne peut se soustraire à ce
devoir suprême annoncer Jésus-Christ”.
Il est indispensable de
revenir à la pureté initiale de la proclamation et de redresser les
gauchissements de nos manières de faire.
« En un mot donc, osons être missionnaires ! »
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