Les défis de la liberté religieuse en Europe
Élargir la notion
d’objection de conscience
ROME, Mercredi 22 juillet (ZENIT.org)
- Étendre l'objection de conscience à tous les domaines considérés éthiquement
sensibles est aujourd'hui un défi pour l'exercice de la liberté religieuse en
Europe. C'est ce qui ressort des travaux du séminaire « Liberté de religion ou de croyance », organisé à
Vienne, en Autriche, les 9 et 10 juillet.
Actuellement, seule l'objection de
conscience relative au service militaire obligatoire est reconnue dans les
engagements de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Un des intervenants au séminaire,
professeur à l'Université catholique du Sacré-Cœur, Ombretta
Fumagalli Carulli, a
souligné la nécessité d'élargir la notion d'objection de conscience.
À son avis, l'objection de conscience devrait être étendue à d'autres domaines
comme l'avortement, le mariage entre personnes de même sexe, l'adoption
d'enfants par des couples homosexuels et la recherche avec des embryons humains.
« En Europe, comme dans le nord de
l'Amérique, on trouve beaucoup de cas où médecins, pharmaciens, infirmiers sont
licenciés parce qu'ils refusent de
pratiquer des avortements », souligne-t-elle dans son discours comme
le rapporte « L'Osservatore Romano ».
« Des officiers de l'État civil
sont obligés de célébrer des mariages
entre personnes de même sexe ou alors doivent démissionner; des magistrats
qui, ayant clairement dit que l'adoption
de mineurs ne peut être accordée aux couples homosexuels ont été éloignés
de la magistrature ou relégués à d'autres fonctions ».
Ombretta Fumagalli
souligne que, malgré les divers engagements pris par les États membres, la
liberté de religion ou de croyance continue à être violée quotidiennement dans
la zone de l'OSCE, malgré les nombreux engagements des pays membres.
Elle dénonce ainsi les « épisodes de violence sur la base de motivations religieuses
contre des biens (en particulier lieux de culte et cimetières) et des personnes (meurtres
compris) », auxquels s'ajoutent « les
persécutions des autorités publiques (arrestations, perquisitions et
prélèvements arbitraires et illégaux) ; le refus systématique de
donner des visas d'entrée aux religieux et aux volontaires ; et les
limitations indues à l'importation et à la distribution de matériel
religieux » .
Parmi les défis actuels pour l'Europe,
l'experte souligne par ailleurs les conditions pour un réel et plein exercice
de la liberté religieuse concernant les lieux de culte, indiquant par la même
occasion que « le système d'enregistrement des confessions, qui ne
contredit pas en soi la liberté religieuse, est souvent un cheval de Troie pour limiter une série de droits, comme la possibilité de posséder un lieu de culte,
ou d'établir des séminaires et instituts de formation pour le clergé, ou de garantir l'assistance spirituelle dans les
prisons, les hôpitaux et au sein des forces armées ».
Ombretta Fumagalli
parle de défis moins concrets notant qu'« il
existe encore cette conviction de fond, pour l'instant silencieuse à l'OSCE
mais forte dans les circuits culturels de sociétés sécularisés, que les
religions, au lieu d'être un élément de progrès et de bien-être, sont un
facteur négatif à combattre ».
Selon elle, « la réédition en clef moderne d'un tel athéisme antireligieux,
prétendant de surcroît passer sous la protection de l'OSCE, et revendiquant le
droit au retrait de la religion, signifierait faire un pas en arrière ».
Cela, met-elle en garde, signifierait « revenir aux choix politiques de ces
pays de l'est qui ne garantissaient la liberté que s'il s'agissait de
propagande antireligieuse ».
« En fait nous tomberions tous dans une situation d'absence de
liberté que l'OSCE a pourtant contribué à surmonter en luttant avec succès pour
la sauvegarde et l'élargissement de la liberté religieuse », a-t-elle ajouté.
« Il est réconfortant de voir que personne, durant la
rencontre de Vienne, n'a mis en doute le rôle des religions dans la
construction de la 'cité de l'homme', a-t-elle estimé. Une raison de plus pour
ne pas baisser la garde ».
La rencontre « Liberté de religion ou de croyance » était organisée
par le Bureau pour les Institutions démocratiques et les droits de l'homme
(ODIHR) de l'OSCE.
Les représentants des États de l'OSCE,
et le Saint-Siège en tant que membre de plein droit, ont affronté trois grands
thèmes : la protection de la
liberté de religion ou de croyance, le statut des confessions religieuses et
les lieux de culte.
Les participants sont d'accord sur les
résultats atteints en faveur de la liberté religieuse ou de la liberté de
croire, mais ils ont relevé que les
gouvernements ne faisaient, selon eux, pas assez pour que ces engagements
soient respectés, signale un communiqué de l'OSCE.
L'Organisation est actuellement formée
de 56 États membres, d'Europe (comprenant la Fédération russe, la Turquie et
tous les pays de l'Union européenne), d'Asie centrale et d'Amérique (Canada et
États-Unis).
Participation de la société civile
Avant ce séminaire, une centaine de
représentants de la société civile de toute la zone de l'OSCE a exhorté les
États membres à « créer activement
un milieu dans l'espace public où, avec la liberté de religion ou de croyance,
il est possible de mieux se développer et où les communautés religieuses et de
croyants peuvent participer à un dialogue total et fructueux ».
Les organisations Observatorio
para la Libertad Religiosa
(Espagne), Alliance Defence Fund
(États-Unis), Paneuropa Union (Autriche) et la
plate-forme christianophobia.eu ont présenté un
document contenant des recommandations.
Les représentants de la société civile
ont également eu des rencontres et une assemblée plénière avec les divers
intervenants.
À noter, entre autres, l'intervention du
porte-parole de l'Observatoire pour la liberté religieuse et de conscience
(OLRC), Pablo Rodríguez, qui a dressé un tableau de
la situation en Espagne concernant l'enseignement de l'éducation à la
citoyenneté.
« En Espagne nous ne sommes pas arrivés à un consensus sur le concept de
'tolérance', et le cours d'éducation à la citoyenneté qui est une matière
obligatoire dans les écoles a déjà fait plus de 15.000 familles objectrices, un
chiffre non négligeable », a-t-il déclaré devant les envoyés des pays
membres et les centaines d'ONG internationales présentes.
Pablo Rodríguez
a fait part de l'inquiétude de l'Observatoire quant à la possibilité, en
Espagne, que certains droits qui semblaient consolidés soient mis en discussion
dans de récentes lois ou projets de lois actuels.
Ces normes, a-t-il expliqué,
« touchent des matières
fondamentales comme le droit des parents à ce que l'éducation de leurs
enfants se développe de manière cohérente avec leurs convictions ».
À ce propos, il a cité des facteurs
comme « l'objection de conscience
des médecins, du personnel de santé et des pharmaciens sur des questions
relatives à l'avortement et à la bioéthique, ou la présence de la religion,
y compris les manifestations extérieures dans la vie communautaire et dans la
vie publique ».
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