LE CANTIQUE SPIRITUEL

 

DU CORPS

 

 

 

Prière de saint Jean Gabriel Perboyre

 

 

 

Ô mon divin Sauveur,

par ta toute puissance

et ton infinie miséricorde,

que je sois changé et tout transformé en Toi.

Que mes mains soient tes mains,

que mes yeux soient tes yeux,

que ma langue soit ta langue.

Que mes sens et mon corps

ne servent qu’à Te glorifier

mais surtout transforme-moi ;

que ma mémoire, mon intelligence, mon cœur

soient ta mémoire, ton intelligence et ton cœur ;

que mes actions, mes sentiments

soient semblables à tes actions, à tes sentiments,

et de même que Ton Père disait de Toi :

Je t’ai engendré aujourd’hui,

Tu puisses le dire de moi

et ajouter aussi comme Ton Père céleste :

Voici mon Fils bien-aimé.

en lui, J’ai mis tout mon amour.

 

Amen !

 

 

INTRODUCTION

 

 

On doit respecter les étapes de la vie spirituelle car la vie spirituelle n’est pas une vie figée mais une vie intérieure qui évolue. À l’origine, c’est une éclosion de vie à l’état embryonnaire, puis fœtal, puis c’est l’heure de la naissance. L’extérieur et l’intérieur procèdent du même vécu : après la naissance, c’est l’élan de l’enfance vers l’adolescence puis la maturation de la vie adulte et enfin la vieillesse.

II en est de même dans la vie spirituelle. On ne peut garder les mêmes règles que celles de notre conversion ; on ne doit pas prier de la même manière que lorsque l’on s’est converti, sinon on s’égare. On ne peut pas s’accrocher à une manière de prier aussi grande qu’elle soit car au bout d’un certain temps on sera obligé de forcer et une tension va se créer. Il n’y aura plus d’union à Dieu à travers cette prière et c’est le démon qui prendra la place.

Mais on s’accroche à la Très Sainte Trinité, au Cœur Sacré de Jésus et à l’Amour qui embrase son Cœur dans l’éternité ; on s’accroche à l’Immaculée, à la plénitude de grâces qui resplendit dans la gloire de la spiration glorieuse. C’est dans notre vécu intérieur profond que la prière doit s’enraciner. Pour cela, il faut obéir à ce que l’Esprit-Saint a initié en nous, à ce qu’Il nous demande de vivre auprès de l’Immaculée, la Reine du ciel et de la terre.

N.B. Le vœu d’obéissance dans la vie monastique s’enracine dans l’obéissance au Saint-Esprit. Le rôle du vrai père spirituel est d’être témoin de ce que l’Esprit-Saint fait en nous. II ne doit pas imposer sa propre spiritualité. II va nous aider à sortir un petit peu de notre subjectivité transcendantale. Il va prier pour nous, il va s’offrir pour nous, il est solidaire. Mais ce qu’il nous dit n’est jamais infaillible. Par contre, le Saint-Esprit, à travers lui, peut nous dire une chose et le lendemain, nous dire autre chose : on ne sait pas d’où il vient ni où il va, il souffle où il veut. Il ne faut pas s’accrocher psychologiquement à ce qu’il nous a dit il y a trois mois, sinon nous laïcisons, nous mettons Dieu au niveau de l’homme.

Sous le souffle de l’Esprit-Saint, et l’obéissance spirituelle et surnaturelle à notre Père, nous nous adoucissons, notre vie spirituelle s’assouplit.

L’assouplissement parfait, c’est l’accueil de la grâce et de l’Esprit-Saint ; c’est l’accueil de l’Immaculée Conception, l’affinité avec Marie, le mariage total avec Elle tel que l’a vécu avec saint Joseph, la justice incarnée, c’est-à-dire l’amour parfaitement juste de Dieu incarné.

Saint Joseph était le juste par excellence, mais il ne possède pas la grâce prévenante de l’Immaculée Conception, il est marqué comme nous par le péché originel. La spiritualité de saint Joseph, époux de l’Immaculée Conception, est donc notre propre spiritualité, parce que nous sommes comme lui, nous, ses fils, marqués par le péché originel. Voilà pourquoi nous voulons commencer par regarder du côté de ce Juste, parfaitement ajusté à Dieu, à l’Esprit-Saint et à la grâce, jusque dans sa chair, pour donner le ton juste à notre méditation du Cantique Spirituel du Corps...

 

 

CHAPITRE I

 

SAINT JOSEPH ET LE MYSTÈRE DE L’INCARNATION

 

Dans son encyclique sur saint Joseph en 1989, le saint Père dit que le Verbe de Dieu est venu sur terre parce qu’il a pu assumer dans l’humanité tout ce qui se passait dans la Sainte Famille : il y avait le privilège de l’Immaculée Conception, il y avait aussi l’union transformante de saint Joseph, les deux s’associant dans l’unité sponsale d’une humanité intégrale. Le Fils a ainsi pu « assumer » un corps dans cette unité sponsale.

Quand Dieu le Verbe vient assumer le corps de la Vierge pour se constituer un corps, c’est déjà une assomption. L’incarnation et l’Assomption relèvent du même mystère : l’alpha rejoint toujours l’oméga. Le premier contact de l’éternité au temps entre Jésus et Marie et le dernier contact de l’éternité au temps entre Jésus et Marie est le même contact, car dans l’éternité, il n’y a pas « deux » mais « un ». Quand le Verbe de Dieu a assumé Son corps en l’Immaculée Conception, c’est le mystère de l’Incarnation, et quand il a assumé Marie, l’Immaculée Conception dans son corps, c’est le mystère de l’Assomption. C’est la même activité d’Amour à la fois éternelle et incarnée puisque le corps est impliqué.

Saint Joseph vivait de la Très Sainte Trinité, de la foi, de la grâce d’une manière telle qu’il pouvait épouser l’Immaculée Conception qui était toute disposée à être assumée.

Donc, quelque part, le Verbe de Dieu ne pouvait pas s’incarner pour la Rédemption si le mariage n’était pas absolument total entre Marie et Joseph. D’où l’importance, pour nous, d’essayer de comprendre quelle a été la vie spirituelle de saint Joseph et quelle est la mystique de la Sainte Famille pour voir comment rentrer dans l’union transformante. Parce qu’il y a bien une union transformante incroyable dans ce mystère de l’Incarnation.

Contempler le mystère de l’Incarnation nous immerge dans le tourbillon vivant de l’union transformante.

Quand le Verbe de Dieu se fait chair, cela transforme tout ! C’est pourquoi Joseph est tellement étonné qu’il se demande, puisqu’il est juste, s’il ne doit pas s’effacer complètement. C’est cela l’union transformante de sainte Thérèse d’Avila. Pour y entrer, pour en vivre comme Dieu le veut, il faut être entièrement ajusté au Saint-Esprit dans l’obéissance, à la grâce en plénitude incarnée. On voit bien que Jésus ne peut vivre que de l’obéissance tant que Joseph est là. C’est donc bien aussi un mystère d’obéissance.

 

I.         Le 5ème mystère joyeux est la porte d’entrée de l’union transformante dont saint Joseph est la clé.

Dans ses deux livres « Joseph, ombre du Père » et « Joseph, gardien du Shabbat », le Père Doze nous commente quelque part le 5ème mystère joyeux.

Dans le 5ème mystère joyeux nous voyons Jésus passer du Temple à Nazareth, pour s’y soumettre à une vie cachée en Marie et Joseph. Au premier abord, on ne voit pas en quoi ce mystère est joyeux.

Il faut remarquer qu’à partir du moment où Jésus sort du 5ème mystère joyeux, il est écrit qu’il grandissait en sagesse, en taille et en grâce devant Dieu et devant les hommes. Il y a deux relations « ad », comme à l’intérieur de la Très Sainte Trinité où le Verbe de Dieu est entièrement relatif au Père. En effet, s’il n’y a pas le Père, il n’y a pas de Fils ; car on n’existe qu’en fonction d’une relation. Et la réciproque est vraie : s’il n’y a pas de Fils, il n’y a pas de Père non plus car il n’y a aucun fondement en Dieu aux Personnes de la Très Sainte Trinité ; sinon il serait impossible que Dieu soit à la fois un et trois et trois en un.

Mais comment Jésus pouvait-il croître en sagesse puisse qu’Il est éternellement dans la vision béatifique, dans la plénitude de gloire, puisqu’il est Dieu dès le premier instant de son Incarnation, donc dans la vision béatifique, dans la toute puissance et dans l’absolue simplicité ? Son humanité subsiste dans cette toute puissance, dans cette divinité ; et c’est à travers le corps qu’il crée tout ce qui existe. il n’y a donc aucune croissance en Lui. En effet, la charité de Jésus n’augmente pas depuis le premier instant de Sa conception jusqu’à Sa mort. Il est toujours dans un Amour quasi infini et dans la vision béatifique.

Mais l’Écriture dit que Jésus grandissait en taille, en sagesse et en grâce «ad », devant Dieu et devant les hommes. Ce n’est pas pareil ! C’est cette relation surnaturelle incarnée avec tous les hommes qui augmente en Lui. Ce sont donc tous les hommes de tous les temps et de tous les âges de l’humanité qui, de plus en plus, viennent subsister dans Son Verbe d’infinitude et dans son Incarnation laquelle reste toujours la même.

Et ceci se fait en présence de Joseph. Joseph est le seul récepteur qui permette cette croissance de toute l’humanité dans le Christ, en taille, en sagesse et en grâce. C’est quelque chose de très fort ! Par exemple, quand nous sommes en adoration devant le Saint Sacrement, Jésus est là en face de nous, Il est comme un soleil, nous L’adorons, nous sommes en relation avec Lui mais ce n’est pas une relation subsistante (nous croyons en Lui, nous L’aimons). Quand nous communions, il commence à y avoir le vin qui se mélange à l’eau, alors on fait une seule vie quelque part on vit du même Esprit-Saint. Puis, petit à petit, comme Il s’est donné à moi, je porte en moi tout ce qu’il porte, par la création, par la sainteté, par la grâce, par la gloire, par le désir ou par la matière, puisque par la Résurrection, il porte tous les éléments de matière physiquement. Or, tous nous subsistons dans le Verbe. Cela veut dire que, maintenant, notre identité n’est pas pulvérisée mais absolument revitalisée à notre identité dans le Verbe, dans le Fils unique de Dieu qui récapitule tout, nous compris, et ceci à travers notre corps. Voilà un résumé de la spiritualité de saint Joseph. Et cela peut grandir de plus en plus, puisque cela doit se terminer par la récapitulation glorieuse de tout, par le retour du Christ.

Saint Joseph est donc la clé pour les derniers temps.

L’entrée dans cette clé, c’est justement ce 5ème mystère joyeux où l’on voit Jésus descendre du Temple, se rendre à Nazareth et être soumis à Marie et Joseph.

Essayons de voir ce que veulent dire ces trois verbes : descendre, partir, se soumettre.

À douze ans, Jésus a atteint l’âge de la maturité en Israël (la Barmitsva). Il est adulte et il peut s’exprimer socialement de manière libre. Il discute en effet avec les plus grands Nacis d’Israël, comme Hillel. Pendant trois jours et trois nuits, Jésus parle dans le Temple et Hillel découvre qu’il est beaucoup plus tendresse et détresse et sainteté et unification dans l’Esprit-Saint que tout ce qu’il pouvait penser.

Or, la grande fonction de Jésus est de faire miséricorde à Israël ; et faire miséricorde à Israël c’est lui révéler la grande communication de la sagesse du Verbe incarné à ceux-là seuls qui peuvent l’entendre. Jusque là, depuis douze ans, les seuls à pouvoir en vivre avec Lui étaient Marie et Joseph. Et maintenant cela se communique dans le Temple de Jérusalem, dans la Maison du Père !

Mais le corps de Joseph est comme la Maison du Père.

C’est son origine et sa fonction, son alpha et son oméga à saint Joseph d’être comme la maison du Père, en présence de Jésus, lequel vit essentiellement, dans sa science infuse, de l’origine et de la fin dans le temps présent. Alors, le corps de saint Joseph devient le temple de la présence de la première Personne de la Très Sainte Trinité. Comme le Verbe de Dieu est entièrement relatif au Père, II est ainsi entièrement relatif au corps de Joseph, et les milliards de milliards de cellules du corps de Joseph, qui dans leur mémoire génétique, ontologique, portent son origine et sa fin portent, du coup, toutes les origines et toutes les fins de l’humanité.

C’est par cette médiation de saint Joseph que le Corps mystique de Jésus commence à croître.

Cette médiation de saint Joseph nous fait comprendre à quel point la matière vivante, pas la matière inerte, est le lieu pour la manifestation du Père. C’est la raison pour laquelle le Père n’est jamais envoyé dans le monde comme le dit saint Thomas d’Aquin.

Quand Jésus est dans le Temple, il se passe quelque chose d’extraordinaire qui est dans la ligne de tout ce qui s’est passé avec Marie et Joseph depuis le mystère de l’incarnation jusqu’à l’âge de douze ans et qui commence à se communiquer à Israël. C’est la plus grande miséricorde que Dieu ait jamais faite à son peuple élu...

Dans le recouvrement de Jésus au Temple, quand l’Immaculée arrive avec Joseph, le premier acte libre que Jésus doit faire, c’est de quitter la Maison de son Père à Jérusalem, de quitter ce qu’il y a de plus glorieux de la miséricorde de Dieu dans le Temple de Dieu en Israël, pour que le monde entier puisse en jouir.

Et c’est la joie de Jésus que la plus grande miséricorde qui est faite puisse sortir du Temple ! Dans le livre d’Ezéchiel, quand le Verbe de Dieu sort du Temple, on voit effectivement que ce sont tous les torrents de gloire et de grâce qui sortent du Temple de Jérusalem dans le monde entier. Et le premier acte libre de Jésus est de renoncer à la miséricorde concrète (la shékinah) pour rentrer dans la gloire incarnée. C’est autre chose ! C’est une transformation absolue ! Il doit sortir du Temple, lieu où on vit tout, où on comprend tout, où la religion est à son maximum d’amour et de lumière. Il doit quitter ce Temple pour se rendre à Nazareth, pour obéir et être soumis à Joseph !

Car l’Immaculée est déjà soumise à Joseph comme nous l’indique ce 5ème mystère joyeux.

Quand Marie dit à Jésus : « Ton père et moi nous Te cherchions tout angoissés. Pourquoi nous as-Tu fait cela ? », c’est Joseph qui était dans l’angoisse ; parce qu’à partir de douze ans, la responsabilité de la vie intérieure et extérieure de l’enfant est confiée au père. Et Joseph sait qu’il doit obéir à l’Esprit-Saint. Or il sait par expérience que quand on passe à une étape très importante dans la vie de Jésus, cela transforme tout. De plus, Jésus leur répond : « Ne savez-vous pas que Je dois être dans la Maison de mon Père ? ». Alors Joseph se demande ce qu’il doit faire, s’il ne doit pas s’effacer. Cette angoisse de Joseph, Marie la pénètre de l’intérieur et en vit : Elle fait une seule chair avec Joseph, Elle est entièrement unie à tout ce que son époux vit intérieurement et Elle l’épouse dans sa mystique parfaitement ajustée à Dieu, comme Joseph épouse Marie dans sa plénitude de grâce. Dans cette angoisse, Marie est « hypotasso » : Elle y pénètre de l’intérieur, la porte par en dessous. C’est en effet l’angoisse de Joseph qui est la sienne : « Ton père et moi, nous étions dans l’angoisse ». On voit bien que l’Immaculée est entièrement soumise à Joseph. C’est cette unité sponsale vivant dans le corps de Marie que Marie présente à Jésus. Joseph ne dit rien.

Cette joie des épousailles, qui se communique aux joies de l'Époux par rapport au mystère d’Israël dans la « kabod » du Temple, cette rencontre entre les deux, fait la joie du 5ème mystère joyeux ; parce que, à ce moment-là, Joseph comprend qu’il est plus que le Temple. L’Immaculée et Joseph comprennent qu’ils sont plus, dans leur unité sponsale, que toutes les grâces et toutes les gloires qui sont sorties des mains du Créateur dans la création du monde, car elles sont entre eux deux et en même temps dans la Très Sainte Trinité, c’est-à-dire en même temps dans le créé et dans l’incréé. C’est pourquoi c’est une joie formidable !

Quand Jésus revient dans la Très Sainte Trinité incarnée de Nazareth, c’est la joie ! Il y a, à l’âge de douze ans, une révolution copernicienne de la glorification qui se fait. Jésus quitte le Temple, Il monte à Nazareth où Joseph se trouve corporellement dans l’unité sponsale avec l’Immaculée. C’est l’Incréé qui trouve, là, sa ressemblance à la Très Sainte Trinité dans toutes ses relations de dépendance ; et ils s’y soumettent. Dans ce 5ème mystère joyeux, il y a donc ces trois verbes : descendre du Temple, partir, se rendre à Nazareth et puis se soumettre.

À partir du moment où Jésus rentre dans cette obéissance, saint Joseph est projeté dans son rôle définitif, concret, analogue à celui du Père Éternel. C’est à ce moment-là que la croissance peut se faire, que la sagesse peut se répandre, à partir d’un capteur qui est le Capteur du Père Éternel, « l’instrument du Père éternel » comme dit Monsieur Olier, dans toute la création qui peut croître surnaturellement en sagesse, en taille et en grâce. C’est le Corps mystique du Christ qui commence à croître et qui doit aller jusqu’à sa maturité.

 

Saint Joseph est l’instrument de cette croissance du Corps mystique jusqu’à la fin du monde.

Tout commence et tout se termine avec le 5ème mystère joyeux. On voit bien notre origine, on voit bien notre fin mais entre les deux, on rame !

Justement, la vie spirituelle consiste à descendre de toutes nos manières de comprendre et de concevoir, à quitter tout ce que l’on a reçu jusqu’à maintenant, même la grande tradition sur laquelle on s’appuyait et qui est contenue dans le Temple pour rentrer dans le renouvellement de la Sainte Famille.

Avant de rentrer dans l’union transformante, il faut quitter le Temple, expirer, mourir à notre liberté (même religieuse) pour trouver un endroit au fond de nous où nous expirons complètement et où se trouve saint Joseph. Nous expirons à l’intérieur de Joseph qui, lui, respire la paternité dans le Fils ; et c’est l’Esprit-Saint qui commence à venir. Alors il y a une idée, une pensée, une prière, etc. C’est le temple : nous expirons à nouveau et c’est ainsi, quand ces trois verbes s’accomplissent, qu’on rentre dans la 4ème demeure de sainte Thérèse d’Avila.

Ce serait intéressant de regarder comment lire les mystères du Rosaire en fonction des 7 demeures de sainte Thérèse d’Avila et en fonction de ce 5ème mystère joyeux qui en est le gond, l’axe, le milieu :

- 1er    mystère joyeux - Il descend : le Verbe de Dieu s’incarne.

- 2ème  mystère joyeux - Il se rend à Nazareth. Pendant que la Vierge chantait son Magnificat, Joseph revenait tout

seul de Jérusalem à Nazareth ayant laissé l’Immaculée chez sa cousine Élisabeth.

Or, « Ce que le Fils voit faire à son Père, Il le fait pareillement », comme le dit Jésus dans

l’Évangile selon saint Jean.

- 3ème  mystère joyeux - La Nativité : c’est la soumission. Jésus est soumis au Saint-Esprit. On est porté par Marie et

Joseph.

De même, dans les 7 jours de la création, le jour du milieu, l’axe, c’est le 4ème jour où sont créés le soleil, la lune et les étoiles. Moïse disait que le mystère du soleil, c’est le mystère du Messie rempli de gloire ; le mystère de la lune illuminant la nuit, c’est le mystère d’Israël dans la gloire de Dieu au milieu de la nuit des nations ; le mystère des étoiles, c’est le mystère des saints de la théologie et des prophètes. L’axe c’est donc Jésus, Marie et les saints. C’est tout le mystère de la médiation, le trait d’union.

C’est l’amour de sainte Thérèse pour saint Joseph qui l’a fait se relever, et c’est ainsi qu’elle a pu engendrer le Carmel dans l’union transformante. Elle a fait le passage d’Élie à l’union transformante grâce à saint Joseph. Ce parallèle entre le 5ème mystère joyeux, la 4ème demeure de sainte Thérèse d’Avila, le 4ème jour de la création et le Carmel de l’union transformante est quelque chose de très beau.

On va basculer vers l’union transformante à partir de Joseph en se soumettant à lui, car il est notre père, beaucoup plus que notre père génétique que notre propre père. Ce mystère joyeux nous aidera beaucoup à apprendre comment pénétrer dans le mystère de l’oraison de quiétude et dans le mystère de la Sainte Famille.

Comme Jésus, quittons le Temple, expirons à nous-mêmes et soumettons-nous à saint Joseph ; alors l’Esprit -Saint pourra commencer son œuvre en nous. À travers saint Joseph, nous commençons un peu à toucher quelque chose du mystère de la paternité de Dieu dans le Fils. Et notre oraison peut commencer véritablement dans l’oraison de quiétude.

 

II. Saint Joseph et l’oraison de quiétude

D’après sainte Thérèse d’Avila, l’oraison de quiétude est le moment à partir duquel notre oraison commence à devenir surnaturelle. Dans les trois premières demeures, on fait une oraison dans la foi, l’espérance et la charité avec toute notre bonne volonté ; mais à partir de la 4ème demeure, dans l’oraison de quiétude, c’est l’Esprit-Saint qui commence à croître et à opérer Lui-même. Cela veut dire que la vie chrétienne ne commence que là. Vivre de l’oraison de quiétude nous sanctifie et nous permet de passer de la promesse, à savoir l’ancien Testament, à la réalisation concrète de l’union transformante, à savoir le nouveau Testament.

À ce moment-là, notre oraison peut donner l’apparence du sommeil extérieur parce que c’est l’Esprit-Saint qui œuvre Lui-même en nous. II faut retrouver le goût de l’oraison car sans elle rien ne se fait.

Nous devons demander à saint Joseph cette grâce de l’oraison de quiétude sous la mouvance de l’Esprit-Saint. Sainte Thérèse disait : « Si tu demandes comment faire oraison à saint Joseph, tu ne risques pas de t’égarer. ». Le « secret » de sainte Bernadette, c’était saint Joseph, son silence, sa simplicité et son humilité. Il faut comprendre sainte Bernadette quand elle dit : « Maintenant, mon père c’est Joseph. ». Il faut entendre Marie nous dire de descendre de notre temple, de toutes nos manières de prier, et là, trouver la tranquillité, le silence de saint Joseph où le Père Éternel est là « corporellement ». On peut alors respirer dans l’Immaculée Conception, dans l’Esprit-Saint. C’est la Sainte Famille qui commence là dans l’oraison de quiétude.

II faut entendre Marie nous dire : « Ne sais-tu pas que ton Père (première Personne de la Très Sainte Trinité) et Moi (l’Esprit-Saint) nous te cherchons dans l‘angoisse ? ! ». C’est l’unité entre les deux relations dans la Très Sainte Trinité et les deux relations dans la Sainte Famille, ad deum et ad hommes qui se conjoignent ; alors on rentre dans l’oraison véritablement. Sans l’oraison, toutes les révélations, toutes les lumières qu’on a eues ne nous sanctifient pas, elles restent des signes extérieurs et, à ce moment-là, on est une génération mauvaise ; car elles engendrent quelque chose de mauvais en nous.

Nous devons aimer Dieu et notre prochain comme nous-mêmes intérieurement. Notre prochain le plus proche c’est Jésus dans notre contemplation spirituelle, c’est l’Immaculée dans notre âme par la grâce, et c’est Joseph dans notre corps. Quand on vit de la spiritualité de l’amour de Dieu et du prochain en un seul acte, on est adopté dans la Sainte Famille ; alors on commence à naître à la Très Sainte Trinité dans l’incarnation de notre identité catholique, c’est-à-dire qui rassemble tout ce qui existe, tout ce qui existera et tous les hommes dans notre prière.

Il faut que toutes nos puissances soient absorbées dans cette quiétude, cette sécurité, cette grâce, cette finitude absolument silencieuse, très pauvre, soumise, incarnée, originelle, finale, et que cela dure pour que l’éternité transforme notre temps corporellement.

Dans la 12ème strophe du Cantique spirituel qui établit le passage des fiançailles au mariage, saint Jean de la Croix écrit :

   « Ah ! si dans le miroir de tes eaux argentées,

Tu me laissais voir soudain

Les yeux que sans fin je cherche (les yeux du Père, le regard du Père)

Et que je garde à l’ébauche dans mon âme. »

 

À un moment donné, c’est la fulgurance du Saint-Esprit qui nous met face au Père (ad Patrem) dans l’expiration d’amour, dans le repos absolu, dans la quiétude, dans le silence total, dans le corps, dans l’origine, dans la Résurrection. Alors la transformation est trop grande et l’ Épouse crie dans la 13ème strophe :

« Ah non, éloigne-les, mon Bien-Aimé ! »

C’est trop, je suis trop grand en Dieu et je me fais peur à moi-même dans l’humilité parfaite car, à ce moment-là, Dieu voit en moi son Fils, son Verbe. Alors on entend le Verbe brûlé par l’Esprit-Saint, l’ Époux, le Père dire :

« Viens, ma colombe, reviens !

Car voici qu’au sommet des monts

Apparaît le cerf blessé,

Savourant la brise fraîche de ton vol. »

 

C’est alors le passage de la 6ème demeure.

Nous allons essayer de voir comment, en même temps, vivre de la 4ème demeure avec saint Joseph et faire ce passage des fiançailles (5ème demeure) au mariage spirituel (6ème demeure) et à l’union transformante (7ème demeure) en s’aidant de saint Jean de la Croix et de la mystique de la Sainte Famille.

Ce passage de 4 à 7, c’est le mystère du shabbat. Et le gardien du shabbat c’est Joseph ! On fait alors le passage du 4ème jour au 7ème jour où Dieu se repose, grâce à Joseph qui épouse l’Immaculée Conception dans la soumission de Jésus.

Est-ce que trouver notre corps spirituel ce n’est pas trouver ce qu’engendre saint Joseph dans son corps glorieux qui fait qu’il est plus mon père en mon corps spirituel que mon propre père en mon corps terrestre, grâce à son unité sponsale avec la présence vivante, débordante, rayonnante de l’Immaculée, et qu’à ce moment-là tout le mal est transformé en bien ?

Jésus est né dans la Sainte Famille, non pas pour Lui, mais pour nous montrer la voie afin qu’on puisse rentrer dans cette Sainte Famille pour vivre de l’union transformante par l’oraison de quiétude.

(N.B. II n’y a pas d’autre voie que l’oraison ; on peut recevoir des grâces surnaturelles par accident, mais elles restent périphériques, charismatiques et ne nous sanctifient pas).

Saint Jean de la Croix dans son Cantique spirituel parle pour Mère Anne de Jésus qui vit déjà de l’oraison de quiétude. L’oraison de quiétude c’est ce climat intérieur qui retrouve la source de sérénité de la Sainte Famille (là où commencent la nuit, l’aridité, la foi, l’amour, la grâce, la vie éternelle dans l’autre monde, dans le monde nouveau). Il explique les fiançailles, et dans les fiançailles l’éclosion de l’union transformante de l’Époux et de l’Épouse, du Verbe et de son Père, dans un corps qui est le mien.

Quand on lit ce Cantique spirituel, tranquillement, secrètement, mortellement (puisqu’il faut quitter le Temple), expirationnellement, transformationnellement, dans le repos de cette quiétude absolue, chaque mot tombe dans la Sainte Famille, là où se trouve Joseph.

 

 

CHAPITRE II

 

LE CANTIQUE SPIRITUEL

 

1 -      « Où t’es-tu caché, Ami,

Toi qui me laissas dans les gémissements ? (Là, on parle à Celui qu’on aime, Jésus, qui est à la fois mon Père, mon Verbe, mon identité et mon amour dans l’Esprit-Saint. On ne peut pas ne pas voir là saint Joseph disant par la bouche de Marie « Ton Père et moi nous Te cherchions II était dans le Temple)

Pareil au cerf Tu as fui ;

M’ayant navré, après Toi

Je sortis criant, et Tu étais parti !

 

2 -      « Pâtres qui vous en irez

Là-bas, jusqu’au sommet, par les bergeries.

Si vous voyez d’aventure

Le Mieux Aimé, (Celui que j’aime le plus)

Dites-lui que je suis dolente, peineuse, mourante.

 

3 -      « En quête de mes amours,

Je m’en irai par ces monts et ces rivages, (les mystères et les torrents des sacrements)

Point ne cueillerai de fleurs, (je n’en tirerai aucun fruit)

Les fauves point ne craindrai, (même dans le mariage, je ne trouve pas mon bien)

Et je passerai les forts et les frontières. (je dépasserai toutes les limites de la création)

 

4 -      « Ô forêts,  sombres bosquets,

Qui fûtes plantés par la main de l’Ami !

Pâturages verdoyants,

Ô Pré de fleurs émaillé,

Dites-moi s’Il passa au milieu de vous ? (toutes les œuvres, tous les charismes, toutes les gloires de Dieu)

 

5 -      « En répandant mille grâces, (l’Immaculée Conception)

Il a passé par ces bois en grande hâte, (mes nuits, mes croix, mes misères)

Posant sur eux son regard,

D’un reflet de son visage,

Il les laissa tout revêtus de beauté. (je commence à aimer la croix, la nudité, l’aridité, la purification)

 

6 -      « Las, qui pourra me guérir ?

Achève de Te livrer sans feinte aucune, (directement)

Ne veuille plus désormais

M’envoyer de messagers

Qui ne savent me dire ce que je veux. (ce dont j’ai soif)

 

7 -      « Tous ceux qui sont de Ta suite

Me vont rapportant mille grâces de Toi ;

Tous davantage me navrent

Et mourante je demeure

D’un je ne sais quoi par eux balbutié. (il faut dépasser le mystère de l’Immaculée Conception (les mille grâces) pour atteindre avec Elle la pauvreté instrumentale de saint Joseph)

 

8 -      « Mais comment peux-tu survivre

Ô ma vie, en ne vivant pas où tu vis,

Quand déjà il te faudrait

Mourir sous le coup des flèches (les blessures de l’amour)

De ce qu’en ton cœur tu conçois de l’Aimé ?

 

9 -      « Que ne guéris-Tu ce cœur,

Puisque c’est de Toi qu’il a reçu sa plaie ?

Et, me l’ayant dérobé,

Pourquoi le laisser ainsi

Et ne pas emporter le vol que Tu fis ?

 

10 -    « Éteins mes impatiences,

Puisque d’y mettre fin nul n’a le pouvoir ;

Et puissent mes yeux Te voir,

Puisque Tu es leur lumière

Et c’est pour Toi seul que je les veux garder.

 

11 -    « Découvre-moi Ta présence,

Que la vision de Ta beauté me tue !

Qui pour l’amour est en peine

Guérir ne peut, Tu le sais,

Qu’en présence du visage de l’Aimé !

 

12 -    « Ô Fontaine cristalline !

Si dans le miroir de tes eaux argentées

Tu me laissais voir soudain

Les yeux que sans fin je cherche

Et que je garde à l’ébauche dans mon cœur...

 

13 -     « Éloigne-les, mon Aimé !

Voici que je m’envole, (ici, nous touchons pour la première fois le Père qui dans son Sein nous montre le Verbe dont Il se nourrit pour produire l’Esprit-Saint. C’est le passage de la 6ème à la 7ème demeure, des fiançailles au mariage mystique, à l’union transformante. Et cela est trop fort pour moi. Je m’envole, je fuis à présent, je fuis éperdument la Très Sainte Trinité, le Verbe parce que l’amour est trop fort, et que je me meurs de terreur. Et là, c’est le retournement du Cantique. Alors la voix du Verbe, la voix du Père, la voix de l’Esprit-Saint se fait entendre :

 

Viens ma colombe, revient ! (on va passer de la Très Sainte Trinité au Sacré-Cœur de Jésus)

Car voici qu’au sommet des monts

Apparaît le cerf blessé

Savourant la brise fraîche de ton vol. (dans le Sacré-Cœur de Jésus, les grandeurs de la Très Sainte Trinité continuent de croître sans qu’il y ait d’angoisse. C’est le passage du 5ème mystère joyeux au 5ème mystère douloureux et au 5ème mystère glorieux, mais c’est le même mystère car il y a une simultanéité et une continuité entre ces trois mystères.)

 

14 -    « Mon Bien-Aimé, les montagnes,

Les solitaires et ombreuses vallées,

Les îles étrangères,

Les fleuves au bruit puissant,

Le sifflement des vents porteurs de l’amour.

 

15 -    « La nuit accoisée (intense)

Qui laisse deviner l’éveil de l’aurore,

Le concert silencieux,

La solitude sonore, (la solitude habitée)

Le souper qui récrée et qui énamoure.

 

16 -    « Notre lit est tout fleuri, (l’union transformante, c’est le repos, le lit, mais cette unité de l’époux et de l’épouse est quelque chose de très vivant)

Environné de cavernes de lions,

Teint d’une teinture pourpre,

Édifié dans la paix,

De mille écus d’or portant une couronne. (Marie-Reine)

 

17-     « À la quête de Ta trace,

Les jeunes filles courent sur le chemin,

Sous le choc de l’étincelle,

Du vin aromatisé,

Comme des parfums nés d’un baume divin. (dérivé des cieux : les cieux c’est la simplicité de Dieu dans son essence)

 

18 -    « Dans le secret du cellier

De mon Aimé j’ai bu, et quand je sortis,

Parmi toute cette plaine,

Plus ne savais chose aucune,

Et je perdis le troupeau jadis suivi.

 

19-     « Là, son cœur Il me donna ;

Il m’apprit une savoureuse science.

Moi. je me donnais vraiment

À Lui, sans rien excepter.

Et là je lui promis d’être son épouse. (d’être son Verbe, car l’Épouse dans la Très Sainte Trinité, c’est le Verbe)

 

20 -    « Mon âme s’est employée

Avec son domaine entier à son service,

Je ne pais plus de troupeau,

D’autre office je n’ai plus,

Je n’ai plus d’autre œuvre que celle d’aimer. (c’est pourquoi dans la vie religieuse, la règle interdit d’avoir  aucune œuvre, si grande qu’elle soit. La seule œuvre c’est l’amour et l’oraison. Ici on rentre dans le mariage qui fait dire à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus : « Dans le cœur de l’Église, ma mère, je serai l’amour ».)

 

21 -    « Que si donc au pré public,

De ce jour nul ne me voit, nul ne me trouve,

Dites que je suis perdue ;

Et qu’allant énamourée, (l’amour à l’intérieur de l’amour)

Je me suis faite perdante et j’ai gagné. (en choisissant la nuit, l’aridité, j’ai gagné la Très Sainte Trinité. C’est lorsque j’ai tout perdu que je suis gagnant et si j’essaie de garder un tout petit peu, je perds tout ; c’est pour cette raison qu’on pardonne.)

 

22 -    « D’émeraudes et de fleurs,

Moisson faite dans les fraîches matinées,

Nous tresserons des guirlandes

Que ton amour fleurira

Et qu’un seul de mes cheveux entrelacera.

 

23 -    « Un seul cheveu seulement

Que sur mon cou Tu as regardé voler ;

Tu regardas sur mon cou

Et tu restas pris en lui,

Et par un seul de mes yeux Tu Te navras. (je ne peux plus faire un seul mouvement, même dire à Dieu « je T’aime ». Un seul cheveu blesse l’amour, un seul mouvement de mon âme. II faut expirer à nous-mêmes, sortir du Temple et rentrer dans le silence corporel de Joseph, lieu de la Très Sainte Trinité.)

 

24 -    « Lorsque Tu me regardais,

C’est leur grâce qu’en moi Tes yeux imprimaient ;

Pour ce, Tu me chérissais ;

Et pour ce, méritaient-ils,

Les miens, d’adorer ce qu’ils voyaient en Toi ?

 

25 -    « Ne me méprise donc plus

Si Tu m’as trouvé le teint brun, maintenant

Tu peux bien me regarder

Puisque Tu m’as regardée

Et que Tu laissas en moi grâce et beauté. (je me laisse regarder et aimer par Dieu)

 

26 -    « Chassez-nous les renardeaux

Car notre vigne est déjà toute fleurie,

Cependant qu’avec des roses

Nous serrerons une pigne,

Et que sur la montagne nul ne paraisse. (que le Père ; il ne reste plus que le mystère)

 

27 -    « Arrête, Aquilon de mort !

Viens, Auster, Toi qui réveille les amours,

Viens souffler par mon jardin,

Et que ses parfums s’épandent,

Et l’Aimé se nourrira parmi les fleurs.

 

28 -    « Et l’épouse a pénétré (la Parole du Père, la parole du Verbe, la présence de l’Esprit-Saint)

Dans le jardin charmeur qu’elle désirait.

Elle repose, enivrée,

Tandis que son cou se penche

Appuyé sur les doux bras du Bien-Aimé.

 

29 -    « C’est à l’ombre du pommier,

C’est là que Je reçus ta promesse et là

Que je te donnais la main ;

Et tu retrouvas l’honneur

Là où ta mère en malheur était tombée.

 

30 -    « Oiseaux qui légèrement

Vous envolez, lions, cerfs, daims bondissants,

Rivages, monts et vallées,

Ondes, souffles et ardeurs,

Et craintes qui faites les nuits sans sommeil,

 

31 -    « Par les lyres caressantes

Et le chant des sirènes, Je vous conjure,

Que s’apaisent vos colères ; (la création toute entière rentre dans la Gloire lorsque je fais oraison)

Et ne touchez pas au mur,

Pour que l’épouse trouve un sommeil plus sûr.

 

32 -    « Ô vous, nymphes de Judée,

Tandis que parmi les fleurs et les rosiers

L’ambre donne un parfum,

Demeurez dans les faubourgs,

Et veuillez ne point toucher à notre seuil.

 

33 -    « Cache-Toi, mon doux Ami, (ma Très Sainte Trinité)

Vois - le visage tourné vers les montagnes -

Et veuille ne point le dire ;

Mais regarde les compagnes

De celle qui va par les îles étranges.

 

34 -    « La colombe toute blanche

Avec le rameau dans l’arche est retournée,

Et la tourterelle enfin

Sur les rives verdoyantes

A trouvé le compagnon tant désiré.

 

35 -    « Solitaire elle vivait,

Et en solitude elle a posé son nid, (c’est l’oraison qui nous permet de vivre de l’amour universel catholique et incarné)

Et la guide en solitude,

Solitaire son Ami,

Lui aussi navré d’amour en solitude.

 

36 -    « Mon Ami, soyons en joie,

Et allons-nous en nous voir en Ta beauté,

Au mont ou à la colline

Où l’eau pure vient jaillir,

Et pénétrons plus avant dans l’épaisseur. (de l’Amour).

 

37 -    « Bientôt alors nous irons

Dans les cavernes très hautes de la pierre, (jusque dans le monde minéral)

Elles sont si bien scellées !

C’est là que nous entrerons,

Et nous y goûterons le moût des grenades. (c’est dans le monde minéral qu’on trouve le fruit de l’unité sponsale incréée et créée)

 

38 -    « Et là Tu me montrerais

Ce que mon âme désirait instamment,

Et là Tu me donnerais

Bientôt, Toi qui es ma vie,

Ce que l’autre jour déjà Tu me donnas.

 

39 -    « Et c’est le souffle de l’air,

Le rossignol dans la douceur de son chant,

Le bocage avec ses charmes

Au sein de la nuit sereine,

Dans la flamme qui consume et plus ne peine.

 

40 -    « Nul regard n’y atteignait,

Plus ne se montrait désormais l’Ennemi, (le mal)

Les assiégeants s’accoisaient,

Tandis que les cavaliers (ce sont les Anges)

À l’aspect des eaux poursuivaient leur descente.

 

N.B. : Voir en annexe 1 une deuxième traduction, celle du Père Cyprien de la Nativité

 

 

CHAPITRE III

 

L’UNION TRANSFORMANTE INTÈGRE LE POINT DE VUE DU CORPS

 

I. Comment le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont présents, pour ainsi dire, corporellement.

 

C’est ce Cantique Spirituel que nous allons essayer de commenter à la lumière de l’Oraison de quiétude, à la lumière de l’union avec Joseph de manière incarnée, car il faut que le Verbe de Dieu puisse prendre chair en nous. Il faut intérioriser le mystère de l’incarnation par notre oraison, par notre vie spirituelle, pour que notre foi en Jésus devienne une foi surnaturelle et qu’une transformation s’opère de l’intérieur pour qu’on puisse enfin faire partie de la famille chrétienne. Car la grâce est un jaillissement de vie éternelle, c’est une résurrection. C’est ainsi que nous passerons de la Promesse de l’Ancien Testament à la réalité du Nouveau Testament.

II faut demander à l’Esprit-Saint, au maître de sagesse, la grâce de nous expliquer ce mystère de l’Union transformante qui fait que la transcendance de Dieu s’empare de manière de plus en plus proche de notre vie intérieure. Cette spire progressive, qui passe par les sept demeures de l’union transformante, jusqu’à nous rendre proxime et un avec la transcendance du Verbe incarné, se termine dans la grande transformation en gloire qui nous rend, dès à présent, fils de Dieu dans le Fils.

L’Union transformante est un jaillissement de vie éternelle, c’est une résurrection intérieure.

À partir de la 4ème demeure, l’Esprit-Saint, nous immergeant dans la grâce de manière surnaturelle, nous permet de saisir comment la grande trame, la grande dramatique de l’union transformante, qui est la fusion de cette partie spirituelle la plus profonde, la plus personnelle en nous, avec la gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection, intègre aussi le point de vue du corps.

Car si l’on regarde bien, dans le Cantique de l’Époux et de l’Épouse, c’est notre âme qui épouse Dieu, qui est l’Épouse du Christ, comme dans le Cantique spirituel de saint Jean de la Croix. C’est une course de l’âme, une fusion entre la partie spirituelle qui est en nous et l’Esprit-Saint ; mais notre corps est un petit peu absent comme s’il fallait en faire abstraction ! L’union transformante est bien le fruit d’une adhésion spirituelle où notre intelligence est engagée par la foi ; notre identité, notre liberté dans le don sont engagées par l’espérance et notre volonté spirituelle (toutes nos soifs d’amour) est engagée par la charité : les trois puissances de la vie spirituelle sont là. Effectivement, par la foi, l’espérance et la charité surnaturelles, on vit de cette union transformante de manière merveilleuse. Mais il y a aussi en nous des puissances de vie sensitive et de vie corporelle : on voit bien saint François d’Assise dire à son corps « marche ou crève » ; le corps doit obéir. Aujourd’hui cela nous ennuie un peu, peut-être à juste titre !

En effet, la doctrine spirituelle et apostolique de l’Église nous a appris que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont, pour ainsi dire, présents corporellement.

Le Verbe de Dieu, deuxième Personne de la Très Sainte Trinité, est rendu présent par le Christ Jésus dans la chair humaine, et l’Esprit-Saint est rendu présent par l’Immaculée Conception. En effet, l’Église vient de proclamer que MARIE est Immaculée dans sa Conception. Elle est le fruit de l’unité de deux Personnes divines, le Verbe de Dieu et l’Esprit-Saint, dans le Cœur sacerdotal du Christ ; grâce par laquelle nous comprenons qu’il y a quelque chose de nouveau qui s’incarne dans le monde à la « constitution » du mystère de l’Immaculée Conception et qui fait que le Saint-Esprit, troisième Personne de la Très Sainte Trinité, a un visage incarné, celui de l’Immaculée Conception.

 

·           Le Mystère de l’Immaculée Conception

 

L’identité de quelqu’un dans l’ordre de l’être se détermine en fonction de son origine. Nous sommes créés à partir de rien tandis que Marie est constituée à partir du Mystère de l’Immaculée Conception. C’est inouï ! C’est quand même une créature, mais on peut dire, avec crainte et tremblement, que ce n’est pas une créature comme nous !

Au moment où il est blessé par le coup de lance, le corps du Christ est dans l’état cadavérique, il n’est pas porté par l’humanité du Christ : son Âme s’est arrachée de son corps, donc l’humanité du Christ n’est plus présente dans le corps mort de Jésus. Mais le corps mort de Jésus n’est pas un cadavre, il n’est pas corrompu parce qu’il est gardé dans une unité formelle et même biologique, physiologique, en tant que corps, par le Verbe de Dieu. Le corps mort de Jésus subsiste dans le Verbe de Dieu. C’est la seule fois, dans l’histoire de l’humanité, qu’un Etre qui est mort continue, quant à son corps, à subsister de manière vivante dans sa Personne : et pour cause, puisque c’est le Verbe de Dieu.

C’est donc le Verbe de Dieu qui est atteint directement quand on touche le corps mort du Christ. À ce moment-là, le Verbe de Dieu se donne, se livre, personnellement, directement, dans un amour et dans un don total à travers un geste d’amour qui est d’une passivité absolue puisqu’Il pâtit substantiellement une blessure mortelle. Il ne souffre pas activement, puisqu’Il est mort, c’est donc une passivité substantielle d’amour. Et il rejoint, dans sa manière de se donner, en tant que Personne divine, donc absolue et éternelle, la manière dont l’Esprit-Saint se constitue comme Don dans la Très Sainte Trinité, c’est-à-dire de manière substantiellement passive.

Pour la première fois, la deuxième Personne de la Très Sainte Trinité, le Verbe, aime, nous aime, de la même manière que le Saint-Esprit aime le Père et le Fils dans la Très Sainte Trinité. Il y a une similitude entre l’Esprit-Saint dans la Très Sainte Trinité, et le Verbe dans le Don qui nous est fait à travers le Cœur sacerdotal du Christ ; et nous pouvons percevoir une nouvelle communion de Personnes, une sorte de mariage dont le fruit est l’Immaculée Conception qui s’origine ainsi dans la fusion d’Amour du Verbe de Dieu et de l’Esprit-Saint, à travers le Cœur sacerdotal du Christ.

Le Verbe de Dieu est lié, quant à son Incarnation, au corps du Christ ; et l'Esprit-Saint va être manifesté à travers le corps de l’Immaculée Conception. On a progressé par rapport à saint Jean de la Croix ; notre Église s’est approfondie ! On est passé du mystère de l’Incarnation, première incorporation du corps dans le mystère de la Très Sainte Trinité, au mystère de la Croix où l’on voit que Marie est le visage incarné de l’Esprit-Saint, là où Marie rejoint Elle-même le mystère de son origine, celui de sa conception immaculée.

C’est cela le secret du Cantique des Cantiques de l’Ancien Testament, qui nous montre comment la Femme, face à l’arbre de vie (la Croix) découvre son origine et dit à son Époux : « Ah, que je Te fasse rentrer dans la chambre de ma mère, dans le lit de celle qui m’a conçue ! ». L’Immaculée Conception, découvrant son origine, veut faire rentrer l’Esprit-Saint jusqu’à la plus grande profondeur de son origine personnelle pour réaliser ce mariage absolu. Il y a comme une espèce de retour prodigieux au mystère, non pas de l’Incarnation, mais de la conception de l’Immaculée Conception et de ce qui a précédé le mystère de l’Incarnation. Tout le mystère de l’Immaculée Conception est pour la maternité divine de Marie, pour arriver au mystère de l’Incarnation du Christ. Donc tous les premiers moments de l’Immaculée Conception jusqu’à l’Incarnation du Christ trouvent leur signification dans ce qui précède immédiatement le mystère de l’Incarnation, son mariage avec Joseph. C’est pourquoi il y a là quelque chose de très important pour nous.

De cette communion sponsale entre la 2ème et la 3ème Personne de la Très Sainte Trinité, émane cette sphère de Lumière qu’on appelle l’Immaculée Conception, que l’Immaculée rejoint à la Croix, à travers le corps mort du Christ. C’est ce mariage d’Amour surnaturel qu’il va falloir intérioriser jusque dans le point de vue de notre corps, puisque Dieu est pur Esprit : c’est cela le mystère de la « sponsalité » comme le dit le saint Père.

Le Verbe de Dieu se trouve au ciel dans la Résurrection : c’est le Christ ressuscité. Quant à Marie, l’Esprit-Saint va s’emparer de plus en plus de son corps et Elle va progressivement disparaître jusqu’à ne plus subsister que dans cette brûlure d’Amour. Et l’Esprit-Saint Lui-même va disparaître pour se fondre dans ce mariage d’amour réalisé à la Croix.

Ainsi, cette unité d’Amour réalisée à la Croix entre le Verbe de Dieu et l’Esprit-Saint va se réaliser de plus en plus dans la chair de Marie dans le mystère de la Dormition, jusqu’à l’incarnation ultime de ce mystère d’amour qui est le mystère de son Assomption (proclamation du dogme en 1950).

C’est cela le grand tremblement de terre ! Dans le mystère de l’Assomption, c’est presque plus l’Esprit-Saint et le Verbe qui trouvent un mariage dans la chair, que Jésus et Marie qui font une seule Chair glorieuse.

Quand l’Esprit-Saint a fait cheminer l’Église jusqu’en 1950, Il nous fait comprendre qu’il faut prendre saint Jean de la Croix, certes, mais qu’il faut voir maintenant comment le corps doit s’intégrer. On passe de l’Église des débuts où on a intégré le mystère de l’Incarnation, qui aboutit à la grande mystique du Carmel, au mystère de l’Immaculée Conception où on est projeté à retrouver ce que Marie fait en tant que Reine, c’est-à-dire où Elle réalise ce qu’est son origine. Parce qu’il y a trois aspects dans le mystère de l’Assomption : la Dormition, l’Assomption et le mystère de Marie Reine.

Nous sommes amenés, avec Elle, à nous projeter dans l’origine du mystère de l’Immaculée Conception et à retrouver ce mystère de mariage qui trouve son terme sur terre dans son mariage avec saint Joseph.

On voit bien la manifestation humaine du Verbe, on voit bien la manifestation humaine de l’Esprit-Saint, mais où est la manifestation humaine du Père ?

II y a là quelque chose de très important. C’est pourquoi les prophètes du Christianisme ont dit que c’est seulement à la fin des temps que l’on comprendra ce que le mystère de Joseph peut signifier et qu’on en vivra. Et c’est seulement à ce moment-là que le Christ pourra revenir, que le cosmos pourra être intégré. C’est pourquoi c’est si important de comprendre cette espèce d’union qu’il y a eu entre l’Immaculée Conception et saint Joseph dans cette présence silencieuse de Dieu le Père. II n’y a pas de parole pour cela. Comment se fait-il que saint Joseph soit comme cela ? N’est-ce pas parce que c’est ce que l’on doit faire ? N’est-ce pas là notre vocation ?

II va donc falloir pénétrer dans cette Sainte Famille Glorieuse, pour saisir cette présence silencieuse, paternelle et incarnée de Dieu auprès de l’Immaculée Conception, à travers saint Joseph, où la Très Sainte Trinité, de l’intérieur de notre âme, va pouvoir être présente, non seulement à l’intérieur de notre âme, mais aussi de notre corps.

C’est par cette incorporation de l’union transformante dans le mystère de la Sainte Famille que notre corps sera lui-même transformé en corps spirituel.

 

II.       Communions sponsales au Ciel où le corps est impliqué

 

1. Dans le Sacré Cœur de Jésus, on va trouver la communion sponsale qu’il y a entre Jésus rempli de gloire et Marie remplie de gloire, s’associant dans un seul Amour intégral humain rempli de gloire. C’est le nouvel Adam et la nouvelle Ève dont le terme pour Jésus est le Mystère du Sacré Cœur, et pour Marie, le Mystère de son Assomption.

Quand on rentre dans le Sacré Cœur de Jésus, il faut comprendre comment cela se réalise et où notre corps se situe.

2. Il y a aussi une communion sponsale entre Marie remplie de gloire et l’époux de l’Immaculée Conception rempli de gloire, saint Joseph. Cette Union est portée par le Verbe de Dieu dans l’incréé et se termine dans le mystère de la Sainte Famille Glorieuse.

3. Il y a une communion de complémentarité des personnes entre Joseph et l’Enfant-Jésus, l’Innocent. C’est bien une communion analogue à l’union sponsale parce que, dans la Très Sainte Trinité, le Fils est le Fils du Père en même temps qu’Il est l’Épouse de l’Époux. Et quand il y a le Verbe incarné, Jésus qui est fils de saint Joseph en même temps que Joseph est son père, cette unité d’Amour va impliquer un amour tout à fait extraordinaire et qui est actué par la présence des Personnes divines.

Ces trois communions sponsales vont engendrer une espèce de nouveau mystère de l’Incarnation que l’on appelle la Jérusalem Céleste. Ces trois communions sponsales dans la Sainte Famille Glorieuse où le corps est impliqué vont attirer notre corps en premier, le Corps mystique de l'Église en second, puis la Jérusalem Céleste, et finalement, la création toute entière. II faut que l’on puisse rentrer dans cette espèce de tourbillon incarné dans ces trois rencontres interpersonnelles dont le soubassement théologique est le Mystère de l’Immaculée Conception.

4.         Le mystère de l’Immaculée Conception

Marie possède comme nous un corps. Elle est notre sœur. Et pourtant Elle est immaculée dans sa conception. Ce privilège unique qui est le sien, est le fruit de l’unité entre le Verbe de Dieu et l’Esprit-Saint, dans le Cœur sacerdotal du Christ. De même que l’Esprit-Saint est le fruit de l’unité du Verbe de Dieu et du Père, de même l’Immaculée Conception est le fruit de l’unité des deux Personnes divines, le Verbe et l’Esprit-Saint ; mais, comme c’est à travers le corps créé et mort du Christ, Marie est une créature... Mais quelle créature !

Du Cœur de Jésus, blessé par le coup de lance, est sorti l’eau, le sang et l’Esprit-Saint : l’Esprit-Saint est la 3ème Personne de la Très Sainte Trinité, le Sang représente la vie intime du corps du Verbe crucifié, donc du Verbe de Dieu, directement lié à son corps et l’Eau, l’Immaculée Conception.

Par le mystère de l’Immaculée Conception, nous pouvons rejoindre le Verbe de Dieu lorsque Lui-même se conjoint à l’Esprit-Saint, à l’intime de son corps glorifié dans le Sein du Père.

II y a donc bien une Communion des Personnes, entre la 1ère et la 2ème Personne de la Très Sainte Trinité et une Communion des Personnes entre la 2ème et la 3ème Personne de la Très Sainte Trinité.

Mais, n’y a-t-il pas une Communion des Personnes entre la 1ère Personne de la Très Sainte Trinité (le Père) et la 3ème Personne de la Très Sainte Trinité (l’Esprit-Saint) ?

C’est toute la question que l’on se pose. Grâce au Père Maximilien Kolbe, nous pouvons bien répondre par l’affirmative en nous orientant théologiquement à travers le mystère de l’Immaculée Conception.

Le Père Kolbe dit qu’il faut reprendre toute la théologie à partir du mystère de l’Immaculée Conception. Je dirais plutôt à partir du mystère de l’Assomption, donc de l’Immaculée Conception dans son terme ; parce que le mystère de l’Immaculée Conception est un mystère d’origine dont le fruit au ciel est le mystère de Marie Reine. En effet, l’Amour de Marie s’intensifie tout le temps : Elle va de survenue en survenue de l’Esprit-Saint. Cela commence à sa conception et se déploie dans l’éternité, mais c’est le même mystère.

5.         Le mystère de Marie Reine

Marie est comme le visage visible du Saint-Esprit, porté par le Verbe ; car l’Esprit-Saint est un Amour tellement parfait qu’il ne peut agir plus d’Amour. Il n’est que plénitude d’Amour, celle de l’Union du Père et du Fils dans l’incréé. Il n’y a donc pas d’initiative d’amour pour l’Esprit-Saint, il ne peut que demeurer dans une passivité d’Amour substantielle et totale ; Il ne peut pas produire activement d’Amour dans l’incréé. Mais lorsqu’il rejoint la passivité substantielle d’Amour du Verbe de Dieu dans le Cœur sacerdotal du Christ à la Croix, l’unité des Deux devient exprimable activement dans l’Immaculée Conception. L’Immaculée Conception est en puissance ce que l’Esprit-Saint est en acte.

Et lorsque Marie se révèle à sainte Bernadette, en lui disant : « Je suis l’Immaculée Conception », Bernadette comprend que c’est l’Esprit-Saint qui nous révèle qui Il est. Saint Louis Marie Grignon de Montfort dit qu’il suffit qu’on rentre à l’intérieur du mystère de l’Immaculée Conception pour que l’Esprit-Saint se précipite en nous comme un torrent. Marie est Épouse de l’Esprit-Saint. C’est Marie qui, par la médiation de son Corps ressuscité au ciel, donne à l’Esprit-Saint le vecteur d’unification qui Lui permet de rejoindre dans l’amour incarné la communion des Personnes : c’est le mystère de Marie Reine.

6.         Le mystère de la Sainte Famille Glorieuse

De son côté, le Père, parce qu’Il engendre un Fils, le Verbe de Dieu, envoie le Verbe prolonger en Lui sa Présence incarnée, à travers la médiation du corps ressuscité de saint Joseph. Or, en même temps, l’union entre l’Immaculée Conception et l’Époux de l’Immaculée Conception est portée par le Verbe de Dieu : c’est le mystère de la Sainte Famille Glorieuse.

Alors nous comprenons à quel point Dieu a mis un lien de nécessité entre le Corps glorifié du Christ et celui qu’Il va assumer dans l’Immaculée lors de son Assomption. Et enfin ce besoin, pour ainsi dire, qu’ils en auront ensemble de se retrouver dans le sein du corps glorifié de saint Joseph qui incarne glorieusement la Présence du Père, pour Jésus et Marie. Dès lors, tout est prêt pour attirer tous les corps spiritualisés dans le monde nouveau de la Gloire du Père, du Fils et de l’Esprit-Saint.

Tel est bien le contexte incarné du Cantique spirituel de notre corps : le mystère de la Sainte Famille Glorieuse.

Il faut beaucoup prier l’Esprit-Saint pour que l’on puisse trouver, à travers le Cœur de Jésus, comment le Verbe de Dieu dans la gloire permet que se réalise l’union entre l’Immaculée Conception et l’Époux de l’Immaculée : c’est toute la mystique de la Sainte Famille Glorieuse qui est au ciel, dans l’incréé, et qui se révèle à nous, celle qu’on atteint par la foi ; car la Sainte Famille de Nazareth n’est pas un mystère. Il faut demander cette grâce à Jésus de pouvoir vivre de son Sacré-Cœur pour pénétrer dans l’union transformante et saisir ce que porte le Verbe de Dieu. Il porte le Père et Il est porté par le Père. C’est ce que Jésus nous dit : « Le Père est en Moi et Je suis dans le Père ». Il porte également l’Esprit-Saint, corporellement, à travers l’Immaculée Conception (Marie Reine) et l’Époux de l’Immaculée. C’est ce dernier Amour qui révèle tout le mystère du ROYAUME DES CIEUX, celui de la Sainte Famille Glorieuse. II y a là quelque chose de terminal. Toute commence par la Sainte Famille et tout se termine par la Sainte Famille : c’est cela le soleil de la Jérusalem Céleste.

Le corps est impliqué pour la première fois dans une communion sponsale glorieuse dans le mystère de l’Assomption. Mais je préfère dire que tout commence encore avant, dans le mystère de l’Immaculée Conception : Le mystère de l’Immaculée Conception précède le mystère de l’Incarnation.

En effet, cette communion sponsale entre le Verbe de Dieu et l’Esprit-Saint, dans le Cœur sacerdotal du Christ, précède le mystère de l’Incarnation. C’est pourquoi, quand Marie est au pied de la Croix, c’est si important pour Elle, car Elle découvre qui Elle est : Elle découvre qu’Elle est originée dans l’union de deux Personnes divines, le Verbe et l’Esprit-Saint et qu’ELLE EST cette origine. C’est pourquoi Elle dit : « Je suis l’Immaculée Conception ».

On peut donc dire que la 1ère communion sponsale qui est le principe de tout, c’est bien l’Immaculée Conception ;

La 2ème communion sponsale, c’est le face à face, le « HE » entre l’Homme et la Femme, l’Époux et l’Épouse, le nouvel Adam et la nouvelle Ève. Lorsque nous découvrons ce mystère de l’Immaculée Conception, et notre pauvreté instrumentale, nous n’avons plus qu’un désir, celui de nous plonger dans le Cœur Immaculé de Marie uni au Sacré-Cœur de Jésus. Alors, immergés dans le Cœur de Marie, nous commençons à vivre de son mystère dans son Assomption jusque dans le Sacré-Cœur de Jésus et nous commençons à vivre de cette gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection. C’est le début du processus.

Alors, nous devenons présents à ce qui attire en eux les corps de ceux qui ont été, comme saint Joseph, blessés par le péché originel et par le mal du monde.

La 3ème communion sponsale dans la gloire qui assume le corps humain, c’est celle de Marie, l’Immaculée Conception et de saint Joseph, époux de l’Immaculée, le mariage terrestre de Marie et de Joseph étant une prophétie, une icône.

La 4ème communion quasi-sponsale concerne l’Enfant-Jésus, le Verbe, le Fils, et son père, Joseph.

Toute la vie chrétienne ne consiste-t-elle pas en cela ? Vivre corporellement, de manière incarnée, tout le mystère d’union à Dieu ; découvrir comment le Père se révèle à nous à travers le mystère de la Sainte Famille Glorieuse ?

Mais il est important de bien comprendre que les différentes unions au sein de la Sainte Famille ne procèdent pas de la même origine. L’union est hypostatique dans le Christ, elle est actuelle entre l’Esprit-Saint et Marie, et elle est instrumentale entre saint Joseph et le Père. Chaque union ne peut donc s’exprimer que dans des termes différents et pourtant chaque union est une union d’Amour absolu. Le Père, par exemple, peut se servir intégralement de la glorification du corps de saint Joseph pour se livrer à son Fils rempli de Gloire.

Toute la création est appelée à être récapitulée dans tous ces mystères de Communion des Personnes.

La porte d’entrée pour découvrir notre corps spirituel, c’est ce mystère d’union entre le Christ ressuscité et la Vierge glorifiée en son Assomption : le Mystère du Sacré-Cœur.

En vivant du mystère de Marie, dans son Immaculée Conception, brûlée par le Feu de l’Esprit-Saint, et portée par le Verbe de Dieu, nous pénétrons dans le mystère du Sacré-Cœur de Jésus et nous pouvons commencer à vivre de cette communion sponsale entre le Verbe de Dieu et l’Esprit-Saint. On se retrouve vraiment dans le Cœur de Jésus ouvert à la Croix, mais rempli de gloire dans l’éternité. Vivre du Sacré-Cœur c’est très important, c’est vivre de cette fusion d’Amour des Cœurs de Jésus et de Marie remplis de gloire où nous trouvons la Gloire du Verbe incarné et la Gloire de l’Esprit-Saint actuellement royal (Marie Reine), les deux ne formant qu’UN seul Amour royal tout puissant.

En vivant de cette fusion d’amour des Cœurs de Jésus et Marie, nous rejoignons le lieu où le Père féconde la résurrection universelle, la résurrection des corps, la résurrection de la chair et nous actuons notre acte de foi « Je crois en la résurrection de la chair, et en la vie éternelle » et nous pouvons entrer dans la Sainte Famille Glorieuse qui vient du Ciel.

C’est là, dans cette Sainte Famille Glorieuse que notre corps spirituel va pouvoir être engendré clans la véritable enfance qui nous permettra de devenir fils de Dieu, jusque dans la chair.

D’où la charte intuition (que nous avons étudiée plus en détail dans un texte précédent : « Le Monde Nouveau ou le Règne du Sacré-Cœur ».)

 

III.      Charte pour le Monde nouveau

« Nous devons, et c’est le Père Tout-Puissant qui le demande, refaire le monde nouveau ; mais ce monde ne peut se refaire que spirituellement. C’est donc l’homme qui doit resurgir, le fils de l’homme qui doit resurgir. Et chaque personne a, devant elle, son corps spirituel... »

Il faut comprendre que l’union transformante n’est pas quelque chose de purement spirituel au sens où l’on doit se décorporer, c’est purement spirituel au sens où l’on doit passer par l’union transformante. Mais au terme, il faut découvrir que c’est corporellement aussi que notre corps doit se relever spirituellement lui-même dès cette terre, qu’il rayonne déjà de ce qu’il rayonnera éternellement.

Jésus, Marie, Joseph, forment donc une seule Chair glorieuse dans le mystère de la Résurrection.

Cette unité glorieuse est un peu comme une matrice dans laquelle va naître et se développer notre corps spirituel. Nous devons découvrir notre corps s’illuminant là de manière vivifiante dès cette terre afin d’être glorifié éternellement.

Nous pouvons dès à présent choisir de vivre de cette Résurrection, de cette éternité brûlante d’amour qui se rend présente à nous dans les sacrements, si nous vivons des sacrements spirituellement, c’est-à-dire étant intégrés dans ce que saint Joseph vit corporellement de son union avec le Père, dans ce que la Vierge Marie vit corporellement de son union avec l’Esprit-Saint, et dans ce que Jésus vit corporellement de son union avec le Verbe. C’est cette unité là en une seule hypostase dans la Gloire de Dieu qui produit l’advenue de notre corps spirituel.

« Chaque personne a, devant elle, son corps spirituel et elle a le devoir, pendant sa vie sur la terre, de rentrer à nouveau dans cette enveloppe ».

Recevoir le scapulaire, par exemple, c’est demander à rentrer dans cette enveloppe de la Sainte Famille Glorieuse où ils font tous les Trois une seule Chair glorieuse ; car le Nazareth de la terre en ce moment est au ciel. Dans cette « une seule Chair glorieuse », il y a un seul corps, un seul feu qui brûle corporellement l’humanité intégrale d’Amour, et c’est dans ce Feu que jaillit mon corps ressuscité.

« Ce monde ne peut se refaire que spirituellement ».

Cela donne à présupposer que saint Joseph est monté au Ciel avec son corps ; la foi nous dit que Jésus est ressuscité avec son Corps, que Marie, dans son Assomption, est au Ciel avec son corps, mais elle ne nous dit pas encore que Joseph est au Ciel avec son corps. Des saints le disent déjà, comme saint François de Sales, docteur de l’Église.

Il faut rentrer dans cette Sainte Famille Glorieuse, découvrir notre corps spirituel, pénétrer dans cette enveloppe et, c’est de là que, torrentiellement, vont apparaître du centre de notre corps, toutes nos qualités, toutes les purifications, les vivifications, les fortifications et surtout ce contact avec le Père de manière incarnée, par le Sacré-Cœur et par Marie, de manière à naître enfin en tant qu’homme, mais d’une manière nouvelle, d’une manière réelle.

« C’est cette enveloppe, cette réalité de notre corps ressuscité qui est engendrée et qui m’attend ; c’est la matrice de ma vie nouvelle qui va nourrir le petit enfant que je suis dans une nouvelle innocence triomphante : c’est la naissance du fils de Dieu. Et je reçois, par cet acte, la vie éternelle. »

On peut prier ainsi : « Ma très sainte Mère, tous mes désirs, je viens les enclore, les enfermer dans votre Présence rayonnante, au moment où votre Présence rayonnante est en train de se fondre dans la présence rayonnante de saint Joseph »

Nous possédons déjà notre corps de gloire présent dans cette éternité lumineuse brûlante d’Amour qu’est la Résurrection.

C’est très simple, c’est très facile et ça change tout ! C’est ce qui s’est passé quand le Verbe de Dieu a pris Chair : Il est venu s’enfermer, s’engloutir dans la Présence rayonnante de l’Immaculée Conception au moment où cette Présence rayonnante de l’Immaculée venait se fondre dans la présence rayonnante de saint Joseph, présent à Elle dans l’unité sponsale d’une manière totalement spirituelle et, en même temps, totalement incarnée.

 

IV.      Le but que nous poursuivons est de regarder comme le corps peut participer aux différentes

   étapes que la tradition stigmatise dans les demeures de l’Union transformante.

 

Nous nous aiderons en cela par le livre de A. TANQUEREY « Précis de Théologie ascétique et mystique » qui est le trésor du chrétien et les deux livres de Dom Marie Eugène de l’Enfant-Jésus « Je veux voir Dieu » (pour les 4 premières demeures) et « Je suis fille de l’Église » (pour les 3 dernières demeures.)

Saint Jean de la Croix essaie d’expliquer les touches de la Vie divine dans l’âme pour que chacun puisse repérer dans quelle étape il est dans sa course vers la sainteté ; c’est-à-dire s’il est parmi les commençants, s’il est parmi les généreux, s’il est déjà dans l’union de volonté, s’il a connu les fiançailles ou s’il est déjà dans l’union transformante (il ne faut pas dire trop vite que l’on est dans la 7ème demeure !)

Dans la manière « masculine » de saint Jean de la Croix, tout se termine par un mariage.

Or, tout mariage relève des lois de l’unité sponsale.

Selon que je suis un homme, une femme ou un enfant, le mariage se réalisera différemment. Il y a donc une mystique de l’Époux (saint Jean de la Croix), une mystique de l’Épouse (sainte Thérèse d’Avila) et une mystique de l’Enfant (sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus).

Les trois voies mystiques de l’union transformante.

Saint Jean de la Croix va trouver son Épouse dans la gloire qui embrase le Sacré-Cœur de Jésus dans la Résurrection et qui fait l’unité entre le Père et le Fils. Dans le Sacré-Cœur, il contemple le Verbe que brûle le Feu de l’Esprit-Saint. Dans ce feu qui brûle le Sacré-Cœur de Jésus dans la Résurrection il y a une demande en mariage ; le Verbe incarné me demande en mariage. Il veut s’engloutir en moi, dans les profondeurs de ma terre pour y vivre de la Résurrection.

Dans la Très Sainte Trinité, le Père est l’Époux et le Verbe est l’Épouse parce qu’il sort du Sein du Père intérieurement, comme Ève sort d’Adam tout en lui étant donnée intérieurement, toute abandonnée. Le Père et le Fils alimentent un tourbillon d’Amour d’où jaillit l’incendie divin qui fait que Dieu est Dieu et qu’en Lui-même Il est UN. Parce que l’Un et l’Autre s’unissent dans un Amour tel qu’ils disparaissent l’Un et l’Autre et qu’il ne reste plus qu’Un qui est l’Esprit-Saint, cet embrasement d’Amour. C’est ainsi qu’il y a trois Personnes qui disparaissent vraiment dans l’unité. C’est là, dans le Feu de l’Esprit-Saint qui brûle le Cœur sacerdotal du Verbe dans la Résurrection que saint Jean de la Croix vit son mariage mystique, c’est-à-dire dans le Verbe incarné. Nous voyons là combien l’Union hypostatique du corps de Jésus et du Verbe est importante !

Sainte Thérèse d’Avila va davantage trouver son Époux dans le Christ, comme icône du Père. Le Christ est son Père et son Époux. Il l’engendre à la grâce. C’est l’Humanité sainte du Christ, donc la masculinité du Christ, qui va jouer un rôle prépondérant chez elle dans l’union transformante.

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus va porter différemment cette même grâce du mont Carmel ; c’est la voie du petit enfant ; c’est la voie la plus rapide, celle de l’ascenseur.

Ces trois voies sont différentes et elles vont avoir des répercussions gigantesques quant aux signes des étapes dans la course vers l’union transformante. Dom Marie Eugène de l'Enfant-Jésus dit bien qu’il faut prendre les sept demeures de l’union transformante, selon saint Jean de la Croix, sainte Thérèse d’Avila et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, mais qu’il faut en faire la synthèse pour en voir le vrai principe. Telle est la vision carmélitaine de la vie mystique : vie de communion de notre cœur, de notre volonté et de notre liberté intérieure quand nous nous donnons à Dieu. C’est le point de vue spirituel qui est repéré ici.

Mais le but de notre méditation est de comprendre comment le corps va s’intégrer dans cette union transformante c’est-à-dire au Corps mystique de l'Église du Christ pour donner naissance à la Jérusalem Céleste et quel est le rôle de la Sainte Famille Glorieuse.

 

 

CHAPITRE IV

 

COMMENTAIRE DU CANTIQUE SPIRITUEL DE SAINT JEAN DE LA CROIX

 

 

Dans son Cantique spirituel, saint Jean de la Croix n’intervient directement qu’à partir de la 4ème demeure où le point de vue surnaturel transforme réellement l’esprit dans son lien avec l’âme à l’intérieur même de notre corps. Il délaisse les trois premières demeures où le travail de la grâce reste naturel, consistant à enlever les péchés graves dans la 1ère demeure, les péchés habitudinaires dans la 2ème demeure, et les péchés véniels dans la 3ème demeure. À partir de la 4ème demeure, notre nature étant devenue saine, va pouvoir être mêlée à la liqueur de la grâce qui va agir en nous de manière surnaturelle. La grâce est toujours surnaturelle, mais son effet est naturel dans les trois premières demeures, il ne devient surnaturel qu’à partir de la 4ème demeure dans l’oraison de quiétude et de recueillement.

Pour cela, il faut quitter le temple, expirer, puisque nous ne sommes que péché. Quand on ne ressent plus rien, on atteint le point de vue spirituel le plus pur de notre âme, et on se repose dans cette quiétude de la mort spirituelle (car toutes nos impressions, toutes nos émotions sont infectées par le péché) où l’on trouve la tranquillité toute pure d’une humanité substantiellement elle-même, de manière incarnée et actuelle où saint Joseph est présent. Pour cela, il faut faire oraison. Alors commencent la nuit, l’aridité, la foi, l’amour, la grâce, la vie éternelle dans le monde nouveau. C’est l’heure des épousailles de l’Époux et de l’Épouse, du Verbe et de son Père, dans notre corps. Nous sommes là, spirituellement, dans cette mort au monde, cette nuit, cette pauvreté instrumentale ; c’est là que se trouve la Paternité de la Première Personne de la Très Sainte Trinité. Immergé au plus intime de notre âme, le Père est là, et nous sommes en contact avec Lui. Et nous commençons à voir un peu ce que saint Joseph vit intérieurement, depuis le premier moment de sa vie On rentre alors dans l’oraison de quiétude.

Saint Jean de la Croix fait jaillir ce Cantique à partir du moment où il a été en contact avec le Père, parce que Jésus n’est pas venu pour que nous nous attachions à Lui, mais Il est venu pour que nous soyons en contact avec le Père. Il n’est pas venu pour se manifester, mais au contraire, pour que sa manifestation soit broyée et détruite. Jésus est venu nous montrer le Père, nous révéler le Père.

 

1     « Où te caches-Tu, Toi que j’aime.

« Toi qui me laissas dans les gémissements

« Pareil au cerf, Tu as fui ;

« M’ayant navrée, après Toi,

« Je sortis, criant, et Tu étais parti ! »

 

Là, je parle à Celui que j'aime, qui est à la fois mon Père, mon identité dans le Verbe, et à la fois mon amour dans l'Esprit-Saint.

 « En ce 1er couplet, l’âme éprise de l’amour pour le Verbe, Fils de Dieu, son Époux, désirant s’unir à Lui par une vision claire, essentielle, expose ses angoisses d’amour, se plaignant à Lui de son absence. Et ce, d’autant plus qu’étant blessée, parce qu’elle l’aime de manière brûlante, pour elle, elle veut quitter tout, elle veut se quitter elle-même ; et pourtant elle se voit néanmoins privée de la présence de Celui qu’elle aime éperdument ; et, en plus, Lui ne s’occupe pas d’elle, et ne la délivre pas de cette chair mortelle pour lui donner la jouissance de la Gloire de l’éternité. Alors, elle parle : « Où te caches-Tu, Toi que j’aime ? », comme si elle disait au Verbe de Dieu « Mon Époux, montre-moi le lieu où Tu te caches ».

Il est caché dans le sein du Père et en saint Joseph corporellement comme Marie est cachée en saint Joseph ; sinon il n’y aurait pas eu le mystère de l’Incarnation. On commence à comprendre ce que veut dire le mariage entre l’Immaculée Conception et le Juste par excellence (Matthieu 1, 19).

« En quoi elle lui demande la manifestation ouverte de sa substance divine, parce que le lieu où est caché le Fils de Dieu est, d’après saint Jean (1, 18), le sein du Père qui est l’Essence Divine, laquelle est éloignée et cachée aux yeux des mortels et à toute compréhension humaine. Ce qu’Isaïe a exprimé par révélation en disant : « Vraiment, Seigneur, Vous êtes un Dieu caché ». C’est ici qu’il faut remarquer que, si grandes que soient les communications et la Présence de Dieu dans nos prières, si hautes et sublimes soient les connaissances de Dieu qu’une âme puisse pénétrer en cette vie, recevoir par pure grâce, cela n’est pas Dieu du tout et n’approche en rien de Lui, parce que cela manifeste à l’âme qu’Il est tout autre que ce qu’elle en a perçu par ces grâces. Et Il reste, de plus en plus, et demeure en totale vérité, caché à l’âme qui a pénétré dans la connaissance de Dieu par cette touche divine ».

Si on ne quitte pas toutes les connaissances sensibles, on ne peut pas pénétrer dans la 4ème demeure de l’oraison de quiétude.

« Parce que, malgré qu’Il ait donné ces consolations et ces touches de connaissance sensible, Il demeure plus encore véritablement caché à l’âme, et toujours il convient à cette âme, si elle L’aime, de considérer qu’Il n’est pas là et qu’Il est caché au-delà de toutes les grandeurs qu’il lui semble avoir reçues pour elle-même ; et elle doit le tenir caché et c’est pourquoi elle dit «  Où te caches-Tu, Toi que j’aime ?  ».

C’est ce que fait saint Joseph, lui qui cache le mystère du Père, tout le temps, qui cache le mystère de l’Immaculée Conception, qui cache le mystère de l’Incarnation.

« Car, ni la haute communication et présence sensible ne vous fait avancer plus profondément en la Présence de Dieu, mais pas plus cependant l’aridité et absence de toutes ces grâces sensibles dans l’âme ».

Autrement dit, que vous soyez dans un ravissement extatique ou que vous soyez dans une aridité totale, ni l’un ni l’autre ne sont le moindre indice d’une plus grande Présence de Dieu.

« Et l’un. pas plus que l’autre, ne vous rapproche de Dieu. C’est pourquoi Job, en prophétisant par révélation, dit ceci : « Si Dieu vient à moi, je ne Le vois pas, et s’Il se retire de moi, je n’en sais rien ».

C’est ce qu’a dit sainte Jeanne d’Arc : « Si je suis dans la Grâce de Dieu, qu’Il m’y garde, si je n’y suis pas, qu’Il m’y mette ». Je suis totalement abandonné à la Volonté de Dieu. Mais, pourtant, j’ai reçu des grâces incroyables ! J’ai compris que Dieu est avec moi ! Peut-être pas ! Il m’a abandonné ? sûrement pas !

« Voilà ce qu’il faut conclure : si l’âme sent une grande communication ou quelconque sentiment divin, elle ne doit pas pour autant se persuader que cela soit une preuve qu’elle est plus en Dieu qu’avant. » Elle doit penser que ce qu’elle ressent à ce moment-là ou ce qu’elle entend, si haut et si sublime que cela puisse être, elle doit penser que ce n’est pas le Dieu qu’elle aime.

Elle ne doit pas rejeter cette grâce, mais elle doit savoir que ce n’est pas le Dieu qu’elle aime, parce que Dieu est beaucoup plus grand que cela. Elle doit le chercher là où Il est caché.

 « Et si toutes ces communications sensibles et intelligibles venaient à lui manquer, elle ne doit jamais penser que, si elle en est privée, Dieu n’est pas là puisque réellement ni par l’une, communication, ou l’autre, aridité, elle ne peut savoir si elle est en sa grâce ou si elle est en dehors de la grâce. »

On peut très bien recevoir les plus hautes communications sensibles et ne pas être en grâce avec Dieu et on peut très bien être dans une aridité absolue, continuellement et être en grâce avec Dieu.

« Le sage, dans l’Ecclésiastique, au chapitre 9 verset 1, le disait lui-même par révélation : « Nul homme mortel ne peut savoir s’il est en grâce ou s’il est en horreur avec Dieu » ; de sorte que l’intention principale de l’âme dans ce vers lorsqu’elle crie sa souffrance en disant : « Où vous cachez-vous, Vous que j’aime, Vous qui m’avez laissée dans ce deuil comme un cerf éperdument courant qu’on va comme en poursuivant, vous fuyez, m’ayant bien blessée, je sortis, je crie après vous, mais vous, vous fuyez toujours en avant et vous cachant » quand elle dit cela, ce n’est pas seulement pour demander la dévotion affective et sensible où il n’y a aucune certitude ni clarté de la possession de grâce de l’Époux, ce qu’elle désire, c’est la claire Présence de Dieu, la vision de son Essence. Et elle dit par-là qu’elle ne veut être satisfaite que quand elle verra son Essence même, sa Lumière elle-même en sa substance pour qu’elle puisse être satisfaite dans la gloire et que ce ne soit que cette Gloire qui fasse sa satisfaction. C’est ce que l’Épouse a voulu dire dans le Cantique des Cantiques (ch. 1, v. 6) lorsque, désirant l’union de la divinité du Verbe, son Époux, elle la demanda au Père en disant : « Enseignez-moi où Vous paissez et où Vous reposez sur le midi ».

C’est le premier moment de l’oraison de quiétude.

Quand nous allons au-delà de ce que nous éprouvons, de nos aridités, de nos sentiments, de nos impressions, quand nous expirons, que nous sortons du temple, même du point de vue religieux, quand nous rentrons au fond de notre âme, dans ce qu’elle a de plus pur spirituellement, là où il n’y a plus rien que la pauvreté instrumentale de saint Joseph, là où il y a ce cri de notre âme spirituelle : « Où est le Verbe Incarné ? Où est Mon Époux ? Je ne veux que Dieu, son Essence divine ! ». À ce moment-là, nous sommes en contact avec le Père et nous Lui disons :

« Enseignez-moi où est votre Pâture, où est votre repos sur le midi ». C’est extraordinaire parce que, pour l’âme, demander au Père de montrer où Il se nourrit, c’est le prier de lui montrer l’Essence du Verbe divin, parce que le Père ne se glorifie et ne se nourrit et ne se repaît en rien d’autre qu’en l’Essence même de son Verbe, le Fils unique ; et en le suppliant ainsi de lui montrer où Il se couche au midi, Il lui demande la même chose ; car le Père ne se trouve en son repos et sa plénitude et n’est contenu et présent en d’autre lieu que dans la nourriture dont Il se nourrit, son Verbe éternel. Et c’est là qu’Il se repose, lui communiquant toute son Essence au plein midi de la Résurrection et le midi, c’est l’éternité, c’est l’engendrement éternel.

C’est comme une nouvelle naissance du Fils de Dieu qui apparaît en nous dans l’oraison de quiétude.

« Ce repos où le Père se repaît est ce lit fleuri du Verbe divin où Il se repose, dans les délices d’un Amour infini, caché à toute créature mortelle. C’est ce que demande l’âme en oraison, qui cherche à L’épouser quand elle dit : « Où Te caches-Tu, Toi que j’aime ? ».

« C’est pourquoi il faut comprendre, pour savoir où trouver cet Époux, autant qu’il soit possible en cette vie, que le Verbe de Dieu, uni au Père et au Saint-Esprit est substantiellement caché au centre le plus intime de notre âme. »

« Et pourtant notre âme, qui, par union d’amour, cherche à le trouver, doit encore sortir d’elle-même, pour communiquer avec son Dieu, pour la première fois en amoureuse et dans un entretien vrai. »

« Et désormais, elle ne pourra plus faire cas (c’est-à-dire faire attention) à tout ce qui est dans le monde, à tout ce qui apparaît (les apparitions) pas plus que si elles n’existaient pas.

« C’est pourquoi saint Augustin s’écrie, lorsqu’il parle seul dans ses soliloques : « Seigneur, je ne Vous trouvais pas au-dehors parce que dehors, je Vous ai cherché et c’était mal puisque Vous étiez dedans ». Dieu, donc, est caché dans l’âme où le contemplatif qui a choisi l’Amour, commence sa contemplation en disant : « Où Te caches-Tu. Toi que j’aime, Toi qui me laissas dans les gémissements ? »

Là, on laisse l’Esprit-Saint nous enseigner Lui-même, du centre de notre âme : pour cela il faut faire oraison.

 

I.         Comment faire oraison pour rentrer dans l’oraison de quiétude

 

Dans les trois premières demeures, on cherche ces grâces sensibles, ces apparitions, ces visions, ces sentiments, ces ardeurs, ces gémissements, ces pulsations d’amour sensible, ces brûlures, etc... Tout cela est charismatique, ce n’est pas spirituel. C’est un rebondissement, parce que Dieu se donne toujours à celui qui se livre à fond. Mais si notre maturité spirituelle n’est pas très forte, nous allons attribuer ces effets sensibles à la Présence de Dieu. Or, ce ne sont que des manifestations qui s’originent dans notre imperfection. Si on était parfait, il n’y aurait pas ces effets ; donc nous allons confondre notre péché et la Présence de Dieu ! Quand notre corps est dans le péché, il n’est pas dans l’obéissance à l’Esprit-Saint : alors les Grâces que Dieu nous donne manifestent que notre corps est tordu par rapport à ce que nous vivons spirituellement. Si nous recherchons ces grâces charismatiques, cela veut dire que nous nous cherchons du côté de notre péché, et nous tombons dans l’illusion. Cela aboutit à la magie blanche présente dans beaucoup de révélations privées.

On comprend alors qu’il faut se séparer de tout cela, le mépriser pour rentrer dans la foi : c’est Dieu qu’on veut, ce ne sont pas ses Dons. Et Jésus nous dit qu’à la fin des temps, les hommes seront tellement dans le froid, l’amour se sera tellement refroidi, la foi aura tellement disparu, qu’il y aura beaucoup de signes. Or, c’est dans le Temple que se manifestent toutes ces grandes nuées glorieuses kabodiques.

Alors, il faut faire comme Jésus, sortir du temple et rentrer dans le lieu où l’on expire (4ème demeure) en-dessous de toutes nos émotions. Là on est dans le gémissement car, par l’oraison, on s’est installé dans ce lieu où il n’y a plus rien en nous, ni spirituellement, ni corporellement, où il n’y a plus de grâces sensibles. On croirait que Jésus nous a abandonné, alors qu’au contraire, c’est Jésus qui, enfin, va commencer à œuvrer en nous, ce ne sont plus nos impressions qui dominent. On commence alors à entrer dans l’oraison de quiétude.

C’est le « Remez(1) » qui commence, c’est un clin d’œil d’éternité où Jésus va enfin pouvoir pénétrer tous les espaces intimes de notre corps et de notre esprit. Il va y avoir un début d’union, une paix va se faire entre Jésus et nous, une unité, car c’est Jésus qui est au fond de nous source de paix et d’unité. Alors, engloutis en Lui, nous nous livrons à Lui. C’est Lui que nous voulons, et Lui seulement, le Verbe Incarné, et non pas seulement ses Dons. Dans cette 1ère strophe on est dans les gémissements, une soif commence à apparaître ; alors seulement l’amour peut commencer à devenir spirituel. Jusque-là c’était un amour sensible qui correspondait à des besoins, à des phénomènes de compensation, à des projections où la concupiscence, l’orgueil et la vanité jouent un rôle important, alors que le Christ veut se donner Lui-même spirituellement !

À ce moment-là, l’Esprit-Saint pour la première fois commence à agir dans notre oraison et notre corps lui-même va participer, il va s’engloutir dans cette sérénité ; c’est pourquoi nous l’appelons « oraison de quiétude », parce que le monde spatio-temporel, à travers notre corps, s’assoupit. Dans cet état de passivité corporelle notre conscience reste encore très éveillée, spirituellement parlant, mais c’est encore la Présence sensible de Jésus que nous recherchons : d’où cette première strophe du Cantique spirituel.

Vivre de l’oraison, c’est dépasser les états de grâce sensible pour chercher l’état le plus dépouillé possible, l’état de nudité absolue, d’oubli, de purification, de nuit et de pauvreté. On ne regarde pas si on est malheureux, si on est aride, ou si on est brûlé par des vibrations d’énergies.

Dans cette nudité de l’âme, on découvre le visage du Père, l’atmosphère à travers laquelle le Verbe, en s’incarnant, a trouvé son Père en saint Joseph. Alors, nous commençons à naître dans ce mystère de la rencontre du Verbe incarné et du corps de son Père Éternel à travers l’instrumentalité de saint Joseph : « Le Verbe s’est fait Chair et Il a demeuré parmi nous ». À ce moment-là, il y a quelque chose de notre corps originel, quelque chose de notre mémoire ontologique qui est mis à nu et nos cellules commencent à se mettre à la recherche du Verbe de Dieu. Nous pénétrons dans le Mystère de la Sainte Famille où nous découvrons que saint Joseph est notre Père, le père de notre corps, de notre chair, c’est-à-dire, le père de notre corps d’origine. Et avec lui, un jour, dans les fiançailles, nous découvrirons notre corps spirituel. Mais, pour cela, il faut faire oraison !

Dans l’oraison, nous nous engloutissons dans la Présence réelle, concrète, lumineuse, rayonnante et glorieuse de l’Immaculée, Elle-même engloutie dans le Sein du Père d’une manière incarnée en saint Joseph. Alors, tout ce que nous disons, tout ce que nous faisons, tout ce que nous pensons, il faut en prendre conscience, est englouti dans cette Présence rayonnante de la très Sainte Vierge qui l’engloutit dans la présence de saint Joseph. Alors, tout monte et se surcharge d’un rayonnement spirituel, et tout ce que nous disons, tout ce que nous faisons, tout ce que nous pensons, se présente totalement spiritualisé.

Ce débordement de la Présence rayonnante de l’Immaculée Conception, lorsqu’Elle s’engloutit dans la Présence rayonnante du Père, dans sa toute puissance de lumière au sein du corps glorieux de saint Joseph, devient pour nous, source des mots que nous prononcerons, des pensées qui traverseront notre esprit, des actes que nous ferons, des regards qui vont s’opérer en dehors de l’oraison. C’est le reflet de ce qui se produit quand l’Esprit-Saint et le Père vivent une communion sponsale à travers l’unité sponsale de Marie et Joseph, dans la Gloire.

Alors tout devient spirituel. C’est simple. Il n’y a pas d’autre voie.

 

2       « Pâtres qui vous en irez

« Là-bas jusqu’au sommet, par les bergeries,

« Si vous voyez d’aventure,

« Le Mieux-Aimé, dîtes-Lui

« Que dolente je suis, et peineuse et mourante. »

 

« L’âme s’adresse aux pâtres, au sommet et aux bergeries. Comme elle ne trouve plus Jésus en elle, dans ces soubresauts, ces jubilations, ces lévitations, ces illuminations, ces transfigurations, ces palpitations, alors elle s’adresse à tout ce qui, dans la création, est à la recherche de Dieu ». C’est que la création aspire à la révélation des enfants de Dieu et les enfants de Dieu sont ceux qui arrivent ici : ici, l’adoration commence à devenir une adoration en esprit et en vérité ; ici, elle va se chercher des médiations. Et la grande médiation est ce lien entre le Créateur et sa créature et cette omniprésence de Dieu silencieuse, pas sensible.

Cette omniprésence de Dieu va accentuer la quiétude et faire rentrer l’âme en oraison dans la 5ème demeure.

C’est pourquoi il est si important de récapituler toute la création et la présence créatrice de Dieu dans tout le monde, dans tous les temps et dans tous les lieux, dans cette oraison de quiétude et d’unir notre quiétude à cette quiétude du Créateur et de la créature en tant que créature qui repose dans le Père Créateur, dans l’attente de la révélation des Fils de Dieu.

Elle appelle ici « pâtres  », les affections, les désirs parce qu’ils apaisent l’âme de biens spirituels et que par leur moyen Dieu se communique à l’âme, car sans eux Il ne se communique pas à l’âme. Et elle dit : « Pâtres, vous vous en irez ».

Si les affections et les palpitations sont parties, c’est que je l’ai demandé. Et si je ne le demande pas, je ne passerai pas aux 4ème et 5ème demeures ni à l’union transformante : « Allez-vous en ! » et « Où irez-vous ? » « Au sommet, sur la montagne et dans les bergeries ».

« Elle dit : « vous vous en irez » et elle veut dire par là que ces affections et ces désirs partiront pour vivre du pur amour parce que tous ne vont pas jusqu’au sommet mais seulement ceux qui naissent à un amour véritable et fidèle. Alors, l’amour va trouver refuge dans les bergeries. Elle appelle « bergeries » les chœurs angéliques. »

 

II.        Intervention des Anges

On va habiter les chœurs angéliques. L’amour commence à devenir purement spirituel. Il est porté directement et de l’intérieur par les neuf hiérarchies angéliques, à travers lesquelles tout ce qui existe est imbibé et porté, directement et de l’intérieur, par la Présence de Dieu. Pour la 1ère fois, le monde angélique apparaît : les Anges, les Archanges, les Principautés, les Dominations, les Vertus, les Puissances, les Trônes, les Anges de Lumière et les Anges de feu.

Nous n’avons pas le même mode de connaissance que les Anges. C’est la foi qui nous met en présence de Dieu et qui nous fait progresser à travers les sept demeures de l’union transformante tandis que les Anges sont illuminés directement et entièrement, de l’intérieur, par Dieu. C’est la différence entre la science infuse et la science acquise. Ainsi, quand nous abandonnons notre mode de connaissance sensible, nous nous rapprochons des Anges. Nous commençons tout autant à nous rapprocher de ce qu’il y a de plus corporel, puisque notre corps est enfin disponible à la spiritualisation parce que nous sommes plus proches de cet état où c’est Dieu, enfin, qui va directement manifester sa Lumière.

Nous pouvons commencer à vivre de la grâce illuminative

« Elle appelle « bergeries » les chœurs angéliques par lesquels nos gémissements et nos oraisons vont de chœur en chœur, de hiérarchie en hiérarchie, jusqu’à Dieu, et c’est pourquoi elle dit ici « allez là-bas, jusqu’au sommet », parce que comme le sommet est élevé, ainsi Dieu est la souveraine hauteur et parce qu’en Dieu, comme sur un sommet, on découvre et on voit toute chose directement. Et c’est de cette illumination qui vient de Dieu Lui-même que nos oraisons sont portées par le ministère angélique ».

Notre humanité est enfin entièrement livrée, par la foi, dans cette tranquillité et cette paix, de l’oraison de quiétude, à travers toute la création, à tout le monde angélique qui est au Ciel, jusque dans la Très Sainte Trinité (il ne faut pas se livrer au monde angélique qui n’est pas au ciel, parce qu’il n’y a pas d’intermédiaire chez les Anges : puissance intermédiaire veut dire démon).

« Car ce sont eux qui offrent nos oraisons et nos désirs, comme le dit l’Ange Raphaël, lorsqu’il enseigne Tobie.. » (ch. 12, v.12)

Quand je récapitule toute la création, je rentre dans le 12 du 12 qui est l’apostolat angélique.

L’apostolat angélique est représenté par le chiffre 12. Il est entre le 1 et le 2, entre le Père et le Verbe : le Père parle, et le message angélique c’est la Parole du Père dans son Verbe, c’est le Verbe ; c’est ce qui fait la béatitude angélique des Anges qui sont des êtres de lumière, car ils sont dans la vision béatifique. On rentre ainsi avec eux dans la Très Sainte Trinité.

«... Quand tu priais avec gémissements et larmes et que tu ensevelissais ce qui était mort... »

Tous ces charismes, toutes ces grâces, c’est mortel. Arrivé à un certain degré de vie spirituelle, c’est une imperfection, car nous voulons faire notre œuvre pour Dieu alors que le Seigneur nous dit « C’est Moi qui vais faire mon œuvre en toi ». Et si nous continuons à faire notre œuvre pour Dieu, c’est pour notre ego ; et cela devient une faute parce que nous sommes appelés à l’union transformante. Le petit signe que l’on est passé par la 4ème demeure, c’est qu’à chaque échec vis-à-vis d’une œuvre extérieure qu’on avait faite pour Dieu, on doit pouvoir dire « quel bonheur ! »

«... Quand tu priais avec gémissements et larmes et que tu ensevelissais ce qui était mort..., alors c’est là que ton oraison pouvait être présentée à Dieu »

 

L’oraison commence à devenir surnaturelle dans la 4ème demeure et le passage à la 5ème demeure. C’est là que la grâce surnaturelle sanctifiante commence à travailler elle-même : jusque là, elle travaillait de manière enveloppante ; maintenant, la grâce commence à travailler de l’intérieur.

« On peut aussi entendre par « ces pâtres » dont parle ici l’âme, les Anges eux-mêmes parce qu’ils ne portent pas seulement nos requêtes à Dieu, mais ils rapportent aussi la Présence de Dieu en nos âmes pour que notre âme trouve enfin son repos, sa nourriture. Comme de bons pâtres, de douces inspirations et communications purement spirituelles de Dieu, ils nous protègent des loups qui sont les démons et ils nous défendent d’eux comme de bons bergers ».

Notre corps assoupi sera peu à peu irradié mais il n’est pas ici de soi apte à recevoir sa vie d’en haut, son corps spirituel (disons son corps de résurrection qui l’attend pour ainsi dire dans la fécondité trinitaire et glorieuse de la Jérusalem éternelle) ; il s’accoutume seulement à cet état de passivité instrumentale dans lequel Dieu place le corps des justes.

 

3     « En quête de mes amours,

« Je m’en irai par ces monts et rivages, (les mystères et les torrents des sacrements)

« Point ne cueillerai de fleurs, (je n’en tirerai aucun fruit)

« Les fauves point ne craindrai,

« Et je passerai les forts et les frontières ». (je dépasserai toutes les limites de la création)

 

« Nous commençons à sortir du créé et à rentrer en Dieu qui dépasse tout. Notre âme comprend qu’il ne suffit pas de prier, de désirer, de s’aider de médiateurs pour parler à Celui qu’elle aime, comme elle l’a fait jusqu’à maintenant, il faut qu’elle puisse le chercher par ses actes. »

Elle va enfin faire des actes de foi, d’espérance et de charité, surnaturellement parlant.

« Par ces « monts », elle entend les vertus, tant à cause de la profondeur que pour la difficulté du travail pour y parvenir, elle va enfin exercer des actes de vie contemplative ».

Faire des actes de vie contemplative, c’est rentrer dans le mystère de Dieu, dans le mystère du Verbe, dans le mystère de l’Immaculée Conception et ainsi vivre du mystère de la rencontre de l’Esprit-Saint et du Verbe de Dieu, c’est-à-dire du mystère de l’Immaculée Conception. C’est autre chose !

« Elle nomme « rivages », les mortifications et les humiliations, le mépris de soi qui s’exerce dans la vie active. »

On commence à rentrer dans les montagnes, c’est-à-dire dans les profondeurs de la vie contemplative, et cela va transparaître dans nos actes extérieurs.

« Je préfère l’humiliation, la mortification, le mépris de moi, et je m’y exerce dans mes actes extérieurs car pour acquérir les vertus, ces deux-là. « les monts et les rivages ». sont absolument nécessaires.

« Ce passage de la 4ème à la 5ème  demeure implique également l’exercice continuel de l’obéissance héroïque ».

Le secret de l’obéissance c’est la disponibilité et l’humilité ; nous préférons les petites choses, nous obéissons à celui qui nous guide, nous accueillons l’autre dans ses difficultés, nous pardonnons à celui qui nous a blessé...

Je connais une petite paysanne qui dit :

« Il est bon de se rendre compte que nous ne sommes pas toujours charitable. Mais si nous savions les conséquences que cela entraîne dans ce monde où nous sommes et qui est en train de naître, nous essaierions de ne plus recommencer. Si chacun veut emprunter le chemin qui lui plaît, ou veut être aidé en ceci, pas en cela, ou donner de son temps pour ceci et pas pour cela, ou aimer celui-ci, pas celui-là, tout cela, si nous sommes choisis par Dieu, ne doit plus nous habiter. Et si cela nous arrive encore d’entendre une voix de ce genre parler au fond de notre cœur, sortons-la au-dehors et donnons-la à notre Mère qui nous aidera à la détruire, de manière à rester toujours disponible. »

Si on est disponible, on obéit et il n’y a plus aucun murmure, ni aucune revendication. Il faut savoir rester toujours disponible car on a besoin de nous à l’instant même. Si nos plans sont bousculés, c’est très bon signe, car bien souvent c’est grâce à cela que Satan rate le mauvais coup qu’il s’apprêtait à nous faire.

Voilà comment nous arriverons à nous sanctifier. Ne rejetons jamais le pécheur, ne rejetons jamais celui qui nous met à l’épreuve, mais prions pour que soit détruite notre réaction. Et prions pour que soit détruit le péché dans le monde entier. Comme nous sommes au temps où les Anges sont envoyés sur la terre, nous serons aidés grandement par eux, et nous pourrons offrir au Ciel l’enfance qui est en nous et qui désire être effacée de tout défaut et de tout péché, par la patience et l’obéissance.

Commentaire de saint Jean de la Croix : « Point ne cueillerai de fleurs »

« Dans cette oraison, dans cette union à Dieu, union pacifique, union de sérénité, elle dit qu’elle ne cueillera pas les fleurs qu’elle rencontrera sur le chemin des monts, des pâturages et des bergeries, parce que, par ces fleurs, elle entend tous les goûts, les contentements, les délices qui peuvent s’offrir à elle dans cette vie spirituelle ou soi-disant spirituelle ; car ces goûts, contentements et délices lui barrent la route et, si elle les cueille, elle s’arrête. Et si elle voulait les admettre et les accueillir, qu’elle sache qu’ils sont de trois sortes : ils sont temporels, sensuels, mais aussi et surtout spirituels. Et parce que les uns et les autres occupent le cœur et lui servent d’empêchement pour être nue spirituellement (c’est-à-dire pour être contemplative), elle dit que pour les chercher, désormais, elle ne cueillera plus aucune de ces fleurs.

« C’est comme si elle disait : « je ne mettrai mon affection, mon amour, mon attachement, mon choix, ni dans les richesses, ni dans les biens que le monde présente, je ne le ferai plus : et je n’admettrai pas non plus les béatitudes, les délices de ma chair et je ne m’arrêterai pas dans la saveur et les consolations de mon esprit personnel parce que sinon, je serai empêchée de chercher mon Amour par les montagnes et les rivières, par les actes de ma vie, par les vertus, la prudence et l’obéissance et par les travaux, les humiliations, l’humilité et le mépris (être caché) ».

« Et elle dit ceci pour faire ce que David le Prophète conseille sur cette voie de la vie royale en Dieu dans le Psaume 61 « Si les richesses spirituelles débordent, si elles affluent comme des torrents, surtout n’y mets pas ton cœur, méprise-le, ce n’est pas Dieu ». (Si vous abondez en richesses spirituelles, n’y mettez pas votre cœur). « Ce qui pour l’âme, s’entend aussi bien des goûts sensuels que des consolations spirituelles. Il faut donc ici remarquer que, non seulement les biens de ce temps servent d’empêchement, mais s’opposent à la route qui conduit en Dieu. Ces consolations et ces délices spirituels, si on s’arrête avec propriété ou si on les cherche ou si on les désire seulement, empêchent de passer par le Chemin du Christ Jésus, car son Chemin, c’est le chemin de la Croix et de la Résurrection :

 

« Les fauves alors point ne craindrai ».

« et je passerai les forts et les frontières. »

« Par les « fauves », elle entend le monde, par les « forts », le démon et par les « frontières », la chair. »

 

Tous les ennemis de l’âme qui nous font la guerre, les forts et les frontières, et qui représentent l’orgueil, le monde, le démon et la chair, n’ont plus de prise sur nous et nous devenons libres spirituellement. La clé de cette liberté, c’est l’obéissance aux épreuves, l’obéissance aux événements, l’obéissance à l’autre qui est proche de nous. Alors nous allons pouvoir rentrer dans l’obéissance au Saint-Esprit qui caractérise la 5ème demeure et rentrer dans l’union de volonté où notre cœur pourra s’unir au Cœur du Christ, dans une même volonté d’amour et d’obéissance au Père.

On a un petit critère extérieur : si l’on est susceptible, il faut tout de suite se reprendre grâce à l’oraison de quiétude où l’on décide de se convertir.

 

4     « Ô forêts, sombres bosquets,

« qui fûtes plantés par la main de l’Ami !

« Pâturage verdoyant,

« Ô pré de fleurs émaillé,

« Dites-moi s’Il passa au milieu de vous ? »

 

 « Les forêts » ce sont les croix, ce sont tous les éléments, ce sont les signes et ce sont les sacrements ; « les pâturages », c’est la grâce et « le pré de fleurs émaillé », c’est la grâce où l’on trouve les sept Dons du Saint-Esprit. On commence à chercher la grâce sanctifiante.

Saint Jean de la Croix dit que « les forêts » représentent la Présence de Dieu dans tous les éléments, dans toute l’humanité. Notre oraison s’ouvre à l’omniprésence de Dieu dans la création et dans les grâces des croix de la vie qui assombrissent les pas de l’homme sur la terre (forêts, sombres bosquets).

On commence à aimer aller dans la nature. Pacifiés dans notre intériorité, nous cherchons intérieurement à faire oraison en union avec toute la nature en essayant de découvrir, à l’intérieur de l’omniprésence de Dieu, ses attributs divins. Le premier de ces attributs, c’est la simplicité ; car Dieu est simple, Jésus est simple. Nous commençons à nous engloutir dans cette simplicité de Dieu, son unité, sa sérénité, sa paix, sa stabilité, son omniprésence, sa perfection, sa manière d’exister et sa bonté ; et nous commençons à rentrer dans l’odeur de l’Adorateur, à travers ses attributs divins qui en découlent, sans nous arrêter aux difficultés du temps présent. Et nous interrogeons sur notre passage les pâturages verdoyants, les près de fleurs émaillés : « Est-ce que vous n’avez pas vu Jésus, est-ce que vous n’avez pas vu le Verbe, dites-moi s’Il passa au milieu de vous, Celui après Lequel mon âme soupire ? ! »

Les attributs divins ce sont les cieux dont le premier attribut est la simplicité.

« Notre Père qui es aux Cieux » Tout est paix, tout est unifié dans l’intériorité divine d’où cette surabondance d’Amour qui rayonne sur tout le monde angélique et sur la création. Être au Ciel, c’est trouver en nous te source de sérénité en faisant des actes d’adoration, des actes de foi théologale, d’espérance théologale, de charité théologale. « Que Ton Nom soit sanctifié », cela veut dire que le Nom de Jésus puisse rayonner.

Le « Notre Père » ne commence à devenir surnaturel, théologal qu’à partir du moment où l’on est dans « l’habitus » de l’obéissance héroïque.

L’Église attribue aussi ce nom de verdure aux choses des cieux, lorsque, priant Dieu, elle dit : « qu’Il vous admette parmi les verdures » ; et l’âme dit aussi que ce pré est émaillé de fleurs. Ces fleurs s’entendent du monde angélique et de tous les saints, car eux sont dans le lieu paré et embelli comme serait un vase d’or excellent, d’un riche et agréable émail ».

Les anges et les saints sont dans l’intimité divine et dans les propriétés des attributs divins.

« Dites-moi s’Il passa au milieu de vous ». « Cette demande c’est la considération qui a été dite ci-dessus et c’est comme si l’âme, dans l’oraison et même dans l’union, c’est-à-dire en dehors de l’oraison, disait : « Dites-moi quelles perfections vous ont été données par le Créateur ? »

Cela fait partie de notre pouvoir de baptisé de rentrer dans l’oraison de quiétude et de faire quand nous le volons, un acte de foi théologale, d’espérance théologale, de charité théologale, d’amour de Jésus surnaturel. Nous pouvons trouver au fond de nous ce caractère et cette puissance du Baptême tout de suite et nous y engloutir. Dans l’oraison, en doit trouver immédiatement la 4ème demeure. Il faut faire une petite gestion des émotions, un acte d’adoration et ça y est ! Alors, quand nous sortons de l’oraison, nous sommes dans l’union avec Dieu. L’union à Dieu, c’est dans la vie active, et l’oraison c’est dans la vie contemplative ; mais les deux sont liées.

La nuit doit être une union à Dieu, il faut pour cela s’endormir en priant. On doit apprendre aux enfants à faire la prière du matin et du soir.

 

5     « En répandant mille grâces,

« Il a passé par ces bois en grande hâte ;

« Posant sur eux son regard,

« D’un reflet de son visage,

« Il les laissa tout revêtus de beauté. »

 

Peu à peu la croix quotidienne s’illumine de la Présence de Dieu. Le mystère de la grâce de l’Immaculée Conception (mille grâces) commence à apparaître avec le chiffre 1000 (Marie).

Les 1000 ans de l’Apocalypse, c’est 10 au cube, c’est la créature parfaite, c’est l’anéantissement du Père, l’anéantissement du Verbe et l’anéantissement de l’Esprit-Saint dans la Créature parfaite. Ce sont aussi les 10 Commandements d’Amour de Dieu (3) et du prochain (7), à la puissance 3 de la Très Sainte Trinité.

Les 1000 ans de l’Apocalypse cela veut dire que l’on rentre dans le Temps de l’Immaculée Conception. Le millénarisme est condamné par l’Église !

Dès que nous rentrons dans la grâce sanctifiante, à travers nos croix vaincues par l’amour de Dieu, on commence à vivre du mystère de l’Immaculée Conception ; parce que l’Immaculée est la Présence même de la Plénitude des grâces. On en prend conscience et on découvre que, dans le mystère du divin Cœur de Marie, dans le mystère de sa Compassion jusqu’à son Assomption, EST cet embrasement de gloire du Cœur de Jésus dans la Résurrection ; alors l’union avec Jésus va pouvoir se réaliser. À partir du moment où l’on est avec l’Immaculée, on ne peut plus regarder les choses de la même manière, même la Révélation, même les écrits des saints, et même la théologie comme dit le Père Kolbe.

 

6     « Las, qui pourra me guérir ?

« Achève de Te livrer sans feinte aucune,

« Ne veuille plus désormais

« M’envoyer de messagers

« Qui ne savent me dire ce que je veux. »

 

À ce moment-là, on rentre dans la gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection et qui attire si fort l’Immaculée Conception dans son Assomption. C’est Jésus Seul que je veux et c’est l’Immaculée qui le dit en moi. L’âme s’adressant à Dieu lui demande de révéler Lui-même sa Présence.

 

7     « Tous ceux qui sont de Ta suite

« Me vont rapportant mille grâces de Toi ;

« Tous davantage me navrent,

« Et mourante je demeure

« D’un je ne sais quoi par eux balbutié. »

 

Nous commençons à découvrir le sens profond de la grâce du Christ, de sa miséricorde, dans les œuvres de son Incarnation, dans les vérités de la foi, dans les mystères. Nous ne nous réjouissons plus d’une grâce particulière reçue, mais du rayonnement, du resplendissement, du scintillement même de la grâce qui sortent des mystères : du mystère de l’Incarnation, du mystère même de la grâce au cœur de la Très Sainte Trinité. Les mystères commencent à devenir quelque chose de très profond.

On rentre dans la voie illuminative, dans l’union de volonté et dans l’oraison d’abandon.

 

III.      L’union de volonté    d’après sainte Thérèse d’Avila

« Je me prends à éclater de rire parfois en voyant certaines âmes ; quand elles sont en oraison, elles se croient prêtes à être humiliées et méprisées publiquement pour l’amour de Dieu : et ensuite, elles cacheront, si elles le peuvent, une légère faute qu’elles ont commise. Mais si on les accuse faussement, les voilà hors d’elles-mêmes et en colère »

« Il y a aussi des personnes tellement appliquées à examiner leur oraison et tellement encapuchonnées lorsqu’elles s’y livrent. qu’elles semblent ne pas oser bouger pour ne pas en détourner la pensée, dans la crainte de perdre tant soit peu les goûts et la consolation qu’elles y trouvent ; et quand je les vois s’imaginer que toute la perfection consiste en cela, je me dis qu’elles comprennent bien peu ce que doit être le chemin qui mène à l’union. Non, mes sœurs, non : ce n’est pas là le chemin. Ce sont des œuvres que le Seigneur demande de nous, par lesquelles Il travaille en nous. »

« Si par exemple, vous voyez une malade à qui vous puissiez procurer du soulagement, n’ayez aucune peine de laisse là vos dévotions pour l’assister et lui montrer de la compassion... Faites-le, non pas tant par amour pour elle que par amour pour Dieu, qui le veut, comme vous le savez. Telle est la véritable union à Sa Volonté ».

* Nous découvrons alors notre vocation à la sainteté, qui est l’universalité à être transformés dans le Verbe de Dieu.

Nous sommes vraiment tout petits quand nous nous trouvons devant cet énorme travail de notre vocation à la sainteté, c’est-à-dire à l’universalité à être transformés dans le Verbe de Dieu ; car c’est cela qui se réalise et qui se réalisera de manière visible dans tout notre corps, notre âme et notre sensibilité, mais aussi dans notre esprit, notre intelligence et notre manière d’assimiler les choses qui sera alors totalement ajustée à ce que vit le Verbe de Dieu incarné dans notre chair. C’est cela devenir fils de Dieu. Par le Baptême, on l’est en germe ; mais il va falloir passer de ce germe reçu au baptême à sa réalisation. C’est ce que l’on appelle l’union transformante.

C’est un travail qui s’opère par l’opération de l’Esprit-Saint à l’intérieur de la Plénitude de Grâces, Marie, dans son Immaculée Conception. Ce n’est pas nous qui faisons ce travail. Le fruit de cette œuvre est notre sanctification, notre transformation, qui fera que nous ne rayonnerons plus de cette espèce de lumière vivante qui fait notre rayonnement personnel et que l’on appelle l’âme, mais notre rayonnement sera le fruit d’une nouvelle unité qui est l’unité avec le Verbe de Dieu, avec le Fils.

À l’intérieur de notre âme, il y a non seulement la grâce, mais, à l’intérieur de la grâce, il y a le Verbe incarné, le Corps mystique du Christ qui fait que notre corps et notre âme subsistent dans la vie divine. C’est cela la subsistance mystique des enfants de Dieu.

 

IV.      Les trois subsistances

La Vie divine en Dieu, c’est la gloire

La gloire, en Dieu, c’est l’équivalent de l’âme en nous. Pour Dieu, il n’y a pas d’âme car, dans la notion d’âme, il y a quelque chose de limité puisque l’âme est une forme particulière, elle est la forme substantielle du corps ; et en Dieu, il n’y a pas de corps.

En Dieu, il y a la « vie », la vie étant une source intérieure en Dieu que l’on appelle la Gloire. La Gloire est la source de toute cette lumière vivante et brûlante qui fait que Dieu est illuminé d’une manière vivante, intime et victorieuse de tout. Et quand nous recevons la grâce, nous recevons une partie de cette Lumière vivante qui est à l'intérieur des Personnes divines, et c’est cette participation à la vie divine qui nous permet de subsister dans le Corps mystique du Christ.

La subsistance est une propriété de la grâce en Dieu

De même qu’il y a trois Personnes en Dieu, on atteindra en Lui trois types de subsistances distinctes que la grâce opère, bien que la subsistance en Dieu soit par elle-même unique.

Chacune des subsistances opère un peu à la manière des vases communicants, grâce à la foi.

La première subsistance qu’opère la grâce, c’est dans l’éternité.

Dans l’éternité, il y a bien trois Personnes qui sont vraiment distinctes et qui ne constituent qu’un seul Être. Il y a en même temps trois Personnes donc trois subsistances, puisqu’une personne est une subsistance, dans un seul être donc une seule substance. C’est du côté de la subsistance que réside le mystère de la Très Sainte Trinité. Car le fait qu’il y ait un Seul Dieu en trois Personnes n’est pas un mystère incompréhensible grâce à l’explication de l’unité sponsale. L’Amour en Dieu est tellement absolu, la communication des Personnes est tellement absolue, le Don est tellement substantiel qu’il n’y a qu’un seul Amour. Comme la Vie, l’Amour et l’Être en Dieu sont exactement la même chose, cela ne me paraît pas un mystère difficile à comprendre.

La grâce jaillit au cœur de la relation entre la substance du Dieu Unique et la subsistance de chacune des trois Personnes dans l’égalité. La Grâce est source de subsistance. La Gloire, c’est-à-dire la victoire lumineuse de l’Amour incréé de Dieu, est source de subsistance. Elle fait que les Personnes divines subsistent dans l’Être de Dieu, lequel subsiste dans l’unité.

Dans une personne humaine, il y a bien une unité entre le corps, l’âme et l’esprit qui s’enracinent dans l’être : cela s’appelle subsister. C’est une des propriétés de l’être de faire subsister le corps, l’âme et l’esprit dans l’unité, mais c’est une subsistance naturelle, métaphysique. Tandis que dans la Très Sainte Trinité c’est la Vie glorieuse de Dieu qui fait subsister les trois Personnes dans l’unique divinité : II n’y a qu’un seul Dieu qui « EST ».

La deuxième subsistance qu’opère la grâce, c’est la subsistance de l’humanité du Christ dans le Verbe de Dieu.

Le corps, l’âme spirituelle et l’esprit humain du Christ, dans leur unité vivante, s’unissent pour subsister, non pas dans un être humain puisqu’il n’y a pas de subsistance ou de personne humaine dans le Christ, mais dans le Verbe de Dieu. C’est ce que l’on souligne quand on dit que la Grâce capitale de Jésus découle de la grâce d’Union hypostatique dans le Christ.

Le Verbe de Dieu Lui-même subsiste dans l’unité ; et l’unité de l’Être subsiste en Dieu. La subsistance est rendue indivisible par l’action de la grâce. C’est cela qui est extraordinaire !

On ne peut pas séparer la subsistance de chacune des trois Personnes divines de la subsistance de l’Être Unique et on ne peut pas séparer non plus la subsistance du corps et de l’âme spirituelle dans le Verbe de Dieu de la subsistance des Personnes dans l’Être divin, unique, lequel subsiste aussi : c’est la même subsistance. Et c’est la grâce qui fait cela !

La troisième subsistance qu’opère la grâce, c’est la subsistance du Corps mystique du Christ dans le Verbe de Dieu.

Par la grâce sanctifiante du Christ qui nous est communiquée, nous subsistons dans le Corps mystique du Verbe de Dieu, du Verbe incarné. C’est notre personne, dans l’unité de son corps, de son âme et de son esprit, qui s’enracine mystiquement, c’est-à-dire réellement et vitalement dans la Personne du Verbe de Dieu. De sorte que le Verbe de Dieu nous fait subsister nous-mêmes plus que notre propre subsistance individuelle ne nous fait subsister nous-mêmes dans le fait que nous soyons à nous-mêmes ce que nous sommes. Nous sommes finalement plus fils de Dieu par la subsistance mystique que nous ne sommes nous-mêmes ce que nous sommes ; dès lors que l’on va vivre de la grâce sanctifiante et de l’union transformante, on sera plus le fils éternel du Père. Notre individualité n’en sera pas supprimée pour autant, puisque c’est la même subsistance qui nous fait subsister naturellement dans notre personne humaine et surnaturellement dans la personne divine.

C’est ce qu’opère la grâce sanctifiante qui a pour propriété cette subsistance mystique. Quand je reçois la grâce sanctifiante, je reçois cette subsistance surnaturelle.

* La grâce sanctifiante s’appelle aussi « grâce habituelle » :

« La grâce habituelle est un habitus entitatif qui s’enracine dans notre âme » (définition du Catéchisme)

Un habitus est quelque chose que l’on acquiert, cela ne fait pas partie de l’être mais de l’avoir. Ce n’est pas quelque chose de subsistant, c’est accidentel.

La grâce est un Don que Dieu me donne en plus (gratis data veut dire en latin que la grâce habituelle est gratuite). L’habitus est comme un accident parce qu’il vient se rajouter en nous tout en s’enracinant quand même dans le point de vue vital, comme une greffe. Par exemple, à force d’être humilié par la vie, on acquiert une vertu d’humilité qui est une qualité mais qui ne fait pas partie de notre être, qui n’est pas quelque chose de subsistant. C’est en même temps un accident et quelque chose d’entitatif (ens-entis : l’être). La grâce est à la fois plus que notre être, c’est surnaturel et c’est aussi moins que notre être, c’est un accident. Pourquoi ? À cause de la liberté. Cela ne transforme pas substantiellement notre identité (habitus entitatif), donc notre liberté est respectée et, en même temps, cela nous apporte plus que notre identité. La grâce nous fait subsister dans le Corps mystique du Christ, et la grâce d’union fait subsister le Corps mystique du Christ, c’est-à-dire l’Église, dans le Verbe de Dieu. II faut être lucide par rapport à cela.

Ce qui nous montre bien que la grâce chrétienne n’est pas pour nous seuls. La Vierge Marie, la Plénitude de Grâce, a tout de suite été habitée par la Grâce qui va s’emparer de tous les corps de tous les êtres humains de tous les temps et de tous les lieux. Marie vit cela physiquement et nous subsistons dans le Verbe de Dieu dès le premier instant de sa « Transverbération ». C’est pourquoi on ne peut pas dire qu’on est enfant de Dieu s’il y a une quelconque séparation avec qui que ce soit. Et si nous avons une difficulté à pardonner, automatiquement, c’est un péché mortel qui nous coupe de la grâce sanctifiante puisque nous ne vivons plus de la charité fraternelle (il n’y a pas de pire ennemi que celui qui est proche de nous).

Subsister dans le Corps mystique du Christ, c’est vivre de la subsistance du Corps ressuscité du Christ dans le Verbe de Dieu. Nous vivons de cette subsistance, mystiquement, tandis que le Verbe de Dieu la vit métaphysiquement. Du coup, nous vivons aussi de la subsistance de l’Unité des Trois Personnes divines dans l’Unique Verbe de Dieu.

Nous sommes vraiment divinisés sous trois grands rapports.

N’est-ce pas cela le passage de la 4ème demeure où la grâce surnaturelle commence à nous prendre et qui nous permet de vivre de la 5ème demeure où notre corps est pris physiquement dans la subsistance mystique du Corps tout entier du Christ, pour vivre ensuite les fiançailles et le mariage ?

Voilà dans quoi notre corps va être imbibé, progressivement ou d’un seul coup avec la Vierge Marie. Si l’on vit dans l’unité absolue avec l’Immaculée Conception, ces trois subsistances sont là automatiquement, mais Elle dosera selon les besoins de l’Église, selon la Volonté de Dieu et selon les caprices d’Amour du Saint-Esprit.

Dès que nous vivons de cette grâce sanctifiante, nous pouvons alors mieux percevoir ce que l’Esprit-Saint exprime dans ce passage du Cantique spirituel de saint Jean de la Croix :

 

8     « Mais comment peux-tu survivre

« Ô ma vie, en ne vivant pas où tu vis,

« Quand déjà il te faudrait

« Mourir sous le coup des flèches

« De ce quen ton cœur tu conçois de lAimé ? »

 

Comment peux-tu survivre (habitus entitatif) ô mon âme, en n’étant pas enracinée dans l’endroit où ton âme subsiste, dans l’endroit où tu vis ? Tu vis dans le Corps mystique du Christ, c’est-à-dire que tu subsistes dans le Verbe de Dieu. Comment peux-tu survivre sur la terre alors que tu subsistes vitalement dans l’incréé ?

« ... Quand déjà il te faudrait mourir sous le coup des flèches de ce qu’en ton cœur Celui que tu aimes est conçu ».

La conception du Verbe de Dieu, à partir du Père, est conçue en notre propre humanité à partir des blessures qui introduisent précisément dans ce que l’on appelle ordinairement la 5ème demeure.

 

V.        La 5ème demeure

 

Saint Jean de la Croix parle très peu de la 5ème demeure où tout va bien. Il est docteur de l’Église et il s’intéresse plus aux problèmes de l’âme dans son union transformante quand ça ne va pas.

Quand nous sommes parvenus à cette union toute simple avec Dieu, nous ne pouvons plus concevoir notre vie sans cette union intime de notre âme avec Dieu qui nous unifie à l’intérieur de nous-mêmes. En effet, quelque chose s’est rassemblé en nous sous l’influence de la grâce ; c’en est fini de nos caprices, de nos mouvements d’humeur. Toute la Présence de Dieu est recueillie dans notre corps, comme on rassemble des grappes de raisin pour en presser le vin. Toutes nos puissances sont rassemblées dans la cuve profonde et attendent tranquillement la transformation, de même qu’il faut rassembler patiemment les grappes avant de les presser pour en sortir le jus. Dans cette oraison de quiétude, nous avons quitté le temple de notre intelligence limitée à son corps « psychique », nous sommes parvenus à la source de notre âme. Nous sommes comme transformés en petits tabernacles dans lesquels il y a la Présence aimante, silencieuse, cachée mais réelle de Jésus, de Celui que l’on aime, de Jésus-Hostie-du-Père. Comme c’est tranquille, une Hostie ! Et, à un moment donné, l’Esprit-Saint prend possession de nous de l’intérieur et toutes les puissances, toutes les cellules de notre corps se rassemblent comme si le corps était absorbé dans un mouvement centripète. C’est le passage du Tabernacle à la Crèche. C’est Jésus qui se remplit de moi de l’intérieur de mon âme.

II est impossible pour nous de produire cette oraison de quiétude. Mais il faut s’y disposer. Pour cela, il faut être assez actif. Il faut renouveler notre baptême par où notre âme est entièrement irriguée dans le Corps mort et ressuscité du Christ. Il faut prendre des Paroles de l’Écriture, réciter le « Notre Père », le « Je Vous salue, Marie »... Il ne faut surtout pas faire le vide (zazen). Il faut aimer Jésus de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces.

À ce moment-là, il y a comme une absorption des puissances, une profonde quiétude, un profond rassemblement qui se fait, indépendamment de nous, à un niveau très profond, très caché, absolument inaccessible quant à la lucidité, à la découverte, à la révélation, à la vision ou à l’expérience de notre intelligence ou de notre cœur. Mais à un moment donné, notre cœur est saisi, brûlé de l’intérieur dans un élan et une soif inexprimable.

Cette union des cœurs caractérise la 5ème demeure.

Cela peut être fulgurant, mais ordinairement, il faut des années pour arriver à l’union de volonté, surtout pour ceux qui ne font pas oraison. C’est ce quelque chose qui arrive un jour, qui nous fait entrer dans la course vers l’union transformante où notre cœur va avoir une soif et un élan incroyables.

 

1.    Commentaire de sainte Thérèse d’Avila sur cette strophe du cantique spirituel de saint Jean de la Croix :

« Vous aurez entendu parler de la façon merveilleuse dont se fait la soie et dont Dieu seul peut être l’inventeur. Vous aurez surpris, en outre, comment elle vient d’une semence qui ressemble à de petits grains de poivre... Or, dès que les mûriers commencent à se couvrir de feuilles, cette semence se met, elle aussi, à prendre vie sous l’action de la chaleur ; et tant que l’aliment qui doit la soutenir n’est pas prêt, elle demeure comme morte (oraison de quiétude).

« C’est donc avec les feuilles du mûrier que se nourrissent les vers qui viennent de cette semence. À peine ont-ils grandi, qu’on place devant eux de petites branches, où avec leurs petites bouches ils filent la soie qu’ils tirent d’eux-mêmes. (ils se nourrissent de leurs propres feuilles et du coup, ils peuvent se nourrir de leur propre vie (nos petites vies, nos petites blessures, nos petites croix) : ils font ainsi de petites coques très étroites, où ils se referment (on s’enferme dans le fruit de la Croix). C’est là que ces vers qui sont grands et difformes (on devient difforme à cause des phénomènes pathologiques qui surgissent à ce moment-là) trouvent la fin de leur vie ; puis de cette coque elle-même sort un papillon blanc très gracieux... » (c’est la métamorphose, le passage à la 5ème demeure).

« L’âme, représentée par ce ver de terre, commence à vivre quand, à l’aide de la chaleur de l’Esprit-Saint, elle commence à profiter de la grâce que Dieu nous accorde à tous, et à user des remèdes qu’Il a confiés à l’Église, comme la confession fréquente, la lecture de bons livres, les sermons... Avec eux, elle reprend peu à peu la vie, elle se soutient par les moyens que je viens de dire et les bonnes méditations, (elle fait souvent oraison, activement) ; enfin elle a grandi, et c’est l’état où je la considère, sans me préoccuper de son état précédent. Or, quand ce ver dont j’ai parlé au commencement a grandi, il commence à filer la soie et à construire la demeure où il doit mourir. »

« Par là, vous voyez, mes filles, ce que nous pouvons réaliser avec le secours de Dieu, afin que la divinité majestueuse qui est la nôtre en Dieu devienne notre demeure comme elle l’est dans cette oraison d’union, et comment d’ailleurs nous préparons nous-mêmes cette demeure. »

La transformation opérée par l’oraison d’union équivaut à une véritable métamorphose. Tel est le sens de la comparaison que sainte Thérèse souligne elle-même :

« Je vous le dis en toute vérité, cette âme ne se reconnaît plus. Il y a la même différence entre son état passé et son état actuel, qu’entre ce ver à soie difforme et le petit papillon blanc ».

Ce passage à la 5ème demeure est une étape merveilleuse parce que d’un seul coup on est libre !

Mais c’est un passage très difficile aujourd’hui parce qu’il implique l’obéissance et que l’obéissance est une mort à soi-même.

« Nous aurons à peine accompli tout ce qui dépend de nous, que Dieu prendra ce petit travail qui n’est rien (faire oraison), l’unira à Sa Grandeur et lui donnera tant de prix qu’Il en sera Lui-même la récompense. »

« Courage donc, mes enfants, hâtons-nous d’accomplir cette œuvre et de fortifier le tissu de notre petite coque mystique (Le corps spirituel se tisse petit à petit à partir des blessures, des croix, des failles, des brèches qui sont en nous et qui sont gardées par le monde spirituel. C’est l’échelle de Jacob par où les Anges montent et descendent).

« Qu’il meure, oui, qu’il meure, ce ver mystique, comme le fait le ver à soie dès qu’il a terminé l’ouvrage pour lequel il a été créé, et alors vous constaterez comment vous verrez Dieu, et vous vous trouverez enveloppé de Sa Grandeur, ainsi que le petit ver à soie dans sa coque. Quand je dis que vous verrez Dieu, je l’entends de la manière que j’ai expliquée et d’après laquelle Il se donne à être éprouvé dans l’Union mystique. »

« Considérons maintenant ce que devient ce ver mystique car c’est pour en arriver là que j’ai dit tout ce qui précède. Lorsque vous êtes élevé à cette oraison d’union, vous êtes totalement mort au monde et vous vous transformez en un petit papillon blanc. »

« En vérité, l’âme passe d’ordinaire un temps très long et même des années, où, après avoir franchi l’état de ceux qui commencent à soupirer à l’union avec Dieu, elle doit s’exercer dans celui où la progression de la grâce opère (2ème demeure). Semblable à celui qui est sorti d’une étroite prison, elle s’avance dans les réalités divines avec beaucoup plus d’aisance et de satisfaction, comme aussi avec une joie plus abondante et plus intime, que dans les débuts avant son entrée dans cette nuit, puis elle rentre dans la sécheresse. »

Quand on rentre dans la sécheresse, c’est très bon signe, cela veut dire qu’on ne ressent plus rien, qu’on se sent tout petit, on se demande ce que l’on a bien pu faire de mal ; justement, on a fait beaucoup de bien et on paraît de plus en plus monstrueux, on est devenu un ver de plus en plus difforme... C’est excellent !

« C’est avec la plus grande facilité qu’elle trouve immédiatement dans son esprit une douce et amoureuse contemplation ainsi qu’une saveur spirituelle sans qu’il lui en coûte le moindre raisonnement ».

« Je ne peux même plus parler, je ne peux même plus méditer, je ne peux même plus lire, je n’arrive plus à faire oraison, je ne même plus dire mon chapelet....» Excellent ! Alors que dois-je faire ?

« Comment peux-tu survivre, ô mon âme, en ne vivant pas où tu vis ? »

« Je veux mourir... » Le Verbe de Dieu se conçoit en moi, c’est normal : tout s’arrête ! Face au Verbe, je me vois monstrueux et je ne vois que le côté monstrueux puisque je ne vois pas le Verbe. Mon regard alors change... il devient divin, il devient plus objectif, par comparaison, si l’on peut dire.

« Je veux vous donner un signe clair à l’aide duquel vous ne pourrez ni vous tromper, ni douter que la faveur (de la métamorphose) vient de Dieu... Dieu s’établit Lui-même dans l’intime de votre âme de telle sorte que, quand vous revenez à vous-même, vous ne pouvez avoir le moindre doute que vous n’ayez été totalement plongé(e) en Dieu et que Dieu n’ait été totalement plongé en vous ».

C’est après cette période de sécheresse, et en même temps d’amour et de recueillement, après une période d’humiliation, de petitesse, d’anéantissement, de mort finalement, que l’oraison de recueillement est telle qu’il n’y a plus aucun doute qu’il s’est passé quelque chose... que nous avons cette certitude d’avoir été entièrement englouti en Dieu et que Dieu a été entièrement englouti en nous.

II s’est passé quelque chose, mais nous ne savons pas ce que c’est. Toutes nos puissances ont été non seulement rassemblées, mais englouties dans le Verbe de Dieu. Cela a duré peu de temps, même si on a l’impression que cela a duré longtemps. Le recueillement est absolu puisque l’on a presque une perte de conscience, un peu comme dans le sommeil, mais on est totalement éveillé. Le signe que donne sainte Thérèse est intéressant :

« Cette vérité s’imprime si fortement en elle, et se passerait-il plusieurs années sans qu’elle reçût de nouveau une pareille grâce. qu’elle ne pourrait ni l’oublier ni la mettre en doute. Cette certitude indépendante de toute vision. Dieu seul peut la donner ».

« Oui, le Seigneur entra dans le centre de l’âme, sans passer par aucune de ses portes, comme Il entra chez ses disciples, quand Il leur dit « La paix soit avec vous » ou qu’Il sortit du Sépulcre sans même lever la pierre qui fermait son Tombeau ».

Nous rentrons dans la demeure de la grâce, la 5ème demeure, où la grâce est comme la locomotive du cœur.

Le Sceau divin a été mis dans notre cœur et une ouverture s’est faite qui nous met en communication permanente avec le Cœur du Christ.

C’est pourquoi l’âme s’écrie :

« Comment peux-tu survivre, ô mon âme, en ne vivant pas où tu vis ? »

À ce moment-là, nous vivons dans ce lieu où se trouve Celui que nous aimons et qui s’est planté en nous, et pourtant, nous sommes encore sur la terre. Alors, nous sommes assoiffés et en même temps, nous restons dans la sécheresse Mais notre cœur n’est plus dans la sécheresse, il a soif ; il est accroché à Jésus, il veut aimer, il a soif d’amour, il souffre d’amour. Comme la Présence du Christ n’est plus une présence sensible psycho-mystique, mais surnaturelle dans notre corps, notre cœur souffre, il est blessé. Comme le papillon qui était si bien enfermé dans son cocon (comme nous dans notre petite grâce personnelle), on vole à présent dans tous les sens, comme un cerf assoiffé, on court partout et on ne sait même plus où se poser. Il y a alors une certaine angoisse. Même dans l’oraison, on ne trouve plus le recueillement même s’il subsiste, car c’est un recueillement de volonté, un recueillement cordial.

Cette soif d’amour va nous pousser à aller dans toutes les directions pour aider ceux qui sont proches de nous ; c’est l’éclosion brutale de la charité fraternelle en nous, comme la métamorphose du papillon. Notre cœur assoiffé d’amour, dérouté par le silence de Jésus, se répand en actes de charité et de miséricorde envers le prochain. L’amour devient très actif, très concret, dans les toutes petites choses comme dans les grandes. On va aimer la nature, la création toute entière, l’humanité souffrante et affligée.

Notre oraison devient une oraison cordiale, une oraison affective qui traverse notre corps et ceux qui sont là présents corporellement. Nous allons les aimer concrètement dans les petites choses, les riens-du-tout. C’est cela la métamorphose du papillon : nous avons soif d’aimer tout le monde !

 

2.    La transformation de notre corps en crèche.

On pourrait prendre une autre image que celle du ver qui se transforme en papillon pour expliquer cet état d'oraison.

Je connais une petite paysanne qui, pendant l’Avent, avant Noël, éprouva comme une nécessité de commencer à être éprouvée corporellement. Elle a eu une blessure physique qui a fait comme une brèche en elle et qui lui a fait comprendre que cette plaie profonde en elle était comme le Tombeau du Christ, comme le Saint Sépulcre.

Mais on peut en faire l’application à n’importe quelle autre blessure physique ou psychosomatique, car toutes nos blessures sentent l’endroit ou on meurt un peu. Alors il faut mettre un ange à droite, un ange à gauche, comme les saintes Femmes qui ont vu dans le Sépulcre un Ange au pied et un Ange à la tête pour garder le Tombeau. Il y a alors un lien de lumière, une descente dans le monde spirituel, une montée dans les cieux (les Anges qui montent et descendent, c’est à partir de la brèche). II y a, à chaque instant, une partie de notre corps qui meurt et, quand nous offrons nos brèches, nos blessures, nos douleurs, cela descend et cela monte et c’est remplacé par de la paille.

Notre petite paysanne voyait son corps, petit à petit, qui était transformé en paille, en un petit cocon, en une petite crèche. Pendant des semaines, tout le temps, à partir des brèches offertes, à partir de ses croix, comme le ver, elle a tissé un fil vers le haut, un fil vers le bas et son corps s’est transformé en crèche, en paille, spirituellement.

C’est cette sorte de paille, en effet qui fait subsister notre corps physique dans le Verbe de Dieu.

Et, à Noël, d’un seul coup, dans son corps, l’Enfant-Jésus était là de manière vivante. C’était clair !

C’est typique de la 5ème demeure où concrètement par l’offrande de nos moindres souffrances et de nos moindres blessures concrètes, on fait participer notre corps simultanément à ce que fait la grâce.

Saint Jean de la Croix dit bien qu’il faut chasser toutes les souffrances psychologiques qui viennent de notre caprice ou de notre orgueil, mais qu’il ne faut pas chasser les douleurs bien concrètes ni les souffrances purement mystiques comme cette soif d’Amour que l’on n’a pas ; car c’est là où notre corps participe.

Dans l’oraison de quiétude (4èmedemeure), on est comme transformé en pierre, en quelque chose de très lourd, de très minéral. On est comme pétrifié parce que les puissances sont absorbées si bien que la vitalité ne fonctionne plus. C’est un peu comme si on était dans le sommeil. À ce moment-là, il faut supplier l’Esprit-Saint de faire en sorte qu’on soit comme un tabernacle avec, au fond, la Présence cachée, silencieuse, invisible mais pacifiante du Christ : c’est le schème de notre corps dans la 4ème demeure.

Mais le schème de notre corps dans la 5ème demeure, c’est ce tissage à partir des petites croix, ce tissage de notre corps qui devient paille de la crèche.

Voici le témoignage textuel :

« J'ai vu que la très Sainte Vierge a été envoyée par son Père adorable, par l’Amour du Cœur de Jésus et par la véhémence du Saint-Esprit pour me transformer impérativement en crèche (c’est une transformation) pour que l’Enfant puisse être porté. Chaque jour qui passait, les Anges et les Archanges façonnaient cette crèche. C’était pour porter l’Enfant et pour Le recevoir. Il fallait qu’à chaque moment, je me fasse habiter corporellement à la manière dont le Ciel le désirait, le voulait et devait faire cela en moi. Alors, du Ciel, un chemin s’est ouvert et c’est par cette brèche (la blessure), c’est par là que montaient et descendaient, comme je l’éprouvais effectivement, les Anges qui préparent ici la métamorphose de l’enfant du monde nouveau. Et., à Noël, le Ciel m’a comme donné la possibilité d’être entièrement pénétrée et de pénétrer entièrement cette paille et de grandir avec cette paille devant Dieu, le Père du Verbe. »

Cette paille de la crèche du Christ possède à la fois une dimension concrète parce qu’elle a touché le Corps de l’Enfant-Jésus, il y a 2000 ans, et en même temps, une dimension d’éternité parce qu’elle a été touchée par Jésus dans la glorification de sa naissance.

C’est cette paille là qu’elle a pénétrée et qui l’a pénétrée dans son corps de manière à ce qu’il y ait une identification corporelle avec elle.

« Alors, j’ai reçu le Sceau donné par l’Enfant-Dieu qui permet de reconstruire une humanité nouvelle en moi. Et en recevant ce Sceau sur cette crèche que mon corps avait pénétré, l’Enfant-Jésus y fut reçu et le revêtit ».

La paille, la crèche, fut revêtue de l’Enfance du Christ !

« C’est « enfant de Dieu » que nous devons renaître pour donner à l’enfance la grâce et être ainsi renouvelés dans un corps nouveau. »

Ce n’est pas mal comme schème corporel ! Il y a quelque chose dans notre corps qui doit jouer : une transpiration, une fatigue, une blessure, une douleur, n’importe laquelle, ou aussi des réactions comme du déséquilibre, des vertiges, ou des phénomènes psychosomatiques. Il faut utiliser cela de manière à ce que nos cellules, petit à petit, soient offertes et qu’il y ait ce tissage !

Alors on demande l’aide des Anges, on demande au « miracle des trois éléments » de se faire, ce qui va permettre à notre prière, dans ces blessures-là, dans ces brèches, d’être spiritualisée immédiatement. Du coup, on est transformé en paille. Et au moment où nous ne nous y attendons pas, sur cette paille il y a Jésus, l’Enfant glorieux du Père, le Verbe incarné qui est là, qui pénètre cette paille et, d’un seul coup, on est enfant de Dieu en notre corps. Ce n’est pas nous qui allons l’inventer : à un moment donné, il y a l’advenue de notre corps spirituel, de l’Enfance innocente et glorieuse de Jésus qui apparaît.

Pour cela, il faut un jour être transformé en paille, préparer par la spiritualisation de notre corps, une terre d’accueil de notre corps spirituel venu d’en haut ; c’est très beau ! Pour redevenir petit enfant, il faut passer par la Crèche. C’est un très beau schème !

 « Nous devenons alors enfant de Dieu dans notre corps renouvelé par la grâce ! »

Dès que nous faisons oraison et que nous commençons à vivre de la grâce sanctifiante avec le vol libre du corps habité par la présence créatrice de Dieu, l’union transformante est déjà là, mais elle n’est pas accomplie : on va vers l’union transformante, on court vers l’union transformante.

 

3.    Commentaire de saint Jean de la Croix :

« Comment peux-tu survivre, ô mon âme, quand déjà il te faudrait mourir sous le coup des flèches... ».

« C’est comme si l’âme disait : « Comment, mon âme, peux-tu encore subsister dans le corps puisque les flèches d’Amour, les attouchements de l’Amour que tu as reçus dans ton cœur, de ton Bien-Aimé, sont suffisants à eux seuls pour te faire mourir d’amour totalement ? »

Nous sommes morts à cette terre, et en même temps, nous sommes tellement assoiffés d’amour que nous commençons à devenir davantage présents à ce monde, en posant de plus en plus d’actes d’amour concrets. C’est pourquoi il faut persister dans l’oraison de recueillement pour parvenir à l’union de volonté. On ne s’arrête pas pour autant de faire oraison mais on est dans ce que l’on appelle l’oraison d’abandon.

L’oraison d’abandon

Dans l’oraison d’abandon, nous sommes touchés par le feu ardent de l’Amour du Christ et, en même temps, par notre monstruosité et nous devons apprendre à nous abandonner. Notre cœur est blessé par l’Amour du Christ par cette plénitude qui purifie et ce feu tellement ardent qu’il y a beaucoup de fumée, et nous ne voyons plus que de la fumée.

Dans l’oraison nous ne voyons plus que la fumée parce que c’est l’Amour de Jésus qui brûle toutes nos puanteurs, nos putréfactions, nos impuretés, nos haines et tout notre orgueil, et bien que tout cela s’évapore en fumée, ces émanations sont infernales, c’est très désagréable. Néanmoins, on ressent la même chose exactement que lorsqu’on faisait ces péchés de manière volontaire, peccamineuse, alors que là, on le subit.

Il faut laisser sortir cette fumée car elle est le signe que nos péchés sortent au lieu de rentrer en nous. Dans l’oraison d’abandon, on comprend alors que c’est Jésus qui brûle tout cela et c’est notre joie de le comprendre. On laisse faire Jésus, on est abandonné, on accepte :

« Fais de moi ce qu’il Te plaira, pourvu que Ta Volonté se fasse en moi, je ne désire rien d’autre, Ô mon Dieu ! »

Dans l’union de volonté, l’oraison elle-même devient, non pas seulement aride, mais presque le contraire, car on a l’impression de régresser de façon monstrueuse.

Saint Jean de la Croix dit qu’ici on est comme mort quand on fait oraison et l’âme, à ce moment-là, peut être saisie de découragement, ce qui fait s’écrier à sainte Thérèse d’Avila : « Mon Dieu, quel drame, le nombre d’âmes religieuses, d’âmes chrétiennes qui s’arrêtent dans la fidélité à l’oraison, alors que c’est le moment où l’Amour commence ! quel gâchis, quelle horreur ! » parce que c’est avec cela qu’on va vers les fiançailles. Du cœur, cela va passer à l’intelligence et de l’intelligence au corps, automatiquement. Il ne faut surtout pas prendre d’antidépresseur à ce moment-là. Il faut pratiquer l’obéissance héroïque !

Alors l’âme s’écrie :

 

9     « Que ne guéris-Tu ce cœur

« Puisque c’est de Toi qu’il a reçu sa plaie ?

« Et, me l’ayant dérobé, (mon cœur m’a été dérobé par le Christ. J’ai l’impression que je n’aime plus, je ne vaux plus rien, je ne fais plus rien, je suis devenu inutile, nul)

« Pourquoi le laisser ainsi

« Et ne pas emporter le vol que Tu fis ? » (pourquoi ne me guéris-Tu pas ?)

 

10   « Éteins mes impatiences,

« Puisque d’y mettre fin nul n’a le pouvoir ;

« Et puissent mes yeux Te voir, (on ne veut plus d’apparitions, on veut voir la Lumière de Dieu qui est au centre de notre âme, cette Lumière incérée)

« Puisque Tu es leur Lumière

« Et c’est pour Toi seul que je les veux garder. » (alors, on fait oraison)

 

Et on Le cherche partout ! À ce moment-là, nous sommes source d’exaspération pour nous-mêmes et pour les autres, et nous voudrions entrer en présence de Dieu de manière définitive, quitte à en mourir.

Et l’âme s’écrie :

 

11   « Découvre-moi Ta présence, (on veut Le voir partout - c’est le cri de Heidegger qui n’arrive pas à faire l’induction de l’énergéia)

« Que la vision de Ta Beauté me tue ! (on ne peut plus se regarder nous-mêmes, on est trop monstrueux : une mouche devient une splendeur à côté de nous ! Je veux mourir à mon identité néo-formée, à ma fausse personnalité)

« Qui pour l’amour est en peine

« Guérir ne peut, Tu le sais,

« Qu’en présence du visage de l’Aimé ! » (Il est au centre de ses yeux, au centre de sa vie, au centre de son âme, au centre de son corps)

« Découvre-moi Ta Présence »

 

 « Parce qu’il est certain que Dieu est toujours présent dans l’âme au moins selon sa Présence perpétuelle ; mais sa Présence de grâce, comme sa Présence d’immensité, sa Présence d’Amour (la blessure) sont recouvertes. Et comme cette âme est poussée à L’aimer, à Le retrouver, à Le trouver totalement rempli de cette ferveur, elle demande ici de voir, elle demande une présence affective de l’Amour brûlant que le Christ fait de Lui-même dans son âme.

Il lui a fait une fois, et d’une manière si haute, qu’il lui a semblé qu’elle y a éprouvé avoir là un immense être couvert. »

Et sainte Thérèse d’Avila dit de cette blessure, dans cette étape :

« Dans cet instant, Dieu lui avait communiqué certain rayon clair-sombre de sa divine brûlure et de sa divine beauté, et avec un effet tel dans son âme qu’à partir de là. Il y a causé des désirs ardents et des défaillances pour l’amour de ce qu’elle sent là, caché dans la Présence ».

Et, du coup elle Le cherche partout. C’est là que l’amour du prochain commence à devenir effervescent.

« Ce qui est conforme à ce que David éprouva lorsqu’il disait : « Mon âme désire et défaille dans toutes les voies du Seigneur ». (Chaque rencontre est une voie du Seigneur !)

« Parce qu’alors l’âme défaille avec désir de s’engolfer (le golfe), dans ce souverain bien qu’elle sent présent et couvert (s’engolfer : s’enfoncer dedans, s’immerger)

 

« Que la vision de Ta Beauté me tue !

« Qui pour l’Amour est en peine, guérir ne peut,

« Tu le sais, que s’il voit Ton visage »

 

Cette maladie d’amour est quand même assez extraordinaire !

« Il faut remarquer ici, que l’amour n’arrive jamais à être parfait jusqu’à ce qu’il arrive à un état où ceux qui s’aiment viennent à être tellement appareillés dans une ressemblance d’identité qu’ils se transforment l’un dans l’autre, et alors l’amour est entièrement sain. Et parce que l’âme éprouve ici une première ébauche de l’amour, elle aspire à cette identité et c’est sa maladie et c’est sa mort de ne pas y être. Et elle désire donc achever de se conformer au visage de celle dont elle n’est que l’ébauche, qui est son Époux, le Verbe de Dieu. »

Elle subsiste déjà, mais elle n’est pas engolfée dedans. Et le Verbe de Dieu, Lui est engolfé dans l’amour de toutes les créatures. Elle va donc aimer toutes les créatures à l’infini et elle va préférer mourir pour chacune plutôt que de la voir commettre un seul péché véniel… comme le Christ Lui-même l’a fait !

 

VI.   Il est important de comprendre comment la course vers l’union transformante implique la dimension du corps, jusque dans son aspect le plus fondamental, le plus élémentaire.

Il est le lieu de notre course vers l’union transformante qui implique le poids de notre corps, avec notre métabolisme, nos maladies, nos douleurs et jusqu’à notre respiration, notre nourriture, notre atavisme, nos instincts… Il faut être attentif à cela.

Quand Jésus nous dit à l’Eucharistie : « Ceci est mon corps », il y a une attention au corps et à la substance même du corps. L’union transformante se fait dans le corps, le mystère de la transsubstantiation l’appelle et le symbolise. Nous devons être attentifs à ce mystère parce que dans la formulation carmélitaine classique de saint Jean de la Croix, sainte Thérèse d’Avila, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, sainte Élisabeth de la Sainte Trinité, et Don Marie Eugène de l’Enfant-Jésus, c’est essentiellement l’union transformante vécue au niveau de l’âme, vécue à travers le mystère de l’Immaculée Conception qui est expérimentée et ensuite décrite dans leurs œuvres. La grâce vit au centre de l’âme et introduit l’âme dans cette course vers l’union transformante. C’est l’âme qui est transformée en grâce sanctifiante, c’est-à-dire dans la vie qui anime le Cœur, l’Âme, la divinité de Jésus dans la vision béatifique.

Il y a alors une unité de vie avec Jésus qui fait que c’est l’animation du Christ qui donne les formes, qui donne les déterminations à notre vie dans sa source. La source de tous nos actes, de toutes nos pensées, de toutes nos vitalités, de notre vérité, c’est la Vérité, c’est le Christ Jésus Ressuscité.

C’est cela l’union transformante qui se fait dans la tempête ou dans la quiétude ou dans la simplicité ou dans l'effervescence, selon la demeure dans laquelle on se trouve. Nous nous sommes intéressés spécialement à la 4ème demeure qui se fait dans la tranquillité, dans la quiétude, dans notre petit Nazareth, dans la caverne des sens où se trouve saint Joseph.

L’union transformante avec la Vierge Marie nous met plutôt dans une vision carmélitaine, c’est-à-dire, une vision de la grâce dans l’âme spirituelle, dans notre vie contemplative. C’est la partie où l’âme est spirituelle, contemplative, qui passe ces grandes traverses de l’union transformante, où l’âme se spiritualise en passant d’une contemplation humaine de Dieu (dans la 1ère demeure) à une contemplation purement spirituelle, celle du Verbe de Dieu face au Père (dans la 7ème demeure). La transformation est totale, mais c’est spirituel.

Mais nous devons nous demander comment la foi de Marie a pu La faire pénétrer dans les processions de la Très Sainte Trinité jusqu’à engendrer dans son corps l’Incarnation du Verbe de Dieu.

C’est sa foi qui fait pénétrer Marie dans les Processions de la Très Sainte Trinité, et c’est sa contemplation qui engendre dans son corps l’Incarnation du Verbe de Dieu. Son activité est donc par rapport à une grâce qui pénètre spirituellement dans l’incréé des Processions de la Très Sainte Trinité. Du coup, il y a un rejaillissement sur le corps : c’est le mystère de l’Incarnation.

L’union transformante avec saint Joseph implique le corps. C’est également le mystère de l’Incarnation qui nous fait pénétrer dans la présence mystérieuse du Père en saint Joseph. De ce fait, notre contemplation n’est plus seulement vécue au niveau du mystère de l’Immaculée Conception, mais du mystère de l’Immaculée Conception et de l’Époux de l’Immaculée Conception. La relation de saint Joseph avec Dieu dans l’Esprit-Saint passe pour lui par la rencontre avec le mystère de Dieu dans le corps spirituel parfaitement pur de la Vierge Marie. Et la première rencontre concrète, substantielle, de saint Joseph avec le Verbe de Dieu, eut lieu avec le Verbe incarné, avec le corps de Jésus déjà là, présent en Marie.

La manière dont saint Joseph a pénétré dans l’union transformante, dans sa relation avec la Vierge Marie et avec Jésus à Nazareth, est tellement incarnée, corporelle que cela nous éclaire sur la manière dont le corps est intégré et va s’intégrer dans le processus de l’union transformante.

Nous comprenons mieux comment notre corps va servir de lieu, de support, de bras de levier, de possibilité concrète, c’est-à-dire de réalisation vraie, efficace et réelle de cette union transformante dans notre vie ; parce que l’unité de notre corps, de notre âme et de notre esprit n’est pas assumée totalement et substantiellement dans la 1ère possession de la Très Sainte Trinité comme la Vierge Marie l’a expérimenté dans sa foi au moment de l’Incarnation.

Pour nous, le centre de gravité de notre âme est plutôt dans notre corps.

À partir du moment où on fait oraison et où on vit de l’union transformante, on a une conscience vive de notre pauvreté, on n’a plus qu’un désir, celui de disparaître et de nous engloutir en Marie tant on a honte. On est alors dans des dispositions très proches de celles de saint Joseph. Dans ce désir d’effacement, notre corps joue un rôle considérable. Notre culpabilité, nos tempêtes psychologiques s’apaisent et nous découvrons qu’un Don nous est fait :

C’est l’Immaculée Conception : « N’aie pas peur de prendre chez toi Marie comme Épouse ».

 

VII.    Passage de la 4ème à la 5ème demeure

À ce moment-là, notre tourment n’est plus exaspéré et nous pouvons vivre notre oraison dans une tranquillité profonde parce que la Vierge Marie est là qui nous montre qu’Elle nous aime, qu’Elle n’aime que nous, qu’Elle est entièrement consacrée à nous, donnée à chacun d’entre nous. Nous découvrons à travers Elle que nous pouvons vivre d’un lien d’amour particulier parce que nous pouvons nous reposer avec Elle, en Elle, qui est toute enracinée en Dieu dans le corps ressuscité de Jésus.

Alors notre corps terrestre avec son opacité, son poids, devient le nouveau Nazareth de la présence de Marie et de Jésus dans la gloire corporelle de la Résurrection.

Ce sont les premiers moments de repos, de tranquillité corporelle, qui accompagnent l’oraison de quiétude. Le corps n’est plus animé dans l’extériorité, mais dans la spiration intérieure, donc il se rassemble. Ce rassemblement du corps vers la spiritualité de l’âme, dans un rassemblement de tranquillité, ressemble étrangement aux impressions que donne le sommeil de la nuit, lorsque nous dormons, alors que nous sommes spirituellement conscients, éveillés, montre que nous sommes entrés dans la 4ème demeure.

Nous sommes comme engourdis dans tout notre être, nous ne poursuivons pas de méditation active, c’est le sommeil des puissances imaginatives et mentales qui peut aller jusqu’au sommeil des puissances végétatives, (mais sainte Thérèse d’Avila ne le recommande pas du tout). Et pourtant, il y a en même temps une lucidité contemplative, spirituelle et substantielle, au centre même de ce sommeil qui fait que, lorsque nous nous réveillons, que nous quittons notre oraison, nous sommes encore en Dieu dans la prière.

Ce n’est plus nous qui agissons, ce n’est plus notre manière de voir Dieu, d’atteindre Dieu qui est là, c’est quelque chose qui descend dans le centre de notre âme et de notre corps. Notre corps terrestre est alors aspiré en un centre intérieur qui est l’esprit de l’âme animé par la grâce, et il retrouve quelque chose de son état originel.

L’oraison de quiétude n’est pas quelque chose de gratifiant pour notre orgueil, car nous ne pouvons plus rien faire alors que nous voudrions faire quelque chose spirituellement : on voudrait prier, méditer, etc... Quelque part un relais nous est donné : c’est le passage du ver au papillon. D’un seul coup il y a quelque chose qui s’est inversé dans le travail de l’âme. Nous passons de l’opacité du corps extérieur, de l’animation vers l’extérieur à l’animation vers l’intérieur : c’est le rassemblement, l’unification par l’esprit.

* Comment discerner le sommeil végétatif du sommeil de la grâce

Dans l’oraison de quiétude, la grâce prend le corps, mais le sommeil végétatif n’est pas pris par la grâce, sauf si on fait oraison avant de s’endormir et qu’on s’endort en priant.

Quand on sort du sommeil de l’oraison de quiétude, on n’a pas fait de rêves ni de cauchemars ni de méditations, car il y a eu le sommeil des puissances imaginatives, de la mémoire, des fantasmes, du mental (il n’y a pas eu de méditation).

Alors nous retrouvons dans notre corps quelque chose de notre corps originel, de notre corps d’innocence lorsque Dieu a créé notre âme spirituelle et l’a insufflée dans notre corps, dans la première cellule, à la suite de l’amour de notre père et notre mère. Dans l’oraison de quiétude, notre corps retrouve cet instant fulgurant de « grâce originelle » qu’il possède à l’instant de notre conception et qui nous est arraché immédiatement par la faute du péché originel. S’il n’y avait pas eu cette expérience de grâce originelle dans notre corps au premier instant, il n’y aurait pas la tâche du péché originel et le sacrement de Baptême ne serait pas nécessaire pour l’effacer.

Dans l’oraison de quiétude, je laisse mon corps d’opacité et je retrouve mon corps d’innocence qui est peut être la base de départ pour la découverte de la grâce au centre de l’âme spirituelle dans mon corps originel. Mais c’est le même corps : il n’y a pas un corps astral, un corps éthérique, un corps subtil, un corps lumineux, etc....

Avec saint Joseph, nous entrons d’une manière nouvelle dans un monde nouveau où le corps s’intègre dans l’oraison de quiétude.

Nous descendons du Temple à Nazareth, dans la source où notre corps devient disponible, si malléable et si animable par la Grâce, par la Présence de l’Esprit-Saint et par la Présence corporelle du Christ, que nous trouvons au centre de notre âme, non pas la grâce contemplative mais le fruit des sacrements, c’est-à-dire le Feu qui brûle le Cœur du Christ dans la Résurrection.

Nous passons alors de l’oraison de quiétude (4ème demeure) à cet incendie qui brûle de Cœur du Christ dans la Résurrection, au fond de notre âme (5ème demeure).

Dans la 5ème demeure, il n’y a plus ni signes, ni phénomènes charismatiques. Si nous avons la sensation que nos mains chauffent et qu’en imposant les mains, nous allons pouvoir guérir, c’est le signe que nous ne sommes pas encore dans la 4ème demeure, parce qu’il n’y a que le corps terrestre qui peut recevoir ces énergies, car dans le rassemblement qu’opère l’oraison de quiétude c’est impossible qu’il y ait ces phénomènes parce que les parties végétatives ne viennent pas vibrer dans le centre de la main !

Il est difficile d’expliquer exactement les mécanismes de la pénétration, de l’infiltration de la grâce, des énergies, dans le corps terrestre par rapport au corps originel ou par rapport au corps spirituel. Mais c’est facile à comprendre.

C’est bien le corps terrestre, le corps opaque qui vit ces espèces d’effluves. On ne les méprise pas, mais ce n’est pas encore le corps dans sa relation avec la Grâce sanctifiante, le corps est encore laissé à sa « vie végétative », c’est donc périphérique.

Mais quand il y a, dans l’oraison de quiétude, le rassemblement de toutes nos puissances et une simplification de tous nos actes, il y a alors une possibilité de rayonner, mais pas tout de suite et c’est cela le problème.

Alors la sagesse commence !

La métamorphose du ver en papillon est faite là, dans la 5ème demeure. On se trouve hors de notre corps habituel, hors de nos repères par rapport aux grâces reçues, par rapport à nos sécurités « psycho-métapsychico-dingo ». Cette métamorphose est un passage qui n’est pas mauvais puisqu’il nous a donné le goût de Jésus, le goût de la prière, le goût de l’oraison, le goût des sacrements, le goût du respect et de l’obéissance à la Sainte Église. (L’obéissance et le respect à la Sainte Église vont ensemble.)

Mais le papillon est tout honteux, car il ne sait pas où il est, il ne sait pas où est sa place. Au fond, il va mourir, il le sait. Cela dure très peu un papillon tandis qu’une chenille dure longtemps et, en plus, cela prolifère... Ces périodes durent toujours longtemps parce que c’est long de se débarrasser de son moi mystico-dingo. Mais Jésus a institué l’Église pour qu’il y ait ces retrouvailles avec notre identité d’origine et cette possibilité de courir vers l’union transformante en toute tranquillité, en toute simplicité. On se calme humainement.

* « Le « raccourci » de sainte Thérèse d’Avila

Sainte Thérèse d’Avila dit qu’il y a deux possibilités pour passer de la 4ème à la 5ème demeure, une qui dure longtemps, et une plus rapide, le « raccourci » lorsque nous faisons oraison. Si on ne fait pas oraison, cela peut durer 20 ans. C’est à nous de choisir : 20 ans de névrose ou bien le raccourci en faisant oraison. Le raccourci est plus méritoire et en même temps plus facile car c’est Dieu qui fait tout. Si on ne fait pas oraison, on va essayer pendant 20 ans de coopérer avec Dieu dans le concret, en essayant de rester vigilant, de persévérer, de tenir le coup ; c’est plus difficile et on souffre plus car Dieu intervient moins directement ; c’est donc moins méritoire et on est moins saint, contrairement à ce que l’on croit.

Dans la 5ème demeure, la sainteté consiste à choisir le plus facile : Dieu a pris possession de nous dans l’oraison de quiétude, on sait que c’est définitif ; le doute ne viendra jamais en nous. Dans la 6ème demeure, nous allons connaître la nuit de l’esprit, mais la nuit n’est pas le doute. Rappelons cependant ici que, dans les premières demeures, celles des commençants et des généreux, le plus saint est de choisir le plus difficile.

Il faut faire oraison en étant conscient de ce que nous faisons puisque la différence entre le sommeil végétatif et le sommeil de quiétude est qu’il y a une conscience actuelle, dans une passivité active où on se laisse rassembler du centre de l’âme. C’est Jésus qui est là et c’est Lui que nous voulons. Il faut toujours se ramener à la Présence de Dieu et, à un moment donné, à force de le faire, comme nos actes sont très tranquilles, pas violents, cela introduit un certain sommeil végétatif, mais cette fois-ci cela va dans le sens de la direction de la partie spirituelle du centre de l’âme de cette petite lumière qui est au centre de nous, qui rassemble, qui attire et qui fait que là on trouve la tranquillité, la paix, la douceur et la joie. Et d’un seul coup, à un moment donné, on se rend compte que notre corps se transforme dans l’oraison et qu’il a un poids extraordinaire. On peut retrouver cette quiétude (de la 4ème demeure) qui est toujours là quand on le veut, sauf si on est en état de péché mortel : parce que l’Amour ne diminue pas....

Voilà le raccourci de la 5ème demeure. Quand nous nous réveillons de l’oraison, nous savons qu’il s’est passé quelque chose de différent et nous ne pouvons plus douter qu’il y ait eu une rencontre de notre âme avec Dieu. Le corps a participé d’une manière telle qu’il n’y a aucune possibilité de douter qu’il y a eu une intervention surnaturelle de Dieu et que Dieu ait pris possession de nous.

Nous savons qu’il s’est passé quelque chose qui ne s’est jamais passé avant. Il y a eu un engloutissement total de toutes nos puissances : c’est toutes les secondes et tous les temps qui ont été accumulés. Il y a une touche d’éternité qui fait que l’on ne sait pas combien de temps elle a duré. C’est assez court. En fait, on n’en sait rien. Quand on revient, cela nous parait encore plus court que cela n’a été en réalité. Et cette fois-ci, c’est la grâce qui a effectué un travail en nous, le Cœur de Jésus a pris possession de nous, du centre de notre âme, jusque dans les parties de notre corps originel. Ce n’est pas encore le corps spirituel, c’est dans les parties disponibles innocentes de notre corps, dans les parties où notre corps se rassemble, où il est noué à la partie spirituelle de l’âme.

 

VIII.   Le passage aux fiançailles (de la 5ème à la 6ème demeure)

À partir du moment où l’on a été touché par la grâce d’oraison de quiétude, dans cette touche de rassemblement, non seulement du corps dans l’âme spirituelle, non seulement du monde végétatif dans la partie spirituelle du recueillement des puissances, mais aussi du temps qu’on y passe dans l’éternité de la Présence de Dieu, on sait que l’on a été choisi pour l’union transformante.

Mais le démon aussi le sait ! Et à partir de là, une quantité considérable de démons va venir sur nous pour nous faire lâcher prise. Saint Jean de la Croix dit que toutes les puissances disponibles de l’enfer vont se liguer contre nous pour que cette union transformante qui a germé en nous ne parvienne pas à son terme. Parce que le démon sait qu’en nous perdant il va perdre une multitude considérable d’âmes. Il faut savoir que toutes les puissances de l’enfer se précipitent sur tous les Carmels (c’est pourquoi on met des grilles).

Cette présence du démon est le signe du passage de la 5ème à la 6ème demeure, le signe que les fiançailles approchent.

Le démon va s’acharner à multiplier les contretemps et à tout faire pour nous empêcher de faire oraison : il va envoyer des gens, des coups de téléphone, des accidents de voiture, l’époux va nous soupçonner, le père spirituel ne va plus nous comprendre, les enfants vont rater les examens, vont se disputer... tout va se déchaîner contre nous et il va falloir que nous soyons tout à tous !

Heureusement, car la seule attitude consiste à rester disponibles, conciliants, et obéissants en multipliant les actes de charité pour être tout à tous. L’oraison se trouve alors dans nos actes. Et cette attaque du démon fait sa perte car, du coup, on est sollicité pour préparer un repas, pour répondre au téléphone, pour écrire une lettre, pour prier. Enfin l’obéissance est active concrètement ! Et le Saint-Esprit passe par les événements. C’est là qu’interviennent les mots justes, les pensées justes, les actes justes.

C’est La première mobilisation de notre corps originel et de tout notre être.

Mais cette période est très perturbante et cet état est très déprimant. C’est tout notre être qui est perturbé parce que c’est tout l’aspect superficiel et artificiel de notre personnalité (notre identité néo-formée) qui doit être détruit. Il faut que la lutte soit tellement épouvantable qu’il n’y ait plus aucune trace de notre fausse personnalité, du visage qu’on s’est fait, de notre côté artificiel. Avant la 5ème demeure, nous disons « on ne me respecte pas ! ». Après la 5ème demeure on dit « enfin, je reçois une gifle, tant mieux ! » parce que c’est notre identité spirituelle dans le corps que nous aimons et non pas notre personnalité néo-formée.

C’est à ce moment-là qu’apparaissent la dépression et les phénomènes pathologiques. Il ne faut surtout pas prendre d’antidépresseurs quand nous sommes dans la 6ème demeure.

Nous devons accepter de vivre cette destruction totale, cette crucifixion parce que c’est l’Épouse qui apparaît dans la 6ème demeure, ce sont les fiançailles.

Là, il faut vivre de l’obéissance héroïque à l’Église, aux commandements, aux supérieurs, au mari, et ne jamais s’appuyer sur ses impressions, sur ses opinions, sur ses idées, car tous les démons sont sur nous. Il faut savoir que tout ce qui vient sur nous, psychiquement à ce moment-là, c’est presque sûr que cela vient du démon. D’ailleurs, on le voit bien car il y a une chute incroyable, on est devenu particulièrement mauvais dans les parties psychiques de notre âme.

* La purification passive des sens

La purification passive des sens commence dès la 4ème demeure où c’est la grâce sanctifiante qui fait le travail de transformation... Tandis que dans les trois premières demeures, c’est la même grâce sanctifiante que nous recevons, mais elle nous aidait à devenir plus humain : on l’appelle la Grâce quoad modum. C’est la Grâce des premières demeures, la grâce de préparation, la grâce des commençants, des généreux et de la simplification. Elle est différente de la Grâce in se.

La grâce « quoad modum » est une grâce surnaturelle, elle donne des vertus infuses, comme la chasteté, par exemple, sans aucun effort, sans aucun mérite de notre part. Elle permet de poser des actes humains, simples, naturels, elle a une manière surnaturelle (modum) d’aller dans le concret naturel, dans la réalité saine et normale de l’homme.

La grâce « in se » est une grâce surnaturelle sanctifiante. C’est l’intervention surnaturelle et vivante de Jésus, de l’Esprit-Saint, de la Vierge Marie, du ciel tout entier en moi, qui me permet de poser des actes surnaturellement divins.

La métamorphose du ver en papillon que nous avons vue s’opère justement dans ce passage de l’effet naturel à l’effet surnaturel où c’est la grâce elle-même qui commence à faire le travail surnaturel en nous (4ème demeure). C’est pour cela que nous ne faisons plus rien dans l’oraison de quiétude.

Mais elle ne consiste pas à faire le vide. Au contraire, elle est une attention plénière où on se laisse remplir par Jésus, seulement, tranquillement, simplement. Et, à un moment donné, c’est Lui qui fait le rassemblement d’une manière tranquille, simple et progressive.

Dans la Grâce in se l’origine et l’effet sont tous les deux surnaturels, tandis que dans la Grâce quoad modum l’origine est surnaturelle et l’effet est naturel.

- Dans la 3ème demeure : C’est la grâce quoad modum

- Dans la 4ème demeure : C’est la grâce in se où commence la purification passive des sens

- Dans la 5ème  demeure : la grâce quoad modum et la grâce in se sont simultanées, en un seul acte : c’est l’obéissance divine à l’Esprit-Saint.

« Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même, activement, tranquillement, mais totalement, c’est Jésus seul »

II faut demeurer dans cette disponibilité immédiate, accepter cette obéissance aux événements, au Saint-Esprit, au delà de nos impressions et de nos sentiments.

Chaque fois que nous faisons un acte de charité, d’obéissance, d’unité totale, notre capital de grâces augmente. Nous commençons alors à entrer dans la sainteté.

La Sainteté ne consiste pas à être en état de grâce, elle consiste à faire que la grâce sanctifiante qui est en nous augmente constamment par des actes d’oraison, d’un de don total, d’engloutissement absolu en Dieu. C’est alors que la grâce de Jésus augmente en nous jusqu’à prendre possession de tout nous-mêmes, y compris des parties ténébreuses de notre âme, celles habitées par nos impressions, nos idées, nos opinions, nos habitudes.

Quand la grâce sanctifiante augmente, comme elle est au centre de notre âme, elle « pousse les murs », c’est-à-dire toutes les parties de notre âme qui sont entre la partie spirituelle et les parties végétatives, et qui sont habitées par les ténèbres de notre personnalité, par nos impressions, nos idées, nos opinions, nos habitudes, notre manière de voir Dieu, nos expériences précédentes par rapport au divin, par rapport à la religion, par rapport à notre union à Dieu, par rapport aux charismes que nous avons reçus. Tout cela doit disparaître ! Heureusement ! C’est épuisant ! Et cela épuise la grâce, justement, mais cela n’épuise pas notre ego. Toutes les scories de notre irascible, de notre concupiscible, nos colères, tout ce qui est refoulé, nos fantasmes, tout ce que le buvard de l’esprit de virginité a absorbé d’impuretés qu’il y a dans le cosmos, dans la génération moderne, dans les films vus ou non, parce qu’ils sont passés sur les ondes et parce que je suis plus ou moins réceptif ; tout l’atavisme de mes parents, etc... tout cela doit sortir !

Alors, on fait un acte de foi, un acte d’espérance, un acte de charité… et la grâce augmente, elle fait pression. Et qu’est-ce qui ressort ? Il ressort l’impureté, l’obscénité, la perversion, l’envie d’étrangler, de tuer, de blasphémer, etc...

Quand tout cela sort, c’est la preuve que la grâce travaille, et c’est cela la sainteté.

Dans l’innocence originelle, je n’étais pas un saint puisque le péché originel étant venu, tout cela était rentré dans mon innocence et j’en suis responsable, mais non coupable. Il faut alors faire une gestion des émotions pour que cela ne s’exprime pas trop et que cela sorte. C’est comme un exorcisme. C’est la purification passive des sens.

Si le critère de ce que l’on vit, à ce moment-là, c’est ce qu’on ressent, ce sont nos impressions.., c’est dramatique ! Si notre critère, c’est l’Abandon et la foi, dans l’attention confiante que c’est Dieu qui nous purifie.., c’est génial !

Il y a d’abord la purification du concupiscible, puis de l’irascible. Puis, la grâce ayant travaillé d’une manière telle qu’elle a pris jusqu’à l’extériorité du corps dans le fameux « raccourci » de la 5ème demeure, commence la purification passive de la mémoire.

C’est cette purification passive de la mémoire qui domine dans la 5ème demeure et qui prépare la purification de l’esprit de la 6ème demeure, la nuit de l’esprit… où l’orgueil va sauter.

Lorsque nous sommes à ce moment-là, source d’exaspération pour tous ceux qui nous entourent et pour nous-mêmes, nous voudrions enter en présence de Dieu de manière définitive, quitte à en mourir. Alors nous pouvons dire avec saint Jean de la Croix :

 

11   « Découvre-moi Ta Présence, (dévoile-moi Ta présence)

« Que la vision de Ta beauté me tue ! (je veux mourir â mon identité néo-formée, à ma fausse personnalité)

« Qui pour l’Amour est en peine

« Guérir ne peut, Tu le sais,

« Qu’en Présence du visage de l’Aimé ! » (l’Aimé est au centre de sa vie, au centre de son corps, au centre de son âme)

 

* La 12ème strophe nous met à l’orée des fiançailles :   5ème demeure.

 

12   « Ô Fontaine cristalline !

« Si dans le miroir de tes eaux argentées

« Tu me laissais voir soudain

« Les yeux que sans fin je cherche

« Et que je garde à l’ébauche de mon cœur.

 

Ce passage aux fiançailles est quelque chose de très marial. Au milieu de cette détresse, de cette purification, de cette nullité qui est source d’exaspération pour les autres et pour nous-mêmes, nous retournons à cette fontaine de grâces qui est notre seul recours, celui aussi de saint Joseph : « Si dans le miroir de tes eaux argentées ».

C’est l’espérance qui apparaît de manière active et surtout très personnelle qui implique la Grâce en personne Marie. Nous comprenons que c’est Marie qui nous engloutit pour que nous puissions découvrir ce feu, cette Lumière du Verbe de Dieu dans le Cœur Sacré de Jésus.

C’est là que notre corps originel, notre corps terrestre lui-même, se rassemble dans cette présence d’une fontaine cristalline pleine de grâce.

Alors, nous désirons être emportés intérieurement, engloutis totalement dans le Sacré-Coeur de Jésus et nous le Lui demandons. Il faut le formuler et le penser d’une manière très exacte, juste, plénière pour que l’acte se réalise. Et l’acte se réalisera par une grâce, par une intervention divine, d’un seul coup. Ce sont les Fiançailles avec Jésus, avec son Amour si lumineux, si extraordinaire, si puissant et merveilleux en nous, pour nous, qui nous dit : « Tu es mon égal... Je te fais confiance, tu es un saint. Mon saint. Je t’épouse ». Jésus met un sceau dans notre cœur.

Ici, nous touchons pour la 1ère fois le Père qui, dans son Sein, nous montre le Verbe dont Il se nourrit pour produire l’Esprit-Saint. Nous nous retrouvons dans le Verbe de Dieu, Dieu Lui-même se révèle à nous, de l’intérieur, nous engloutit en Lui et nous fait découvrir l’éternité de sa splendeur de Personne divine dans le Verbe de Dieu.

À ce moment-là, cette révélation dépasse tellement tout ce que nous avons pu désirer dans notre soif d’amour, c’est un amour tellement fort et qui va tellement au-delà de tout ce que nous avons pu concevoir dans notre imagination, que c’est trop fort pour l’âme qui a alors un mouvement instinctif de frayeur et de recul :

 

13   « Éloigne-les, mon Bien-Aimé !

« Voici que je m’envole... »

 

Nous allons passer de la Très Sainte Trinité au Sacré-Cœur de Jésus.

Dans la 5ème demeure, nous ne voyons rien, mais maintenant, d’un seul coup, nous voyons, dans une vision intellectuelle, surnaturelle le Verbe Incarné qui fait vivre en l’illuminant de tout Lui-même le Cœur de Jésus dans la Résurrection et qui nous dit : « J’ai besoin de toi, il faut que tu te donnes, que tu te livres à Moi », et cela implique le Don.

Nous comprenons alors tout ce que ce don implique : il implique la croix, le martyre et nous avons peur de la souffrance, car nous ne sommes pas encore complètement dans l’union transformante. C’est pourquoi l’âme s’écrie :

« Éloigne-les, mon Bien-Aimé ». Et si nous n’avons pas appris à aimer l’obéissance, les croix, dans cette 5ème demeure où nous découvrons notre pauvreté qui nous crucifie, nous ne pourrons pas dire Oui aux fiançailles. C’est vraiment la grande Miséricorde de Dieu qui nous permet de dire OUI aux fiançailles et de ne plus avoir peur des croix, du martyre et de la sainteté réelle, concrète, actuelle, dans l’instant présent pour que ce soit Jésus qui assume tout. C’est le mystère de la Croix Glorieuse qui prendra tout notre corps pour l’amener à la mise en place de notre corps spirituel.

Si l’on n’est pas avec l’Immaculée, on ne voit pas comment notre corps peut rentrer dans l’union transformante.

Mais c’était sous l’influence d’une grâce surnaturelle que l’on a reçu cette demande, si bien que l’on dit « non » instinctivement. Et l’âme dit : « Éloigne-les, mon Bien-Aimé. Voici que je m’envole ». Je vais vivre de ce que Tu viens de me donner et je m’envole avec cela - laisse-moi un peu de temps !

Commentaire de saint Jean de la Croix :

« L’âme en effet brûle du désir de voir son Dieu et dès qu’elle Le saisit, dès qu’il y a cette minuscule étincelle substantielle d’essence divine, elle ne veut pas »

C’est le retournement du cantique spirituel.

« L’âme, en effet, conformément aux immenses désirs qu’elle avait de ce regard divin qui aspire à voir la divinité incréée reçut de son Bien-Aimé intérieurement une connaissance telle et une communication de ce Verbe de Dieu telle qu’elle lui fait dire « Éloigne-les mon Bien Aimé ». Car telle est la misère de la nature en cette vie que lorsque l’âme se voit gratifiée par son Bien-Aimé de cette communication qu’elle désire tant, elle ne peut la recevoir presque qu’aux dépends de sa propre vie.

L’âme comprend immédiatement, que c’est presque aux dépends de sa propre vie. En effet cela implique le martyre, ce témoignage d’engloutissement total.

« …de sorte que lorsqu’elle découvre les yeux qu’elle recherchait avec tant de sollicitude et d’angoisse et par tant de voies, elle dit, se surprenant elle-même, « Éloigne-les, mon Bien-Aimé »

Elle découvre Dieu le Verbe, avec tant d’amour que cela lui est insupportable.

« Parce que le tourment qu’on éprouve, en de semblables visites et ravissements du Verbe, est parfois si immense et si intense, qu’il n’y a aucun tourment qui puisse disloquer autant les os et mettre la nature si à l’étroit que si Dieu n’intervenait pas à ce moment-là, notre vie se terminerait aussitôt. Et à la vérité c’est ce qui semble à la personne en qui cela se passe parce qu’elle éprouve que l’âme est comme se détachant de la chair et qu’elle abandonne le corps. Et la cause en est que de semblables faveurs ne peuvent bien se recevoir, dans le corps et dans la chair, que dans la proportion où l’esprit y est élevé lui-même dans cette communication avec l’Esprit divin qui vient dans l’âme. »

Saint Jean de la Croix nous dit explicitement, que c’est bien le corps qui n’est pas à la hauteur, parce qu’il n’est pas rentré dans ce que l’esprit vit dans l’oraison.

Il faut avoir découvert précédemment notre innocence divine incarnée, corporelle (cet exis comme dit Aristote) pour pouvoir faire participer notre corps à l’activité de la grâce en nous.

C’est une nécessité pour nous de mettre à jour cette porte d’entrée du lieu où la grâce sanctifiante peut surnaturaliser en même temps l’âme et le corps et rendre ainsi possible notre entrée corporelle dans le corps mystique, dans le Sacré-Cœur de Jésus, pour découvrir et toucher en nous le corps spirituel.

« …Et ainsi nécessairement, elle doit en quelque façon abandonner la chair. La chair doit pâtir et par conséquent l’âme dans la chair doit pâtir à cause de l’unité qu’elles ont en un seul suppôt. »

II faut comprendre que la mort a été introduite dans l’unité entre le corps et l’âme par le péché originel. Et lorsque nous recevons ces grâces d’union si fortes, cette espèce de mort apparaît de manière plus claire, plus sensible, plus limpide ; et c’est une mort dramatique parce qu’elle concerne la mort en soi. C’est la mort liée au péché originel, la mort universelle, qui concerne toute l’humanité et que nous devons traverser par notre mort personnelle.

Alors on ne peut pas ne pas dire : « Éloigne-les, mon Bien-Aimé ». C’est ce qu’expriment certains contemplatifs lorsqu’ils disent : « Alors là j’étais prêt à subir toutes les morts, de tous les temps, de tous les lieux et mille morts, dix mille morts ». « Et, partant, le grand tourment que l’âme sent dans cette sorte de visite et la grande crainte qu’elle a de se voir traiter par voie surnaturelle lui font dire « Éloigne-les, mon Bien Aimé. »

On est alors saisi par une espèce de frayeur d’être totalement brûlé par le surnaturel, corps et âme. Et pour la première fois, à cet instant précis, nous rentrons vraiment dans l’esprit de crainte de Dieu, dans cette peur d’être entièrement un saint, entièrement amour, entièrement lumière, corps et âme. C’est cette peur naturelle dans laquelle est notre âme qui nous fait dire à l’Aimé « Éloigne-toi. »

« Ce n’est pas que l’âme, en disant qu’Il détourne sa présence visible, veuille qu’il les détourne vraiment, mais c’est une façon de parler qui procède de la crainte naturelle, comme nous l’avons dit. Au contraire, quoiqu’il lui en coûtât beaucoup plus, elle ne voudrait pas perdre ces visites extraordinaires de l’Aimé parce que, bien que la nature blessée pâtisse, l’esprit néanmoins vole dans ce recueillement surnaturel pour jouir de l’Esprit de Celui qu’elle aime et c’est cela justement tout ce qu’elle désirait. »

Mais en même temps, il y a une réaction instinctive de notre corps lié aux autres corps.

N.B. :    Même Adam, dans son corps originel, aurait été mis à l’épreuve de la manifestation du Verbe dans sa foi de grâce originelle puisque Adam est sous le régime de la foi, mais il n’aurait pas connu la mort, il aurait été emporté au ciel. À un moment donné quand, se livrant dans un amour total d’une humanité intégrale, homme et femme, en présence de Dieu avec tous les corps et tout le cosmos dans une charité ardente, le Verbe de Dieu se serait manifesté à lui corporellement du centre même de son corps d’origine, entièrement englouti dans le Don, à ce moment-là, il aurait éprouvé lui aussi ce « Éloigne-les. mon Bien-Aimé » ; donc ce n’est pas uniquement le péché originel, c’est aussi parce que la nature humaine est très éloignée de la transcendance d’Amour de Dieu. Mais le péché originel accentue et on a peur de perdre.

Par l’épreuve de la foi, le voile se déchire, le Verbe de Dieu se manifeste et il faut remettre toute la création dans le Verbe. C’est ce qu’Adam aurait pu avoir à faire. Le faisant puis le refaisant, Adam aurait connu l’union transformante mais, au lieu de mourir, il aurait connu un mystère d’ascension. Dieu l’aurait transformé dans son corps spirituel et son corps serait entré au ciel dans un état céleste.

« Ce n’est pas qu’elle ne veut plus lorsqu’elle s’écrie : « Éloigne-toi, mon Bien-Aimé » mais elle ne voudrait pas Le recevoir dans la chair où elle ne peut pas encore en jouir parfaitement, parce que dans la chair on n’enfouit que peu et avec peine, mais c’est bien uniquement dans le vol de l’esprit et hors de la chair où on peut en jouir librement. Et c’est pourquoi l’âme dit « Éloigne-les, mon Bien Aimé » c’est-à-dire « Cessez de me communiquer tout cela, jusque dans la sensibilité de ma chair ». (Je vois ! Avant je ne voyais pas.)

« Comme si elle disait voilà que je m’envole de la chair afin que vous me les communiquiez hors de la chair, ces yeux divins étant la cause que je m’élève hors de mon corps, hors de ma chair. Et, afin de mieux faire comprendre quel est ce vol de l’Esprit, il faut remarquer que dans cette visite fulgurante de l’Esprit de Dieu, comme nous avions dit, l’esprit de l’âme est ravi (un rapt) avec une grande force à rentrer en relation avec l’Esprit-Saint. Et il abandonne le corps et il cesse d’y éprouver et d’y exercer ses actions, parce que toutes ses actions sont englouties en Dieu. C’est pourquoi saint Paul dit que dans le ravissement qu’il eût ici il ne savait pas si son âme était dans son corps ou s’il était hors de son corps » (2 Cor. 12, 2).

C’est extraordinaire cette description du vol de l’esprit, ce moment où l’esprit de l’âme est ravi, emporté, appelé à rentrer en relation avec l’Esprit-Saint avec une telle force qu’il abandonne le corps !

« Non pas qu’il faille entendre en cela que, dans ce passage, l’âme prive le corps de la vie naturelle, mais il faut entendre plutôt qu’elle n’y fait plus ses opérations. (Je ne fais plus aucune opération par moi-même). Et c’est pour cela que dans ces rapts et ces vols de l’esprit, le corps demeure privé de tout sentiment ; et quoiqu’on lui fasse, des choses de très grande douleur de l’extérieur, néanmoins il ne sent rien, car ce n’est pas comme d’autres transports ou pâmoisons naturels où on fait revenir les gens qui sont dans l’hystérie (mystico-dingo) à force de les torturer. »

« Ceux qui ne sont pas encore arrivés à l’état de perfection, mais qui cheminent encore dans l’état des progressants (3ème demeure), ont ces souffrances dans ces visites parce que ceux qui y sont déjà arrivés ont désormais la communication faite toute entière en paix et dans un amour suave. »

« Et ces ravissements s’espacent, s’estompent jusqu’à disparaître parce qu’ils ne sont finalement que des communications qui nous préparent à la grande communication totale. »

Petit à petit, de ravissement en ravissement, de communication en communication, nous progressons. Alors nous descendons très bas dans la déréliction et dans une soif infiniment plus grande qu’avant de retrouver les yeux du Bien-Aimé. Et il nous est donné à ce moment-là une nouvelle communication, puis un nouvel arrêt et puis nous voilà plongés dans une suavité encore plus grande. La mort laisse alors apparaître son secret de suavité et nous sommes à même de percevoir de plus en plus cette mort d’amour.

« Donc ce que l’âme dit ici du vol, ce qu’elle en dit, se doit entendre pour ravissement et extase de l’Esprit à Dieu et c’est pourquoi elle dit « Voici que je m’envole  »

Alors, la Voix de l’Époux se fait entendre et, puisque j’ai échappé à l’éternité du Verbe de Dieu, Dieu le Père et Dieu le Verbe vont me parler par la bouche de Jésus crucifié. Et voici qu’au sommet des monts (le Verbe) apparaît le cerf blessé au bois de la Croix, le cerf blessé d’amour qui nous dit :

 

13 (suite)  « Viens ma colombe, reviens !

« Car voici qu’au sommet des monts

« Apparaît le cerf blessé

« Savourant la brise fraîche de ton vol. »

 

C’est l’ouverture du Ciel dans le Cœur sacerdotal du Christ, dans le feu qui brûle son Cœur dans la Résurrection, qui devient alors pour nous le lieu habituel où nous aimons être, comme l’Esprit-Saint qui est notre brise d’Amour vient nous rafraîchir et élargir en extension les horizons du Corps mystique de Jésus. Ici, le sens de l’Église prend pour nous un sens plus profond et nous ne vivons plus seulement notre présence dans le Cœur de la Très Sainte Trinité par la foi, mais par la charité et la communion d’amour.

* Nous passons de la Très Sainte Trinité au Sacré-Cœur de Jésus.

Le cerf blessé, pris par le Mystère de la Croix, c’est Jésus Crucifié. Nous sommes devenus la croix du Christ. Or, un cerf blessé a une soif terrible. Et Jésus nous dit : « Viens, reviens, car sur la Montagne (Le Verbe) apparaît, le cerf blessé se désaltérant au souffle revivifiant de ton vol ». Le vol, c’est de recommencer à dire à Jésus : « montre-moi Ton Visage ». Et il faut découvrir, avec Marie, redécouvrir ce Face à face avec Jésus où Il se (re)dévoilera, Lui qui s’est caché, et que nous puissions dire notre fiat avec Marie Immaculée.

C’est ce Jeu extraordinaire de l’Amour qui va nous permettre, après avoir découvert notre corps spirituel, de l’harmoniser avec notre corps terrestre pour être ainsi au centre de l’univers, là où se trouve le Cœur Sacré de Jésus, le Tabernacle de la Très Sainte Trinité.

Nous devons être conscients que, selon l’importance et l’attention que nous portons à notre vie d’oraison, nous serons à même d’accélérer le processus d’union transformante. Sainte Thérèse d’Avila dit : « Donnez-moi quelqu’un qui fait oraison, en neuf mois j’en fais une sainte ». C’est par la qualité de notre vie d’oraison que Jésus pourra se dévoiler à nous et que nous pourrons ainsi trouver plus rapidement, au centre de notre âme, la Grâce de la présence de l’Immaculée Conception et la Présence corporelle et sacramentelle de Jésus.

Nous sommes alors touchés au centre de notre cœur, dans notre vision des choses, et nos écailles tombent, notre vielle peau tombe... c’est une mue complète... et nous sommes alors prêts pour être crucifiés. Nous l’offrons et l’acceptons, car nous comprenons que cette crucifixion ne touche finalement que l’erreur, que ce qui est faussé en nous et que cela doit être crucifié pour que l’identité de notre vocation apparaisse corporellement. Quand nous commençons à désirer cela, à aimer cette Croix, c’est notre vraie vie qui commence, la vie chrétienne.

Avec notre corps, avec notre cœur, nous sommes fiancés avec la Vérité, nous sommes fiancés au Sacré Cœur de Jésus, à son Corps… à la matrice immaculée de la Vérité de notre corps spirituel… et un Monde nouveau apparaît. Il nous appartient déjà dans ce passage des fiançailles.

Comment comprendre cette Parole mystérieuse de Jésus « Ne Me touche pas, Je ne suis pas encore monté vers Mon Père » ?

À l’heure de la Croix, la Vierge Marie s’est certainement souvenue de cette Parole de Son Fils, prononcée trois ans auparavant : « Femme, mon heure n’est pas encore venue ». Et maintenant Elle comprend que l’Heure est arrivée, que tout est accompli et achevé, et que les Noces de Cana, c’est maintenant pour nous, ses enfants. Alors, Elle accepte tout, Elle accepte la Croix pour nous. Elle accepte de mourir avec son Fils sur la Croix. Elle sait qu’Elle va mourir, qu’Elle ne peut traverser l’Heure de la Croix sans mourir. Même physiquement, Marie ne peut pas, puisqu’il y a ce lien si intime entre sa Chair et la Chair du Christ ; et s’Il meurt, Elle mourra aussi. Mais il y a aussi cette autre prophétie : « Un glaive Te transpercera le cœur ». C’est le Sacré-Cœur de Jésus qui saisit le divin Cœur de Marie à la Croix et qui fait qu’Elle ne meurt pas.

C’est un miracle d’Amour.

* La Transverbération est un miracle. Nous devons toujours nous en souvenir dans notre vie d’oraison.

Normalement, Marie n’aurait pu survivre à l’heure de la Croix, mais Jésus, à cette heure, répand dans le Cœur de Sa Mère tous les trésors de Sa gloire et demande à Marie de ne pas mourir, pour nous rendre héritiers de cette gloire. Jésus a pris chair en Marie, et cette union corporelle va jusqu’à la prise de l’âme dans sa substance et jusqu’au corps spirituel.

C’est cette Union qui nous met vraiment dans l’éternité, dans le vol de l’esprit. Ce vol de l’esprit fait que notre corps ne nous appartient plus : effectivement, nous n’éprouvons plus la sensation de notre corps dans ces moments de fiançailles. Nous touchons le Cœur de Jésus glorifié dans son instant d’éternité à la Croix et ce franchissement du seuil de la mort fait que, d’une certaine manière, nous n’avons plus peur de la mort. Mais nous devons vivre et mourir pour aller au Ciel, nous devons suivre Jésus qui s’est incarné et anéanti à la Croix.

Dans le processus du Monde nouveau, nous devons bien saisir ce double aspect que présente l’union transformante. D’une part, il y a cet appel du Cœur de Jésus qui nous aspire dans le feu de la Résurrection jusqu’à l’union totale avec Dieu ; d’autre part, il y a pour nous cette nécessité de nous enfoncer toujours davantage dans notre terre, de nous anéantir, de nous incarner toujours davantage (dans notre chair, dans le concret) pour la désagrégation du mal.

Notre charité devient alors vraiment surnaturelle et nous pouvons suivre Jésus dans le mystère de Son Incarnation, jusqu’au signe final de la Croix glorieuse.

Dans cette union stable avec le Christ, avec le Cœur de Jésus, dans le centre le plus profond de notre âme, c’est tout notre corps qui est aspiré dans cette unité profonde d’une quiétude absolue. « Alors, les jaillissements fulgurants d’Amour de Jésus nous élèvent parfois dans un ravissement étonnant et parfois nous plongent dans un désarroi absolu où les stades de la fulgurante participation à sa Gloire succèdent aux effrayantes purifications. Et survient alors en nous cette soif de feu plus inextinguible de voir de manière constante la Lumière du Visage de Jésus. »

Alors, nous pourrons commencer à « rayonner » (précisément dans cette 7ème demeure), pour la destruction du mal, mais uniquement par l’intermédiaire des anges exterminateurs et avec l’aide précieuse des Archanges.

À ce stade, ce n’est plus nous qui agissons par nous-mêmes :

C’est par notre humanité entièrement offerte que les saints Anges agissent, interviennent et rayonnent. Selon les desseins du Père, notre offrande, nos demandes, nos prières seront sélectionnées par l’Immaculée qui les présente au Sacré-Coeur de Son Divin Fils pour être spiritualisées par Dieu Lui-même afin d’aboutir à la désagrégation du mal, par l’intervention efficace de la Cohorte des saints anges et archanges.

Ce qui nous est révélé ici, est le processus du Monde nouveau, le processus d’intégration du corps dans l’union transformante qui respecte les sept demeures du Cantique spirituel de saint Jean de la Croix.

Pour parvenir à ce mariage spirituel qu’est la 7ème demeure, nous allons devoir accepter ce long temps des fiançailles qui suit les 4ème, 5ème et 6ème demeures où c’est l’Épouse qui va parler. (cf. les strophes 14 à 27)

 

 

N.B. cf. annexe n° 2 : « Parallèle entre les mystères du Christ et les 7 demeures de l'union transformante. »

 

 

CHAPITRE V

 

L’UNION TRANSFORMANTE AVEC SAINT JOSEPH

 

IMPLIQUE LA DIMENSION DU CORPS

 

 

Nous pourrions chercher à approfondir notre approche de l’union transformante en accentuant notre regard sur ce qui se passe dans l’union transformante avec saint Jean de la Croix, avec sainte Thérèse d’Avila et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.

- L’union transformante vécue avec saint Jean de la Croix, c’est très christocentrique c’est Jésus crucifié, c’est la Croix, c’est le Verbe qui s’incarne et s’anéantit, c’est la nuit.

- L’union transformante avec sainte Thérèse d’Avila, c’est très liturgique, c’est découvrir comment l’Esprit-Saint intervient dans les différentes demeures de cette union que nous avons dans le Christ avec le Père par la Grâce.

- L’union transformante que nous avons avec sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, c’est très marial, très enveloppant parce que c’est la voie de la toute petitesse, de la toute petite fille.

Mais à travers ces trois manières dont ces trois saints ont figuré, transfiguré, exercé, explicité l’union transformante progressive, nous allons tenter grâce à eux de découvrir à chaque fois un aspect très particulier de la manière dont notre corps est impliqué et pénètre dans l’union transformante.

Pour cela, nous allons regarder l’union transformante avec saint Joseph où le corps commence à jouer un rôle prodigieux.

Saint Joseph est présent sur le Golgotha, et son corps n’y est pas.

Nous devons tenter de percevoir cette « Présence-Absence » parce que dans la gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection, le Cœur de saint Joseph en son corps est devenu présent. C’est cette présence si concrète du corps de saint Joseph qui fait que notre corps peut être engendré de nouveau par la Première Personne de la Très Sainte Trinité en Marie.

 

1.    Les Âmes du Purgatoire

Parce que notre corps terrestre est capteur par rapport à tout ce que vit le monde cosmique, notre corps terrestre, actuel, est en relation avec tous les autres corps qui forment l’ensemble du corps cosmique, comme le dit le saint Père dans sa « Lettre aux familles ». Notre corps terrestre, lorsqu’il pénètre dans l’éternité vivante de la Paternité créatrice de Dieu, comme lorsqu’il pénétrera plus tard dans la Lumière de la Résurrection, devient un corps spirituel et il se trouve alors en relation vivante avec les autres corps du corps cosmique. Il peut alors capter, dans ce corps devenu spirituel, ce que vivent les âmes du Purgatoire dans leur foi ultime, dans leur espérance ultime et dans leur charité ultime.

Dans son livre sur les Âmes du Purgatoire, Monseigneur BRINCARD nous montre comment une petite paysanne vit, à travers son corps, ce que vivent les âmes du Purgatoire dans cette foi, cette espérance et cette charité ultimes qui est la leur (cf. : « Le Monde Nouveau ou Règne du Sacré Cœur »)

Notre purgatoire sur terre se fait avec notre corps terrestre si bien que la lumière surnaturelle de la foi ne peut aller jusqu’au bout de son acte parce que, dans notre corps terrestre, dans notre « nephesh », il y a beaucoup d’influences néfastes. Il en est de même pour la lumière surnaturelle de l’espérance et de la charité qui ne peuvent aller jusqu’au bout de leur acte ; tandis qu’au Purgatoire, la foi, l’espérance et la charité se déploient totalement et continuellement.

Ce qui est décrit dans ce livre est une extraordinaire indication sur la manière spécifique dont nous vivons de la foi, de l’espérance et de la charité, dans notre corps spirituel, dans un corps qui n’est plus opaque, dans un corps qui vient d’En-Haut.

Les âmes du Purgatoire sont les âmes les plus assoiffées et les plus brûlantes d’amour qui soient. Elles sont de ce fait beaucoup plus proches de nous que celles qui nous aiment le plus sur la terre. Elles font partie du Corps mystique du Christ. Elles vont d’abord dans la lumière d’étreinte d’Amour du Corps ressuscité du Christ, mais elles ne peuvent pas encore pénétrer dans cette tornade lumineuse d’Amour qu’est le Verbe, Lumière de Gloire. Leur corps terrestre n’est plus là, il est en terre, si bien qu’il ne peut plus jouer son rôle contraignant de limitation des exercices de la vie théologale.

Ce n’est pas pour autant souhaitable de vivre notre vie théologale sans le corps puisque, sans lui, il n’y a plus aucune augmentation de charité possible. C’est pourquoi lorsque, dans l’union transformante, on a atteint cette plénitude merveilleuse, Dieu nous demande de revenir, alors que nous pensions que c’était définitif.

Notre travail, dans la 6ème demeure, c’est de comprendre que nous devons intégrer notre corps spirituel, dès cette terre pour accéder au Verbe de Dieu. Ce serait dommage de faire cela au Purgatoire.

Lorsque la gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection brûle notre âme dans notre corps actuel, nous nous trouvons face à notre corps spirituel. C’est une étape importante dans le processus de la mise en place de notre corps spirituel.

Mais nous ne devons pas oublier que l’aspect fondamental du corps, c’est la cellule.

 

2.    L’aspect fondamental du corps

Le corps fondamental ne s’atteint pas comme un ensemble d’organes ni comme un ensemble de particules élémentaires. Dans le nouvel âge, on dira que le tout fait la substance, or un ensemble est une synthèse quantitative et non une source de substance. Pour le panthéisme de même, la source d’une réalité c’est son tout ; pour eux, la source de la réalité cosmique de l’univers, c’est son tout ; l’atteindre c’est atteindre la bodéité ; l’atteindre c’est toucher le « péras » de l’univers, c’est-à-dire le feu qui enveloppe l’univers dans son tout et qui fait qu’il se réalise comme univers ; de la même manière, le moyen terme par lequel le corps serait corps, c’est l’ensemble des particules élémentaires.

Non ! Ce n’est pas par l’enveloppant que l’on saisit fondamentalement le corps !

II ne faut jamais oublier que c’est toujours par l’aspect principiel d’une réalité que l’on peut éventuellement avoir accès à sa source d’actuation dont l’origine est l’Acte Pur qui est Dieu.

C’est pour cette raison qu’il est extrêmement important qu’on n’oublie jamais que l’aspect fondamental du corps c’est la cellule, tandis que l’aspect fondamental de l’univers c’est la matière.

L’ensemble des cellules de notre corps se renouvelle constamment ; une dizaine d’années est nécessaire pour renouveler tout notre poids cellulaire, et la grâce sanctifiante, respectant le rythme de la nature, a besoin de cette durée merveilleuse pour que notre corps spirituel soit totalement mis en place. Mais la grâce sanctifiante peut aussi aller plus loin qu’elle-même dans son principe, qui est l’Esprit-Saint. Celui-ci peut accélérer les principes de l’union transformante en brillant avec une ardeur plus rapide les cellules, dans une transformation où la grâce, qui habituellement respecte le rythme de la nature, se permet de s’effacer devant l’Esprit-Saint. C’est ce qui se passe dans la Transverbération (6ème demeure) où le corps est transformé par la grâce à une vitesse beaucoup plus grande que celle du rythme de la grâce respectant celui de la nature, grâce à une intervention directe du Verbe et de l’Esprit-Saint, dans le feu des ardeurs du Christ. C’est donc bien la dimension cellulaire dans notre corps qui fait rentrer ce dernier dans l’unité fondamentale de la « personne ».

Mais, dans le nouvel âge, où il faut prendre le tout corporel et essayer de s’en dégager, de s’en séparer, et cela peut se faire par des voies métapsychiques, médiumniques, parapsychologiques, préternaturelles, visionnaires, spirites, où se fait la transformation ? Pour la comprendre, on va être obligé de se rabattre non pas sur la biologie, mais sur la physique, c’est-à-dire sur la matière. Non pas sur le corps fondamental de l’homme, mais sur le corps fondamental du cosmos : d’où la perte du contact avec l’âme spirituelle et sa disparition dans un nouveau centre de gravité, l’énergie cosmique ou les lumières métapsychiques

En effet, il se trouve que la matière, formée dans le cosmos, est composée d’un certain nombre d’agrégats avec un noyau, composé lui-même d’un certain nombre de molécules, composées chimiquement d’atomes, composés eux-mêmes d’un noyau avec des électrons qui eux-mêmes dans les parties les plus élémentaires vont donner les quarks et les takions

À ce moment-là, on considère que les éléments de base de la matière qui constitue notre corps ce n’est pas la cellule, c’est quelque chose qui est au-delà de la matière : ce sont les phénomènes vibratoires de lumière. Or, cette lumière est quelque chose qui relève de la « phusis », de la forme, et non plus de la substance comme dans le corps de l’homme ! C’est cela qui fait toute la différence !

Or, voici que ces éléments de matière élémentaire s’interchangent à une vitesse prodigieuse et il ne faut pas dix ans, au niveau de la matière, pour être transformé. Dans deux heures, il n’y aura plus dans mon corps aucun élément de cette matière vibratoire qui y était présente il y a deux heures.

C’est le côté fascinant du nouvel âge qui cherche à nous mettre en phase avec le temps non spatial, avec les quarks et les takions ; ce qui fait que l’union transformante est immédiate, il n’y a plus besoin d’attendre dix ans. Il n’y a plus besoin non plus d’être crucifié, la guérison est absolue et immédiate. Mais les vibrations correspondantes ne sont plus en rapport avec l’esprit mais avec le vibratoire, avec des fréquences qui sont elles-mêmes en lien avec la lumière qui actue le diaphane cosmique. On met bien son corps dans un état primordial, mais on le met dans une dépendance totale vis-à-vis des puissances et des potentialités cosmiques.

C’est le processus contraire de la découverte du corps spirituel.

Et il ne faut pas oublier que ces vibrations et ces fréquences métapsychiques sont habitées spirituellement par les puissances intermédiaires.

À l’époque d’Adam et Ève on pouvait vivre en harmonie avec les vibrations non spatiales, avec un temps non spatial. C’est d’ailleurs pour cette raison que le corps d’Adam était en relation avec toute sa descendance. Mais depuis le péché originel, il y a une cassure dans notre corps qui fait qu’il y a une porte d’entrée avec les puissances qui sont tombées sur la terre dans notre cosmos et qui circulent dans le toboggan des fréquences métapsychiques.

 

3.    Place du corps dans le processus de l’union transformante

Mais pour trouver son corps spirituel, il faut passer par le Cœur Sacré de Jésus : c’est impossible autrement. Le Christ nous le dit « Nul ne peut aller au Père sans passer par Moi ».

L’union transformante passe par un état de dépendance absolue à l’égard de la Très Sainte Trinité. C’est la raison pour laquelle Jésus nous dit : « Nul ne peut aller au Père sans passer par Moi ». Dieu le Père opère en notre corps par le corps glorieux de saint Joseph, époux de l’Immaculée Conception ; Dieu le Fils opère dans notre monde par le Christ, et Dieu le Saint-Esprit opère dans l’Église par l’Immaculée Conception. C’est à chaque fois à travers l’unique Corps glorifié de chacune des Trois Personnes et au sein de l’unité sponsale que forme leur Corps glorifié où se produit une transverbération où c’est le Verbe seul qui unifie personnellement les Trois dans la Lumière de gloire.

Dans la 1ère demeure, nous prenons conscience de notre péché et nous avons la volonté d’en sortir : c’est la conversion avec notre corps terrestre, de notre être de chair.

Notre corps, devenu sain dans la 1ère demeure, se rassemble à la recherche de son principe, de sa vivante identité, de son innocence divine, dans la 2ème demeure, où on essaie d’être plus humain, de rechercher la signification sponsale, la signification humaine et profonde de notre corps. Mais notre corps est encore blessé par le péché originel et il a besoin de retrouver son identité de corps ; et le seul moment où notre corps a été un corps, à titre de corps humain « authentique », c’est lorsqu’il était dans le premier instant de sa création, dans notre innocence divine, avant qu’il ne soit frappé par le péché originel.

Combien ne devons-nous pas rechercher cet Amour de Dieu le Père ! Cet amour est déjà présent au centre de notre âme unie à notre corps dès l’origine, dans notre croissance de vie, éclaboussée par le péché originel, oubliée et pourtant toujours vivante ! À cet instant, nous sommes mis corporellement en présence de Dieu le Père qui nous a donné notre âme spirituelle et, comme c’est corporellement, il y a une proximité par la grâce avec saint Joseph. Nous découvrons comment Dieu le Père passe par une grâce de sponsalité avec l’Immaculée Conception qui passe de fait par saint Joseph « N’hésite pas à prendre chez toi Marie » pour que nous puissions vivre l’union transformante.

Nous descendons du Temple (notre corps originel) jusqu’à Nazareth où nous spiritualisons notre corps actuel dans l’intimité du « Beit » avec l’Immaculée Conception.

Dans la 3ème demeure, il nous faut découvrir notre corps originel qui n’est plus un corps « éclaté » mais un corps « rassemblé » et qui nous met aux portes du repos : c’est la demeure de l’illumination qui nous conduit à l’oraison de quiétude dans la 4ème demeure où la grâce sanctifiante peut commencer à agir elle-même surnaturellement à travers notre corps en rassemblant toutes les puissances de celui-ci.

Dans cette 4ème demeure, l’Esprit-Saint peut commencer à nous transformer et à dilater tous les horizons de notre corps dans le Corps Mystique. À ce moment-là, nous sommes tous engloutis, à travers notre corps, dans le Corps mystique de Jésus (les sacrements) et par Lui, dans le feu qui brûle le Cœur de Jésus dans la Résurrection dans l’éternité.

Nous sommes alors liés par la grâce et nous pouvons passer de l’innocence d’origine à l’innocence d’immaculation.

Nous commençons à rentrer dans la sainteté de la grâce qui caractérise la 5ème demeure.

C’est une étape importante où nous sommes liés plus profondément à Jésus, à Marie, aux sacrements, où notre corps se lie au Corps Mystique du Christ, et par Lui, dans la gloire qui embrase le Cœur de Jésus dans la Résurrection dans l’éternité. Notre corps rentre ainsi dans le processus de la spiritualisation, se mettant en relation, par l’union, avec son corps de résurrection.

Saint Joseph est là présent qui nous fait descendre dans le cœur même de notre corps originel, là où il y a cette rencontre avec la mère, avec le père ; parce que c’est bien de découvrir son corps originel, mais il faut s’enraciner dans le creux du père et la tendresse de la mère, et c’est l’œuvre de l’Esprit-Saint en nous. Nous devons beaucoup prier l’Esprit-Saint parce que nous ne pouvons pas réaliser cela par nous-mêmes.

Dans ces épousailles avec Jésus, la signification sponsale de notre corps va rejoindre ce qui existe de sponsal dans la signification du Corps de Jésus. Dans cette profonde nudité intérieure qui est la nôtre à ce moment-là, va se produire une conjonction, une étincelle où notre corps rencontre le corps ressuscité du Christ. C’est vraiment la période des fiançailles. Cette fulgurante présence de la résurrection est propre à la vie chrétienne. Nous devons bien reconnaître que, sans la présence de Marie à nos côtés, on ne comprendrait pas. Quand Marie est là, présente à l’instant de la Résurrection, Elle a réellement connu cette fulgurance, ce tremblement de terre, ce séisme extraordinaire de tout son corps. La partie physique de son corps a vécu comme une rupture, une dislocation, il y a eu cet aspect fulgurant dans l’ordre de la Lumière : un ange sacerdotal apparut, ayant l’aspect de l’éclair. Et Marie a cristallisé la lumière chaude et chaleureuse dans l’océan de ses grâces de compassion : c’est cela la signification littérale du Nom de Marie.

Dans la cristallisation de la lumière chaude, caressante, de la fournaise omniprésente de la Résurrection, c’est bien le corps de Marie qui a été touché mais uniquement dans la partie de la transverbération, dans la partie béante de son cœur ouvert. C’est cela qui donne à Marie la possibilité d’être présente partout où l’océan de gloire du Christ fait éclater les limites du spatio-temporel. C’est le passage « de l’égersis à l’anastasis ». C’est le relèvement du Christ dans le corps de Marie et, par sa médiation, dans le corps de l’univers. À ce moment là, grâce à elle, Jésus peut enfin passer de ce monde à son Père. Quand Jésus dit « Ne me touche pas, je ne suis pas encore monté vers le Père », il veut nous montrer qu’il est ressuscité à la fois pour Marie (égersis) donc pour nous, et pour son Père (anastasis).

On touche ici le mystère de l’union transformante quant au corps.

Comme l’Immaculée Conception épousant avec son corps le nouvel Adam glorifié, nous comprenons qu’il ne peut pas y avoir unité sponsale sans qu’elle implique une possibilité de fécondité.

Le mystère de Marie Reine apparaît, se révèle à nous, et nous introduit grâce à saint Joseph dans ces épousailles mystiques avec le Christ.

De ce mariage mystique, va pouvoir être fécondé, comme l’enfant surabonde de la fécondité de l’unité sponsale, un nouveau corps animé, notre corps spirituel.

Notre corps spirituel est engendré par le mystère de l’Assomption qui assume en son sein le mystère des épousailles de Nazareth en le transformant en un mystère d’épousailles éternelles, un Nazareth éternel. À ce moment-là, il y a une nativité de notre corps spirituel engendré dans l’éternité glorieuse. Et nous pouvons commencer d’habiter cet aspect nouveau de notre corps et le mettre en harmonie avec ce mystère glorieux d’épousailles par la foi et la charité, autant que cela nous est possible.

C’est de là, dans cette 6ème demeure, que nous serons plongés dans le Cœur eucharistique et mystique de toute la Jérusalem céleste, brûlés par la présence de la grâce, de l’Esprit-Saint, et enveloppés par le corps glorieux de saint Joseph, fécondité incarnée du Père pour nous. Nous sommes engloutis tous ensembles dans le Sacré-Coeur de Jésus. Nous pénétrons par la Plaie et nous sommes, à ce moment-là, face à notre corps spirituel.

Puis c’est le passage de la 6ème à la 7ème demeure, l’harmonisation de notre corps terrestre avec notre corps spirituel. C’est l’harmonisation finale de tout notre être dans le processus de l’union transformante.

À ce stade de l’union transformante, l’immaculation est totale, la désagrégation du mal définitive, le rayonnement du Sacré-Cœur absolu. C’est aussi le lieu de la royauté de Marie-Reine car, sans la Grâce de l’Immaculée Conception, il nous serait impossible de pénétrer avec notre corps terrestre dans l’union transformante.

 

CHAPITRE VI

 

LA DERNIÈRE ÉTAPE DE L’UNION TRANSFORMANTE

 

 

À partir du moment où on a trouvé son corps spirituel, on peut s’aventurer dans tous les mystères du Verbe incarné et glorifié.

 

14   « Mon Bien-Aimé, les montagnes,

« Les solitaires et ombreuses vallées,

« Les îles étrangères,

« Les fleuves au bruit puissant,

« Le sifflement des vents porteurs de l’amour. »

 

Le Verbe, ce sont les montagnes, les solitaires et ombreuses vallées, les îles étrangères, les fleuves au bruit puissant, le sifflement des vents porteurs de l’amour. Parce que nous sommes enfin dans notre corps spirituel que nous venons de découvrir et que nous allons apprendre à habiter, nous sommes à chaque découverte comme immergés dans un nouveau repos, une nouvelle saveur, un nouveau havre. Nous pénétrons progressivement dans notre lieu d’éternité, dans :

 

15   « La nuit accoisée (profonde, intense)

« Qui laisse deviner l’éveil de l’aurore.

« Le concert silencieux,

« La solitude sonore, (la solitude habitée)

« Le souper qui recrée et qui énamoure. »

 

Nous pouvons lire toutes les strophes suivantes (15 à 27) dans cette lumière du corps spirituel. Il nous faut demander à l’Esprit-Saint de nous aider à relire saint Jean de la Croix dans cette perspective là.

Dans la 6ème demeure, on touche Dieu mais c’est dans la nuit totale, la nuit accoisée, la nuit de la foi.

1.    Commentaire de saint Jean de la Croix :

« Avant que d’expliquer ces deux couplets, pour les mieux entendre ainsi que ceux qui suivent, il faut savoir que dans ce vol de l’esprit que nous venons de dire est indiqué un état très élevé d’union d’amour, où après un grand exercice spirituel. (il faut faire oraison et descendre dans la substance même du cœur, de l’âme et du corps, là où le silence est total, la solitude sonore, là où est la grâce) Dieu a coutume de mettre l’âme, lequel état on appelle fiançailles spirituelles avec le Verbe Fils de Dieu. Ce vol de l’esprit va marquer pour la première fois nos fiançailles spirituelles avec le Verbe Fils de Dieu, et au commencement que cela se fait, Dieu va communiquer à l’âme de grandes choses « in se » (en soi), de manière substantielle (ousia), l’embellissant alors de grandeur et de majesté et l’ornant de dons et de vertus et le revêtant de connaissance et d’honneur de Dieu comme une fiancée au jour de ses fiançailles »

C’est l’ousia qui est ornée (les substances) car tout ne s’arrête pas à l’ousia. L’ousia rayonne et son rayonnement est imbibé du rayonnement même de Dieu.

« En ce jour bienheureux, non seulement ces angoisses véhémentes et ces plaintes amoureuses dont l’âme était auparavant travaillée prennent fin (on est dans l’union transformante) ; mais demeurant parée des biens que je dis, elle commence un état de paix quant à la substance. »

Tout ce qui n’allait pas était quant aux accidents, ce n’était pas quant à la substance ; cela veut dire que c’était inessentiel.

C’est dans la substance que l’on trouve la porte d’accès à la substance même de notre corps, de notre âme et de notre esprit, de notre rencontre avec Dieu par la foi. Notre acte se lie à l’acte pur.

C’est pour cela que cette rencontre avec le Verbe, Fils de Dieu, demeure très nocturne du côté de la nature.

« Et cependant perdure un état de paix, de suavité d’amour quant à la substance où elle ne fait que conter et chanter les grandeurs de son Bien-Aimé, lesquelles grandeurs, elle commence à les découvrir non plus accidentellement, mais essentiellement, substantiellement, actuellement. Et ainsi dans les autres couplets elle ne parle plus de ses angoisses comme elle faisait auparavant, elle ne parle plus que de communication, d’exercice doux et pacifique d’amour avec son Bien-Aimé, parce que dans cet état tout le reste a pris fin. Il faut remarquer que dans ces deux couplets est contenu tout le plus que Dieu a coutume de communiquer dans ce temps-là à une âme qu’Il s’est prise pour toujours. Mais on ne doit pas entendre que toutes celles qui parviennent à cet état reçoivent tout ce qui est déclaré dans ces deux couplets, ni de la même manière, ni avec la même mesure d’intensité ou de connaissance ou de feu, parce que, à quelques âmes on en donne d’avantage, à d’autres un peu moins, à celle-ci d’une certaine façon, à celle-là d’une autre façon, bien que dans cet état d’union de fiançailles (où le Verbe nous prend pour toujours, où la promesse est totale, elle va jusqu’au corps, elle concerne vraiment tout), mais on met ici le plus qu’il puisse être mis par la communication d’Amour surnaturel, afin que tout y demeure compris et dont voici l’exposition. »

C’est merveilleux ! Lorsque nous rentrons dans la substance même de notre âme, si vraiment on veut que notre oraison soit une rencontre d’amour total avec Jésus seul, exclusivement pour toujours, nous pouvons lire ces couplets. Même si nous ne voyons rien sur le plan de la nature, sur le plan des accidents, quant à la substance, nous vivons vraiment ceci d’unique

« Mon Bien-Aimé, les montagnes, les solitaires et ombreuses vallées, la nuit accoisée, le concert silencieux, le souper qui recrée et qui énamoure ». Vois ici la substance de ce qui est contenu dans les deux couplets dans lesquels l’épouse (la personne toute entière épousée par le Verbe glorifiant dans son corps tous les corps) dit que son Bien-Aimé est toute chose, toutes ces choses en soi, qu’Il est cela éternellement, pour Lui-même, en Lui-même, substantiellement, actuellement, qu’Il est tout cela pour elle parce que, en ce que Dieu a coutume de communiquer en de semblables transports d’esprit, l’âme éprouve et connaît la vérité de ce que disait saint François d’Assise :

« Mon Dieu, Tu es mon tout », et parce que Dieu est le tout pour l’âme, le bien de la communication, ce transport se déclare dans les couplets suivants par la similitude de la bonté des choses » comme nous l’expliquerons en chaque vers.

Par exemple, « Les montagnes sont hautes et abondantes, amples, belles, gracieuses, florissantes, odoriférantes et mon Bien-Aimé, le Verbe, est pour moi comme ces montagnes, haut, abondant, ample, beau, florissant et mon Bien-Aimé, le Verbe, est pour moi ces montagnes. Les vallées solitaires sont agréables, fraîches, ombreuses, abondantes en eaux douces. Dans la variété de tous ses fruits et le doux ramage des oiseaux, elles donnent une grande récréation, une immense détente, une délectation des sens : bref, elles procurent un rafraîchissement, un repos dans leur solitude, leur silence. Mon Bien-Aimé, le Verbe, est pour moi toutes ces vallées. Les îles étrangères entourées de mer au-delà des mers, fort éloignées de la communication des hommes. Les fleuves aux bruits puissants. » (Tous les attributs divins sont là.).

 « Les fleuves ont trois propriétés, la première qui est d’investir tout ce qu’ils rencontrent et de le noyer, la seconde qui est de remplir tous les lieux, bas et vides qui se trouvent sur leur voie, de les engloutir, et la troisième qui est d’émettre un bruit si fort, par exemple au moment des cataractes, qu’ils étouffent tout autre son autour d’eux. »

« Et parce que dans cette communication de l’Aimé, l’âme sent en Lui très savoureusement ces trois propriétés simultanément, (le calme des océans et en même temps les torrents des chutes du Niagara avec ce bruit spectaculaire qui les caractérise, et puis en même temps le rafraîchissement des vallées où nous sommes complètement engloutis et comblés comme l’éponge est comblée d’une suppléance totale dans tous ses vides), le Verbe est pour moi pareil à ces fleuves au bruit puissant. »

C’est très beau !

« Le sifflement des vents porteurs de l’amour. »

De temps en temps, voici un nouveau sifflement qui nous permet d’aller encore plus loin dans les élargissements de notre corps, de notre âme et de notre intimité, dans notre découverte du Verbe dans l’oraison. Et effectivement, de temps en temps, il y a une nouvelle action de l’Esprit-Saint. Dans ces moments-là, lorsque nous sommes en prière ou dans un état d’union intérieure parce que nous sommes retenus par des nécessités accidentelles et inessentielles, nous entendons brusquement ce petit coup de sifflet.

Tous les mystiques entendent ce coup de sifflet qui est l’œuvre de l’Esprit-Saint en nous ; alors il nous faut revenir à l’oraison et apprendre à obéir de plus en plus promptement à ce que vient de nous suggérer l’Esprit-Saint.

C’est ce mystère d’épousailles avec les Dons du Saint-Esprit qui fait que l’Esprit-Saint creuse en nous progressivement cette aptitude d’obéissance qui va nous conduire sur les chemins de l’union transformante.

 

2.    Le passage aux fiançailles nous introduit dans notre corps spirituel.

Les fiançailles sont un moment clé dans le processus de l’union transformante. Quand nous sommes complètement dans la grâce de Dieu (ce que symbolise le chiffre 5), nous avons acquis cet habitus de l’oraison et pourtant, nous ne parvenons plus dans l’oraison à être complètement engloutis en Dieu. Nous perdons le goût de l’oraison. C’est un peu humiliant, la 5ème demeure, alors nous nous projetons dans beaucoup d’activités pour Dieu. Nous allons beaucoup « faire » pour Dieu. Nous vivons alors une sorte de purification de notre mémoire, de la mémoire de notre identité, qui nous fait passer de la mémoire de soi en Dieu à la grâce.

Pour sainte Thérèse d’Avila, saint Jean de la Croix et toute la tradition des docteurs spirituels de l’Église, la 5ème demeure est vraiment l’étape transitoire où nous passons de la mémoire de Dieu en nous, c’est-à-dire de notre innocence divine, au Corps mystique. C’est pour cette raison que nous devenons très actifs. C’est la seule manière que nous avons de traverser ce cap difficile sous l’action de la grâce. Il y a une espèce d’éclatement extraordinaire qui fait que nous allons nous déployer dans un éventail d’activités diverses, que nous allons nous donner dans toutes sortes de missions pour échapper à cette impression que nous perdons pied, dans l’oraison. Et pourtant nous sommes liés à Dieu, et c’est grâce à ce déploiement d’activités en quelque sorte que notre corps va s’intégrer de manière concrète au Corps mystique de l'Église.

Nous ne pouvons pas passer aux fiançailles, c’est-à-dire de l’ancien au nouveau Testament, si tout le Corps mystique n’est pas intégré dans notre corps.

Ces passages du Cantique Spirituel sont comme un chant où nous découvrons notre corps de l’intérieur, dans son aspect fondamental.

Nous comprenons que notre être émane de l’Acte Pur de Dieu, du Créateur, qui unit l’esprit à la matière et que cette union intervient au niveau le plus élémentaire de la matière : c’est ce que nous révèle la sagesse naturelle. Mais il existe aussi une sagesse de grâce qui est une sagesse vivante parce que la grâce est une lumière vivante qui actue le diaphane spirituel de notre présence en Dieu. Mais notre âme est aussi une source de lumière vivante.

Notre âme, c’est ce qui fait l’unité de notre intériorité, corporelle, spirituelle et sensible. C’est une unité vivante de lumière. La grâce est cette lumière vivante, source de lumière vivante qui émane de l’intériorité des trois Personnes de la Très Sainte Trinité et en fait l’unité. La grâce c’est de la vie.

L’acte créateur de Dieu porte sur l’être en acte et va se lier à l’aspect corporel de mon corps par la matière élémentaire, tandis que la grâce, elle, va pénétrer dans mon corps par l’aspect le plus élémentaire du corps vivant de l’homme qui est la cellule. Ceci montre bien que si Dieu a appelé l’homme à la grâce, la grâce n’est donnée que dans la cellule ; c’est donc là que nous devons chercher l’acte créateur de Dieu quant à l’être et à la vie (donation de l’âme spirituelle dans la première cellule). C’est bien l’aspect de notre innocence divine fondamentale qui est concerné ici et qui séjourne au niveau de la cellule et pas au niveau de la matière, des atomes. Mais cette grâce ne prend pas le corps tout entier, c’est pourquoi on va avoir besoin de la grâce du Christ pour que notre corps tout entier soit pris. C’est pour cela qu’il y a toutes les purifications que nous avons vues (PPP.l - PPP.2 - PPP.3). C’est là que notre âme spirituelle vient inonder et unifier notre corps. Si nous voulons vraiment prendre conscience du centre vivant de notre corps et l’habiter par l’esprit, par l’intelligence, par la contemplation de nous-mêmes, nous devons descendre jusqu’à l’aspect fondamental de notre corps pour y parvenir qui est la cellule et non pas tes organes (on ne va pas descendre dans notre cœur, ce serait psychologique). II ne faut pas dire que l’âme spirituelle nous est donnée quand il commence à y avoir des organes, même si c’est l’esprit de la loi en France et même si, mystiquement pour certains chrétiens, la vie spirituelle de l’union transformante c’est la philocalie ou prière du cœur où l’on se met au rythme des organes : tout l’hésychasme est basé sur le rythme cardiaque, sur la respiration, sur les ondes cérébrales alpha et bêta, mais il y a danger de s’ouvrir tous les centres corporels, les chakras. C’est une forme subtile de la transformation de la grâce en énergie. C’est pour cela que dans la tradition hésychaste, on n’a pas le droit de pratiquer la prière du cœur si on n’est pas surveillé tous les jours par son père spirituel.

Pour le saint Père, c’est l’unité sponsale qui produit ce nouvel être biologique et c’est le poids ontologique de cette unité sponsale qui laisse place au corps originel, par l’Acte créateur, dans une transformation de « devenir substantiel » : c’est la première transformation du corps, la première présence spirituelle vécue de la personne humaine commençante. Et comme la grâce suit la nature, c’est forcément là qu’il y a « l’image et ressemblance de Dieu ». C’est la pensée officielle des évêques de France, c’est la pensée du Pape ; mais comme cela n’a pas été formulé dogmatiquement, on ne peut encore, hélas, en discuter sur le plan théologique. La deuxième hypothèse serait les organes, et, le premier organe à paraître, c’est le cœur. Le passage au blastocythe, du 1er au 18ème jour pour voir battre les premiers mouvements du cœur, serait par ailleurs très intéressant à étudier car le corps est comme une Bible.

Il est vital pour nous de comprendre qu’il nous faut absolument apprendre à habiter notre corps d’innocence pour pouvoir, de lui au Corps mystique, aller à la découverte de notre corps spirituel.

Il est très important de comprendre ce que le saint Père nous demande quand il nous dit qu’il faut absolument découvrir notre corps spirituel face à notre corps terrestre pour établir le monde nouveau ! Cela fait plus de quinze ans qu’il nous le demande constamment, qu’il nous demande de découvrir la signification sponsale de notre corps. Dans l’histoire de l’Église, aucun pape, aucun docteur de l’Église n’a jamais parlé de cela ; et c’est pourtant très important parce qu’il faut éviter de rentrer avec le New-Age, dans la manifestation des énergies qui se situe au niveau des organes, ce qu’ils appellent le corps éthérique. Or, le corps éthérique est le fruit d’une déchirure, c’est un corps fabriqué.

Dans la première cellule, on peut faire l’induction d’une source de vie parce que, au milieu de ce complexe physico-chimique, il y a des déterminations vitales, il y a une source vitale biologique qui est une cellule humaine d’un être humain. Il y a en même temps une source d’animation et une mémoire génétique qui est en continuité avec les déterminations psychiques ultérieures. On ne peut pas dire qu’à un moment donné il y a une âme qui va donner la place à une autre âme (position de saint Thomas) puisque justement il y a une continuité.

De la présence de Dieu, en tant que Père, donateur de vie dans notre corps, nous n’en avons plus la mémoire parce que nous n’avons pas l’expérience de cette expérience initiale aujourd’hui, mais nous en portons encore la marque dans tout notre corps, bien que cette marque soit camouflée par le péché originel. Dans l’innocence originelle, on est un buvard incroyable ! Alors dans l’union transformante nous allons avoir à transpirer cette encre noire. Il va falloir qu’elle ressorte par transpiration dans la 6ème demeure au niveau de notre corps ; c’est pourquoi c’est la nuit, c’est très nocturne, à la fois très profond et très éprouvant pour nous. (Nicodème est venu voir Jésus de nuit).

C’est finalement, dans cette nuit-là, dans cette prise de conscience que nous faisons de la présence des séquelles du péché originel jusque dans notre corps, que nous pouvons réellement rencontrer l’Époux, Jésus corporellement ressuscité dans un monde nouveau spirant l’Esprit-Saint. Nous avons découvert notre corps originel et maintenant nous allons devoir le spiritualiser afin qu’il puisse se répandre dans une agilité concrète d’amour, dans le rayonnement de la charité glorieuse du Christ, dans le règne du Sacré-Coeur. Il va falloir produire des actes incarnés, multiplier des actes de charité concrète, afin qu’il y ait un engagement fondamental de tout notre corps dans des actes concrets d’amour. Ce n’est pas « éthique », il y a quelque chose de physique et de métaphysique dans ces considérations.

Pour que nous puissions accomplir un véritable acte de charité concret, en étant vraiment présent à l’autre physiquement, avec notre corps, nous devons être nous-mêmes comme effondrés dans notre propre identité d’origine, là où nous sommes enfant du Père, directement, primordialement.

Et c’est de là que réellement, vitalement, la grâce peut pénétrer en nous. À ce moment-là nous sommes mis en face de notre corps spirituel, par la médiation du Corps mystique. Notre corps, mis ainsi en contact avec le Corps mystique de l'Église, grâce aux actes qu’il pose dans la charité concrète et simple et grâce aux sources de ces actes dans les sacrements, réceptionne réellement et physiquement le Corps mystique de l'Église.

C’est là que notre corps trouve sa modalité finale, celle qu’il aura définitivement dans la Résurrection. Il est en face, prêt pour le mariage spirituel, parce que nous sommes retournés à la source, jusque dans le point de vue de notre innocence divine, de notre mémoire corporelle de Dieu, c’est-à-dire de la mémoire de cet instant où Dieu a été vitalement présent, dans l’instant de son acte créateur quant à la donation de l’âme.

On touche ici une modalité d’entrée dans l’unité sponsale très extraordinaire (pour ceux qui sont mariés) qui est plus que de la virginité. En effet, dans l’unité sponsale, l’innocence divine corporelle est tellement agile qu’elle peut rejoindre physiquement l’innocence divine fondamentale du corps de l’autre. À ce moment là, l’unité sponsale est absolue, quant à la chair dans une humanité intégrale. Le sacrement de mariage atteint là un rayonnement irrépressible. C’est ce qui se passe avec Jésus dans l’union transformante car le mariage s’effectue dans l’innocence divine.

C’est pourquoi c’est si important aujourd’hui de savoir quand a lieu l’acte créateur de Dieu quant à la donation de l’âme parce que cela change tout par rapport au nouvel âge et par rapport à l’Antichrist.

L’union transformante, c’est le repos, le lit ; mais cette unité de l’époux et de l’épouse reste quelque chose de très vivant.

 

16   « Notre lit est tout fleuri,

« Environné d’abîmes et des forces du lion,

« Coloré d’une teinture pourpre.

« Édifié dans la paix,

 

L’édification pacifique de mille écus d’or avec une couronne c’est la fécondation du corps spirituel avec la couronne du Sacerdoce royal qui nous fait régner à travers la charité mariale (les écus d’or) dans le rayonnement de l’Immaculée Conception (symbolisé par le chiffre 1000). Or cette couronne est édifiée dans la paix, c’est-à-dire dans l’unité avec l’humanité glorifiée de Jésus, le Verbe, inséparé de celle de Joseph le Juste.

 

17   « À la quête de Ta trace,

« Les jeunes filles courent sur le chemin,

« Sous le choc de l’étincelle

« Du vin aromatisé,

« Comme des parfums nés d’un baume divin. » (dérivé des cieux)

 

Les cieux c’est la simplicité, l’éternité, la perfection, la surabondance de Dieu dans son essence.

 

18   « Dans le secret du cellier

« De mon Aimé j’ai bu, et quand je sortis,

« Parmi toute cette plaine,

« Plus ne savais chose aucune,

« Et je perdis le troupeau jadis suivi. »

 

« Dans le secret du cellier », cela veut dire dans le secret du Cénacle, dans le secret du Sacré-Cœur de Jésus, dans le secret de notre corps tout petit, tout pauvre, dans le secret des catacombes, dans le secret du Cœur Immaculé de Marie, dans le secret du silence sonore de saint Joseph et de son corps glorifié.

À partir du moment où notre corps s’effondre par la grâce de l’union transformante, dans la source qui anime, du centre de toutes ses cellules, le corps ressuscité du Christ, dans le secret du cellier de notre Bien-Aimé, nous venons boire à la miséricorde du Père, corporellement.

L’entrée dans les fiançailles, c’est tout tendu vers l’ultime ; et sur le plan humain, cela se caractérise par la nuit totale de l’esprit. Il n’y a plus que le corps. La nuit de l’esprit, c’est vraiment une nuit pour l’âme. Il n’y a plus que Dieu. Nous ne sommes plus sensibles à ce que nous ressentons, nous ne sommes pas dans l’indifférence, mais au-delà du sensible. Nous sommes engloutis en Dieu, dans le secret du cellier, nous sommes sortis de ce monde et nous sommes dans un monde nouveau.

Au niveau terrestre, on est dans une impuissance totale, on est dans la nuit. Ce n’est pas qu’on ne veut pas, c’est qu’on ne peut pas. Et même si on voulait, même si on pouvait, les autres ne veulent pas, le corps ne veut pas, l’âme ne veut pas, le monde ne veut pas, même notre psychisme ne veut pas. C’est là qu’il y a des phénomènes psychosomatiques assez impressionnants. Il ne faut surtout pas aller voir le médecin car c’est la grâce qui travaille. Il faut bien distinguer les maladies névrotiques ou cyclothymiques qui viennent de névroses antérieures, qui sont psychologiques, de celles qui viennent de l’union transformante.

C’est très important !

Extérieurement, il est vrai qu’elles se ressemblent beaucoup mais dans la nuit de l’esprit il y a quelque chose d’extraordinaire ! Dans cette nuit, on n’a aucune compensation temporelle, on ne se rappelle même plus les grâces que Dieu nous a données et qui nous étaient nécessaires pour rentrer dans le cellier des fiançailles. Pour nous, ces grâces étaient quelque chose de faux, de charismatique ; et c’est vrai ! On ne peut plus se raccrocher à rien, pas même à l’oraison, ni au monde fraternel, et on croit que Dieu nous a abandonné. Les neuvaines irrésistibles et tout ce qui relève du mystico-dingo, tout cela ne marche plus.

C’est très impressionnant, car c’est dans un tel contexte que saint François d’Assise a reçu, dans la 6ème demeure, la transVerbération.

C’est vraiment le Cœur de Jésus qui bat dans ma poitrine, pas seulement symboliquement, imaginativement ou même par la grâce, c’est le corps qui est atteint dans la transverbération. C’est le Verbe de Dieu qui vient physiquement ouvrir mon corps organique. Si mon corps veut participer à l’union transformante, c’est parce que le Verbe de Dieu va surgir aussi sur l’aspect fondamental du corps, pas seulement sur l’aspect biologique, physiologique du corps.

Le Père Garrigou-Lagrange dit que tous les hommes sans exception n’auront accès à l’entrée dans la vision béatifique que s’ils passent intégralement et définitivement jusqu’au fond des derniers prolégomènes de l’union transformante « Soyez parfait comme votre Père céleste est parfait ». Celui qui ne sera pas allé jusque là ne pourra pas entrer dans la vision béatifique avec l’Immaculée, il le fera ailleurs, pas dans une nouvelle vie (réincarnation), mais sans son corps, c’est-à-dire au Purgatoire. Il faut bien réfléchir à cela !

Heureusement qu’il y a notre corps parce que, grâce à lui, non seulement il peut y avoir la transverbération du cœur mais surtout il y a cet aspect fondamental du corps qui découvre son corps spirituel. C’est pour cela que c’est une transformation au centuple.

 

19   « Là, son Cœur Il me donna ;

« Il m’apprit une savoureuse science. (connaissance)

« Moi, je me donnais vraiment (dans un vrai don)

« À Lui, sans rien excepter (c’est cela la nuit de l’esprit où tout est détruit)

« Et là je lui promis d’être son épouse. » (je suis le Verbe de Dieu)

 

C’est Là que je Lui promis d’être son Épouse. (Je suis le Verbe du Père)

 

Tout est détruit autour de nous, nous ne vivons plus que de cette volonté, jusqu’en notre corps, de participer à l’union transformante. Le Verbe de Dieu va pouvoir alors surgir sur l’aspect fondamental de notre corps. C’est cela, la nuit de l’esprit. C’est ce moment essentiel, ce moment où tout est détruit, où nous sommes dans un état végétatif, où ne demeure plus que cette nuit de l’esprit, que nous choisissons pour Lui promettre d’être son Épouse. C’est très beau. !

 

20   « Mon âme s’est employée

« Avec son domaine entier à son service, (de toutes ses forces)

« Je ne pais plus de troupeau,

« D’autre office je n’ai plus,

« Je n’ai plus d’autre œuvre que celle d’aimer. »

 

Si on n’a pas l’habitude de faire oraison, c’est dramatique ! !

On voit Dieu dans toute sa grandeur, son éternité, son immensité, sa fulgurance d’amour, et le mariage avec Lui se fait dans les toutes petites choses, dans les moindres détails. À chaque instant c’est l’allumette ramassée avec un amour éperdu, c’est l’aiguille, c’est le cheveu sur le cou. L’Amour est «en acte » tout le temps.

Nous n’avons plus d’autre travail que celui de l’amour, d’autre cœur à aimer que d’aimer absolument, totalement, substantiellement. Nous rejoignons là toute la vie spirituelle de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. C’est cette phrase « Je n’ai plus d’autre œuvre que celle d’aimer » qui a été à l’origine de sa conversion. C’est pour cette raison qu’elle est patronne des missions, car c’est le sens profond de la mission chrétienne qui nous est révélé là.

 

21   « Que si donc au pré public,

« De ce jour nul ne me voit, nul ne me trouve,

«  Dites que je suis perdue ;

« Et qu’allant énamourée, (l’amour à l’intérieur de l’amour)

« Je me suis faite perdante et j’ai gagné. »

 

Nous avons tout gagné parce que nous avons tout perdu. C’est génial !

Nous nous sommes faits perdants et nous avons gagné :  Le Verbe

L’amour

La liberté

Notre corps

La grâce

La sainteté

Tout ce que nous désirions.

 

22     « D’émeraudes et de fleurs,

« Moisson faite dans les fraîches matinées, (Résurrection)

« Nous tresserons des guirlandes

« Que ton amour fleurira

« Et qu’un seul de mes cheveux entrelacera. »

 

Voilà ce qu’est la mission chrétienne !

 

Nous sommes dans la miséricorde de Dieu, nous sommes entièrement engloutis en Lui seul. N’existe plus pour nous que cet amour absolu. À ce moment-là, avec un seul de nos cheveux, nous pouvons faire tout ce que tous les apostolats du monde entier ont fait en vingt siècles ! Nous sommes au cœur de l’amour.

 

23   « Un seul cheveu seulement (la moindre de mes cellules)

« Que sur mon cou Tu as regardé voler ;

« Tu regardas sur mon cou (je suis devenu l’unique médiateur)

« Et tu restas pris en lui,

« Et par un seul de mes yeux Tu Te navras. »

 

C’est ce même mystère d’Amour entre le Père et le Fils qui se vit entre le Père et nous dans le Fils et qui rayonne notre corps spirituel.

 

24   « Lorsque Tu me regardais,

« C’est leur grâce qu’en moi Tes yeux imprimaient ;

« Pour ce, Tu me chérissais,

« Et pour ce, méritaient-ils,

« Les miens, d’adorer ce qu’ils voyaient en Toi ? »

 

Nous sommes à ce moment-là rentrés dans la grâce d’une manière telle que la grâce donnée dans ce monde nous met aux portes de la grâce qui est au ciel, parce que le but de la grâce est de nous faire vivre de la Très Sainte Trinité. Aussi, à ce moment-là, notre vie dans la grâce est telle qu’un seul de nos actes, un tout petit acte tel qu’un simple baiser sur la Croix, une petite respiration, une inspiration, un subtil désir de prier, va faire que Jésus, Dieu le Père, vont s’effondrer au cœur de la Très Sainte Trinité. Et va se réaliser pour nous, au cœur de cet Amour substantiel, de cet amour que Jésus a pour nous, de manière corporelle, actuelle, donc bien réelle, ce qui se réalise éternellement entre le Père et le Fils lorsque le Père engendre son Épouse, le Fils, au cœur de la Très Sainte Trinité.

 

Le Père engendrant le Fils s’anéantit complètement, Il disparaît ; Il n’existe plus que le Fils, l’Épouse, le Verbe. C’est la raison pour laquelle le Verbe est Dieu, tout entier. Le Père s’est effacé et c’est ce qui permet au Verbe de Dieu de redonner toute sa divinité au Père. Cet anéantissement, c’est ce que nous vivons dès que nous aimons, nous n’existons plus, nous sommes totalement immergés dans l’amour. Et le Père, dans cette relation si puissante d’amour, s’effondre à son tour avec nous lorsque nous passons dans la 6ème demeure et que nous acceptons de donner un geste d’amour, même et surtout si nous sommes dans la nuit la plus absolue.

En comprenant cela, nous venons alors nous engloutir dans cette nuit joyeusement, libéralement, totalement, absolument, résolument. Enfin la maladie ! Enfin je ne peux plus aimer ! C’est à cela qu’on voit si cette nuit vient du péché ou de la grâce. Si elle vient de notre orgueil cela produit la révolte, si elle vient de l’union transformante, cela produit la grâce : c’est le grand critère de discernement. Alors le Père, l’Époux, la 1ère Personne de la Très Sainte Trinité s’effondre à travers son Fils, l’Épouse, 2ème Personne de la Très Sainte Trinité, il s’effondre éternellement et la divinité du Père nous est alors donnée et nous devenons alors le Fils de Dieu au même titre que le Verbe. Le mariage va pouvoir se réaliser, c’est-à-dire que nous allons commencer à vivre de l’union transformante jusque dans notre corps.

 

25   « Ne me méprise donc plus

« Si Tu m’as trouvé le teint brun, maintenant

« Tu peux bien me regarder,

« Puisque Tu m’as regardée

« Et que Tu laissas en moi grâce et beauté. »

 

Je me laisse regarder et aimer par Dieu. Jésus va nous regarder à travers la mort de l’Amour. C’est Jésus, le Verbe incarné, le Verbe de Dieu qui, au-delà de Sa mort, reconnaît l’Immaculée Conception, la Grâce, et me La donne.

 

26   « Chassez-nous les renardeaux

«  Car notre vigne est déjà toute fleurie, (c’est la plainte de la fiancée qui attend le mariage)

« Cependant qu’avec des roses

« Nous serrerons une pigne,

« Et que sur la montagne (le Verbe) nul ne paraisse. » (que le Père ; il ne reste plus que le mystère)

 

27   « Arrête, Aquilon de mort ! (l’immunisation est totale vis â vis du mal : c’est typique des fiançailles)

« Viens, Auster, Toi qui réveilles les amours.

« Viens souffler par mon jardin, (mon paradis terrestre renouvelé : c’est le corps de l’Épouse)

« Et que ses parfums (He) s’épandent,

« Et l’Aimé (le Père) trouvera sa nourriture parmi les fleurs. » (une petite fleur, à travers ma petite vertu : je reste fidèle)

 

Dans ces strophes le Verbe de Dieu agit Lui-même et y est exprimée cette action du Verbe incarné, de la Lumière d’amour absolument et éternellement invraisemblable de Jésus pour nous. Quand nous sommes dans la nuit spirituelle, il faut entendre Jésus nous dire :

 

28   « Et l’Épouse enfin a pénétré (la Parole du Père, la Parole du Verbe, la présence du Saint-Esprit)

« Dans le jardin charmeur qu’elle désirait.

« Elle repose, enivrée, (c’est le passage des fiançailles au mariage)

« Tandis que son cou se penche

« Appuyé sur les doux bras du Bien-Aimé. »

 

Quand nous demeurons plongés dans l’angoisse, dans la nuit spirituelle, que nous ne ressentons rien, entendons Jésus nous dire : « Enfin ! L’ancien monde s’en est allé, c’est le monde nouveau qui apparaît, enfin ! ! ! L’Épouse a enfin pénétré dans le jardin charmeur qu’elle désirait » C’est ce que nous vivons, nous qui sommes dans les temps présents, dans les temps de l’après sainte Thérèse de Lisieux. Saint Louis Marie Grignon de Montfort dit qu’au fur et à mesure que le temps eschatologique avance, Dieu nous donne une grâce qui nous permet d’aller toujours beaucoup plus loin que les saints qui nous ont précédés. C’est pourquoi c’est encore beaucoup mieux pour nous aujourd’hui, qu’hier pour sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.

Alors nous sommes heureux parce que fondamentalement nous percevons qu’il y a quelque chose de vrai et que personnellement, pour nous, c’est extraordinaire. Même si nous traversons la nuit de la foi la plus obscure, même si nous ne pouvons plus prier, même si nous n’avons plus de goût pour lire la Parole de Dieu, même si cette nuit de la foi est totale en nous et que du point de vue de notre vie extérieure, c’est catastrophique, nous sentons bien que pour nous intérieurement, c’est extraordinaire. Au niveau de la vie aussi c’est catastrophique, au niveau de notre esprit aussi, c’est une catastrophe, jusque dans le spirituel. Alors, il ne nous reste plus que notre corps. Mais au niveau de notre corps organique aussi, c’est la catastrophe (on ne peut plus faire la prière du cœur). Et il ne nous reste plus que notre corps dans son aspect fondamental, là où il y a la vie, la vie de la gloire et de la Résurrection et l’Esprit qui nous attire à Dieu.

Et ce que nous percevons et qui nous rend heureux dans la nuit, c’est cet « enfin » de Jésus qui réalise cette communion de personnes. Cette aspiration de Jésus à la Résurrection : « Enfin, l’Immaculée Conception est rentrée dans son jardin et Je suis ressuscité d’entre les morts ! » va nous permettre de nous engloutir dans la plaie brûlante de la nuit obscure, totale, de l’Immaculée Conception, dans son mystère de compassion :

« L’épouse a pénétré dans le jardin charmeur qu’elle désirait. »

Nous sommes passés du paradis terrestre, notre corps originel, au paradis céleste, le Cœur ressuscité du Christ.

 

29 « C’est à l’ombre du pommier,

« C’est là que Je reçus ta promesse et là

« Que je te donnais la main ;

« Et tu retrouvas l’honneur

« Là où ta mère en malheur était tombée. »

 

« C’est à l’ombre du pommier » :

 

Dans le Cantique des Cantiques, pour les juifs, l’ombre du pommier, le pommier, les pommes, ce sont toutes les invitations divines : l’invitation du Père, l’invitation du Fils, l’invitation du Saint-Esprit, l’invitation de tous les mitsvot (les dix Commandements de Dieu), le Sinaï. Pour rabbi Rashi, le grand commentateur du Cantique des Cantiques, le pommier c’est la Torah, c’est le Sinaï. Tout le peuple d’Israël a été mis en-dessous de la gloire de Dieu sur le Sinaï, la montagne de la prophétie. Les midrashs disent que c’est toute la gloire de Dieu sur la montagne de la prophétie, avec toutes les invitations glorieuses de Dieu dans les dix Commandements de Dieu qui sont sous la tête de l’épousée (du peuple d’Israël) c’est le Corps mystique. C’est très ancien cette notion du Corps mystique : C’est cela la signification de la pomme. Comme la pomme qui a été au-dessus de la première humanité (la vieille pomme), le nouveau pommier c’est la gloire de Dieu dans le Sinaï donnant toutes ses invitations et les mettant au-dessus de l’épousée. Les juifs avaient ce sens que le Cantique des Cantiques des épousailles, de l’union transformante, était quelque chose qui ne se faisait qu’au niveau de la collectivité d’un corps mystique total. Ce n’est donc pas quelque chose de nouveau, c’est quelque chose qui appartient à Moïse, à Salomon, au Christ, au Nouveau Testament et à la Jérusalem céleste (les cinq).

 

« Là où ta mère en malheur était tombée » :

 

Il a fallu qu’on tombe dans ce grand malheur pour trouver l’honneur de l’épouse. L’innocence originelle d’une humanité totalement imbibée de la présence du Créateur qui lui donnait pouvoir sur toute création et permettait à toute la création d’habiter dans cette humanité nouvelle sortie de Ses mains : voilà la maternité ayant perdu son honneur par le péché, voilà le malheur de notre maternité. Mais elle se retrouve dans la promesse des commandements de Dieu, les mitsvot, dans la gloire de Dieu sur le Sinaï, dans toutes les promesses que nous retrouvons dans le Corps mystique du Christ ; et ceci habite notre corps ; c’est là, à l’ombre du pommier !

 

30   « Oiseaux qui légèrement

« Vous envolez, lions, cerfs, daims bondissants,

«  Rivages, monts et vallées,

« Ondes, souffles et ardeurs,

« Et craintes qui faites les nuits sans sommeil. »

 

Force des lions                  (forces d’amour)

Soif des cerfs                     (sacrifiés d’amour, victimes d’amour)

Élan des daims                  (saints de tous les cieux)

Rivages                              (sources de grâce docteurs et prophètes)

Monts et vallées                 (Jésus Lui-même, Marie Elle-même)

Ondes                                 (vibrations d’amour “charismatique”)

Souffles                              (dons du Saint-Esprit)

Ardeurs                              (attraction d’union)

 

Tout cela n’est pas supprimé mais est dépassé, est devenu périphérique. Ne demeurent plus que le Père et le Fils. Et le Père nous donne le Verbe de Dieu pour que notre corps subsiste mystiquement dans le Verbe.

C’est extraordinaire !

 

31   « Par les lyres caressantes

« Et le chant des sirènes, Je vous conjure,

« Que s’apaisent vos colères ; (la création toute entière rentre dans la gloire quand on fait oraison)

« Et ne touchez pas au mur, (la barrière, le mystère de la Croix)

« Pour que l’épouse trouve un sommeil plus sûr. » (plus pur)

 

« Par les lyres caressantes et le chant des sirènes » :

Toutes mes impressions, mes palpitations, mes stigmates, mes charismes, mes pouvoirs, mes grâces, mes fécondités (ondes, souffles et ardeurs), mes forces (lion), mes orgueils, mes diabolismes, mes injustices, mes tromperies, mes mensonges, mes blessures (cerfs) toutes les puissances de mon cœur, mes désirs (rivages, monts et vallées) toutes ces illusions, c’est le chant des sirènes, « Écartez-vous ! ». C’est l’Époux qui parle !

« Ne touchez plus au mur » :

Le jardin est entouré d’un grand mur et une source scellée y est attachée : c’est le mur de Jérusalem qui est à l’Orient. Dans l’Apocalypse, il y a les murs avec les douze portes qui sont les douze degrés d’humilité, c’est-à-dire les douze manières d’être corporellement le Corps mystique du Christ en toute humilité. On est alors entouré de ce mur, de cette protection, c’est-à-dire de la présence réelle de la Personne du Verbe incarné dans le Sein du Père spirant l’Esprit-Saint à travers Son propre Corps. C’est cela le mur !

Ne touchez pas au mur, (au mystère de la Croix) pour que l’épouse trouve un sommeil plus pur, pour que nous puissions faire oraison, malgré nos fatigues, nos souffrances, malgré les contradictions, en les considérant comme une grâce et comme un appel de Dieu à faire oraison au lieu de rugir ; peu importe le temps qu’on va y mettre : humainement il vaut mieux que cela dure un peu plus d’une demi-heure, mais divinement cela n’a aucune importance.

Au lieu de fuir la douleur physique ou la fatigue, il faut l’accepter pour l’intégrer. Il faut commencer son oraison en acceptant de se reposer un peu pour prendre davantage conscience de notre corps. C’est peut-être pour cela que Dieu a fait la souffrance, pour qu’on puisse s’arrêter de temps en temps et prendre conscience de notre corps puisque c’est par là que Dieu va saisir le petit cheveu sur votre cou.

Il faut s’enfoncer dans la conscience corporelle, physique de notre corps jusque dans son aspect le plus fondamental, là où notre corps est tout à fait primordial, c’est-à-dire dans la première cellule lorsque nous avons commencé d’exister.

En effet, si nous voulons retrouver l’identité de notre corps vital, nous devons remonter au premier moment, le principe étant source de toute détermination. Donc, il nous faut retrouver cette première cellule et l’innocence divine qui s’y trouve pour retrouver notre corps primordial, originel. Nous sommes alors effectivement enfermés dans la souffrance, la douleur, les séquelles du péché originel et nous retrouvons cet état d’innocence et de buvard par rapport au péché communionnel, au péché symbiotique, au péché personnel, au péché originel.

L’innocence divine broyée en nous est très réceptive, et c’est par cette faille que nous nous engouffrons dans cette nuit corporelle de l’esprit et dans tout le Corps mystique de l'Église, dans l’océan de toutes les soifs corporelles, incarnées, de toute l’humanité, de toute la création qui attend en gémissant la révélation des Fils de Dieu.

Notre corps peut être alors en relation vitale avec les autres corps. C’est pour cette raison qu’il est très important de réintégrer la 5ème demeure corporellement en retrouvant notre corps primordial, et la douleur peut nous y aider. Nous rejoignons ainsi cet état d’impassibilité où nous étions au moment de l’acte créateur de Dieu et où nous avons reçu toute la décharge du péché originel, du péché communionnel ainsi que celle du péché symbiotique.

Lorsque nous avons touché cet état d’impassibilité, nous devons apprendre à nous y reposer, parce qu’alors, à ce moment-là, nous sommes en lien vital avec cette dimension de tous les autres corps relatif à la présence créatrice de Dieu, qui font vibrer notre propre corps de manière vitale si nous le vivons dans le Corps mystique de l'Église. C’est alors que nous pouvons nous immerger dans la présence transsubstantiée, sacramentelle, de tous les tabernacles du monde, et en même temps de tous les temps et de tous les lieux jusqu’à la fin du monde, jusqu’à la toute dernière messe (c’est la spiritualité de saint Patrick).

L’oraison, ne serait-ce pas justement de se mettre corporellement en présence de cette toute dernière messe du dernier prêtre, le tout petit dernier prêtre qui sera juste à la dernière messe avant le retour du Christ ? L’oraison, ne serait-ce pas finalement de vivre dans la foi cette toute dernière messe où seront présentes toutes les messes de tous les temps, de tous les lieux ; cette dernière messe qui en sera, qui en est, la clé de voûte. Et c’est par la foi que notre corps peut s’intégrer à cette dernière messe où se récapituleront toutes les grâces de toutes les messes précédentes depuis le début de la création.

C’est un moyen de rentrer dans le Corps mystique de l'Église, comme le disait Paul VI dans son Encyclique « Mystérium Fidei ».

C’est cela le mystère de la foi chrétienne. Notre corps physique en pénétrant dans l’aspect primordial de son propre corps découvre qu’il faut rentrer, grâce à l’Eucharistie, dans le Corps mystique de l'Église. Alors tout le corps mystique, lié à notre propre corps, vient se fondre dans le feu qui brûle le Cœur Sacré de Jésus remplissant de gloire l’éternité, tous les temps et tous les lieux. Ce corps mystique de l'Église, analogiquement et vitalement, c’est le Cœur Immaculé de Marie. C’est cet abîme de compassion, cette béance, cet accueil quasi infini du cœur dans lesquels est venu s’écouler la lumière océanique de la Résurrection qui structure le corps mystique de l'Église. Et dans cette unité sponsale de gloire des deux Cœurs, nous dépassons les monts et les vallées, nous élevons notre regard au-delà de l’humanité de Jésus et de Marie pour découvrir leur unité sponsale d’amour et nous comprenons que ce qu’ils fécondent dans le Père, c’est notre corps spirituel. Alors, encore une fois nous touchons surnaturellement le corps glorieux de Joseph, car c’est bien dans le Père qu’ils fécondent notre corps de résurrection...

Notre corps psychique ayant touché notre corps spirituel, nous allons pouvoir progressivement apprendre à l’habiter et ainsi permettre à notre corps terrestre de se mettre en harmonie avec notre corps spirituel pour réaliser de manière efficace le combat eschatologique final de l’Église, la désagrégation du mal.

Nous approchons maintenant du terme de notre réflexion sur l’union transformante dans le Cantique spirituel.

Nous avons analysé comment, chez sainte Thérèse d’Avila, l’union transformante avec les demeures marque les étapes de l’intégration absolue du mariage spirituel grâce à cette unique Lumière qui illumine toute l’humanité de celle qui a laissé sa propre lumière pour qu’elle soit flambante dans l’unique Lumière de Celui qu’elle aime. Comme ces deux lumières se mêlent l’une à l’autre, c’est ainsi que se réalise le mariage spirituel pour sainte Thérèse d’Avila, de lumière en lumière jusqu’à parvenir à cette Lumière absorbante qu’est la Lumière de la grande procession du Père dans le Verbe.

Pour saint Jean de la Croix, le mariage spirituel est un mariage du cœur, un mariage de la volonté et pour cette raison, c’est nocturne. C’est toute la vie qui est impliquée dans ce mariage, d’où la nécessité de cette grande progression.

Chez sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, c’est le désir très profond qui structure son union transformante. Elle ne s’attache pas au vol de l’esprit. Pourtant, le vol de l’esprit, c’est ce qui existe de plus extraordinaire en mystique surnaturelle ; c’est beaucoup plus grand que la Résurrection d’un mort. C’est notre esprit qui est détaché de notre corps et de notre âme, et qui vient habiter dans la Très Sainte Trinité. C’est l’œuvre de Dieu, c’est un miracle. Le démon caricature ce vol de l’esprit par le voyage astral.

Et pourtant, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus estime que ces richesses que nous nommons vols de l’esprit peuvent rendre profondément injuste si on s’y arrête avec complaisance en pensant que c’est quelque chose de très grand. Parce qu’elle a découvert une source de richesse infiniment plus grande que ces vols de l’esprit et c’est ce désir profond du corps, de l’âme et de la toute petitesse, de l’Enfance divine. Et ce désir trouve sa source, s’enracine dans la mémoire, qui incorpore l’intelligence et le cœur, dans cette mémoire qui incorpore tout, ce n’est pas une mémoire séparée. C’est une incorporation où le corps joue un rôle fondamental, tout à fait extraordinaire ; tandis que dans le vol de l’esprit, il y a une certaine décorporation, il y a même une désanimation qui se manifeste par un coma.

Chez sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, l’union transformante est vécue au niveau du désir et de la toute petitesse. C’est très lié à l’enfance spirituelle, à la toute petite humilité, à la toute origine, au désir de la création, au désir de la révélation des fils de Dieu, donc au désir de la fin du monde, au désir de l’incorporation de tout, et c’est moi qui vais être ce lieu !

Il faut qu’il y ait l’amour, l’intelligence et la mémoire selon ces trois grands maîtres que sont saint Jean de la Croix, sainte Thérèse d’Avila et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.

Mais pour cela nous devons même abandonner notre amour pour Dieu bien qu’il soit quelque chose de très grand ; et nous choisissons, nous désirons, nous ne recherchons plus que son Amour à Lui, son amour incréé, cet amour fou qui fait que Dieu est Dieu Lui-même. Nous ne désirons plus que cela, que ce soit l’Amour de Dieu lui-même qui vivifie et illumine de sa toute-puissance de lumière notre cœur humain et qui prenne la place de notre amour à nous. C’est extraordinaire parce que c’est Dieu qui aime dans notre cœur et c’est l’Esprit-Saint Lui-même qui brûle et qui est l’hypostase de notre amour. Et, à ce moment-là, ce n’est plus notre cœur qui bat, c’est le Cœur de Jésus qui vit en nous.

On rejoint saint Jean Gabriel Perboyre lorsqu’il dit : « Que mon intelligence soit Ton Intelligence ». C’est aussi toute la vie contemplative de sainte Thérèse d’Avila qui voit ce que Jésus voit dans l’éternité : Il voit la face du Père. Elle voit les trois Personnes de la Très Sainte Trinité dans le fond de son âme, dans le fond de son intimité profonde, et il suffit simplement qu’elle vienne s’y recueillir pour voir distinctement les trois Personnes divines, comme Elles se voient distinctement. C’est cela le mariage spirituel pour sainte Thérèse d’Avila, cette vision absolument claire de chacune des trois Personnes de la Très Sainte Trinité.

Nous sommes vraiment dans le mariage spirituel parce que notre manière de voir Dieu et la manière dont Dieu se voit Lui-même forment une seule et même vision. Et nous pouvons la retrouver en permanence puisque cette vision est présente au plus profond de nous-mêmes. C’est Le mariage de notre intelligence avec l’intelligence du Christ.

Sainte Thérèse donne l’exemple de deux bougies qui doivent se fondre jusqu’à la moelle pour ne faire qu’une seule mèche. Pour ce faire, il a fallu que ça coule, que ça chauffe. Mais comme il n’y avait plus de flamme pour chauffer, il a fallu que ça gratte et que ça fasse des cloques, que ça fasse ventouse : chair contre chair : voilà l’union transformante (c’est pour cela qu’il y a mariage). Saint Barthélemy, écorché vif, est le patron du mariage.

 

3.    Lorsque l’union transformante concerne la mémoire, elle devient très proche de l’Eucharistie et de Marie.

Les deux témoins de l’Apocalypse sont là puisque Marie, Mère de Dieu, Marie, l’Immaculée Conception, porte corporellement dans la gloire de l’Assomption cet engendrement du premier instant de l’Incarnation. Le mystère de Marie Reine, c’est ce mystère de fécondité dans le corps : Elle engendre l’union transformante jusque dans notre corps et donc dans notre mémoire d’enfant de Dieu. Et Elle ne peut le faire en nous qu’en le faisant unanimement, solidairement et corporellement dans tous les membres du Corps mystique du Christ.

On ne peut plus faire mémoire de cette manière eucharistique sans intégrer corporellement tous les autres corps spirituels. Notre corps spirituel devient le capteur de la centrale divine qu’est la Très Sainte Trinité dans l’incendie d’Amour qui vivifie corporellement le Sacré-Cœur de Jésus dans la gloire de sa Résurrection. Comprenant cette fusion d’amour, nous offrons alors notre humanité entière pour la désagrégation définitive du mal dans la création toute entière. Voilà ce qu’opère l’union transformante de la mémoire. À ce moment-là on laisse tomber tout ce qui est de nous et on ne peut plus vivre qu’en mémorial du Christ total pour que s’opère en nous la conversion eucharistique, surnaturellement. La véritable transsubstantiation, c’est que recevant l’Eucharistie, le sacrement opère en nous cette conversion eucharistique, cette vraie conversion qui fait que tout notre corps est transformé dans le Corps total du Christ, sensible, pas au niveau du sentiment, mais, au niveau des sens externes, qui a quelque chose de physique ; notre corps laisse toutes ses potentialités d’ouverture, d’abandon, de recueillement, d’engloutissement, de transformation, de transsubstantiation dans le mémorial eucharistique du Christ ressuscité d’entre les morts. C’est le Corps de Jésus qui est présent dans chacune de nos cellules en mémorial de nous. À ce moment-là, nous pouvons offrir l’humanité totale du Christ total au Père. Et le Père peut alors Se voir Lui-même dans son Verbe incarné ; et l’Esprit-Saint peut rayonner dans cette même incarnation du Verbe en ses membres.

Nous venons de faire un acte de mémoire eucharistique. C’est facile, c’est efficace puisque tout sacrement a comme caractéristique d’être efficace par lui-même. C’est simple parce que c’est pour les tout petits, les pauvres, et c’est doux et agréable puisque, à œ moment-là, toute l’Église est présente, l’Enfant du Père en moi est présent. Nous avons beaucoup de chance de faire partie des Apôtres des derniers temps, parce que dans notre corps et dans notre mémoire eucharistique, faisant mémoire du Corps mystique de Jésus, nous recevons corporellement tout ce qui a habité corporellement, mystiquement, surnaturellement le corps de tous les saints depuis 2000 ans.

Ce capital initial nous est donné, dit saint Jean Gabriel Perboyre, c’est le Corps mystique du Christ que nous portons dans notre propre corps.

« Faites ceci en mémoire de Moi »

La rentrée du corps spirituel dans le processus de l’union transformante commence là et c’est sa première demeure. C’est très facile de pénétrer dans la première demeure de l’union transformante du corps spirituel. Il suffit de s’arrêter 30 secondes et de faire ceci en mémoire de « nous ». Et c’est le Corps de Jésus qui brûle dans notre corps. Nous demeurons alors dans le silence, dans l’écoute silencieuse du Corps de Jésus qui vit Son unité mystique, humaine et divine, dans notre propre corps. Alors progressivement lorsque notre corps lui-même vient rejoindre les grâces d’oraison dans cette absorption même des Personnes divines à l’intérieur de l’âme, à ce moment-là, notre corps lui-même participe à l’union transformante, au fur et à mesure des transformations, des purifications des différentes demeures de l’union transformante.

Notre corps spirituel ne peut rentrer dans la 7ème demeure si notre corps n’y est pas, si notre âme n’y est pas, si notre intelligence n’y est pas, et si on ne fait pas oraison.

« Et l’Épouse a pénétré dans le jardin charmeur qu’elle désirait »

C’est la terre promise, le corps spirituel rempli de gloire de Jésus s’épanouissant dans le jardin secret de l’Immaculée Conception rempli de cette humanité habitée par tous les enfants de Dieu.

 

4.    À partir de cette strophe 32, nous sommes dans le mariage.

 

32   « Ô vous, nymphes de Judée,

« Tandis que parmi les fleurs et les rosiers

« L’ambre donne son parfum,

« Demeurez dans les faubourgs,

« Et veuillez ne point toucher à notre seuil. »

 

Voici la seule chose que dit l’Épouse :

 

33   « Cache-Toi, mon doux Ami, (ma Très Sainte Trinité)

« Vois - le visage tourné vers les montagnes -

« Et veuille ne point le dire ;

« Mais regarde les compagnes

« De celle qui va par les îles étranges. »

 

Lorsque le Corps mystique tout entier de la Jérusalem céleste habite corporellement toutes les cellules de notre corps, en pleine lucidité actuelle, l’unique mission du mémorial eucharistique de notre corps, est de demander que l’humanité toute entière soit incorporée dans le Corps mystique du Christ. C’est la seule chose que nous demandons dans l’unique Verbe de Dieu en face du Père, dans le Sein du Père, que cette révélation soit faite à la création toute entière qui aspire à la révélation du Fils de Dieu dans le Corps mystique, lequel se situe dans le rayonnement du corps mystique d’un croyant qui justement fait mémoire eucharistique dans l’Immaculée Conception et dans la Sainte Famille Glorieuse.

 

34   « La colombe toute blanche

« Avec le rameau dans l’arche est retournée, (voilà ce que dit l’Époux : c’est l’Église toute entière qui est revenue dans le Cœur Immaculé de Marie, corporellement parlant)

« Et la tourterelle enfin

« Sur les rives verdoyantes

« A trouvé le compagnon tant désiré. » (nous avons trouvé Jésus, et avec Jésus, la plénitude de paix)

 

35   «Solitaire elle vivait,

« Et en solitude elle a posé son nid, (on a trouvé notre Terre promise)

« Et la guide en solitude,

« Solitaire son Ami, (il n’y a plus que le Christ dans toute l’humanité)

« Lui aussi navré d’amour en solitude. »

 

C’est l’Église toute entière qui est revenue dans le Cœur Immaculé de Marie corporellement parlant. Nous avons trouvé Jésus et, avec Jésus, la plénitude de paix.

Dans toute l’humanité, ne subsiste plus que Jésus seul et nous pouvons lui offrir notre humanité, pour toute l’humanité, en toute simplicité.

 

36   « Mon Ami, soyons en joie,

« Et allons-nous-en nous voir en Ta beauté,

« Au mont ou à la colline

« Où l’eau pure vient jaillir,

« Et pénétrons plus avant dans l’épaisseur. » (de l’Amour)

 

Nous pénétrons ici dans les grands attributs divins, c’est-à-dire dans les grandes caractéristiques de la simplicité de l’Amour du Père pour le Fils et de la perfection de l’Esprit-Saint dans l’union transformante appliquée au corps de la création toute entière. C’est cela l’épaisseur ; parce que nous ne contemplons plus seulement les attributs divins pour ce qu’ils sont pour eux-mêmes, comme dans les premières demeures, mais nous les contemplons, impliqués dans le corps matériel, existentiel, temporel, intégrés dans l’éternité de la création toute entière. Et ces attributs divins que nous découvrons, intégrés dans l’épaisseur de la création, nous les réalisons, nous les engendrons, ou plutôt c’est le Verbe incarné qui les engendre à travers notre corps spirituel, d’où l’apparition de cette épaisseur.

 

37   « Bientôt alors nous irons

« Dans les cavernes très hautes de la pierre, (jusque dans le monde minéral)

« Elles sont si bien scellées !

« C’est là que nous entrerons,

« Et nous y goûterons le moût des grenades. »

 

C’est dans le monde minéral que l’on trouve le fruit de l’unité sponsale, incréée et créée, le mariage vécu en plénitude.

Rentrer dans la grenade, c’est trouver le fruit le plus pur de l’Amour. Lorsque nous coupons la grenade en deux, nous découvrons qu’elle est composée d’une multitude de petits grains soudés les uns aux autres, et si nous pressons fort ces petits grains, nous en recueillons un seul moût, une seule liqueur. Le moût des grenades, c’est tous nos corps remplis d’amour qui doivent être écrasés pour obtenir un seul moût, un seul jus d’amour incréé, et en même temps créé, extrait de tous nos corps pour former un seul Corps mystique qui est la Jérusalem Céleste. C’est ce que nous sommes appelés à savourer dans l’union transformante, dans le corps spirituel.

C’est extraordinaire l’oraison dans le Monde Nouveau institué et mis en place par le saint Père !

 

38   « Et là Tu me montrerais

« Ce que mon âme désirait instamment,

« Et là Tu me donnerais

« Bientôt, Toi qui es ma vie,

« Ce que l’autre jour déjà Tu me donnas. »

 

39   « Et c’est le souffle de l’air,

« Le rossignol dans la douceur de son chant,

« Le bocage avec ses charmes

« Au sein de la nuit sereine,

« Dans la flamme qui consume et plus ne peine. »

 

40   « Nul regard n’y atteignait,

« Plus ne se montrait désormais l’Ennemi, (le mal est totalement désagrégé)

« Les assiégeants s’accoisaient,

« Tandis que les cavaliers

« À l’aspect des eaux poursuivaient leur descente. »

 

C’est la fin du combat eschatologique, c’est l’ascension finale. Toute la poussière s’en va en enfer et la création peut vivre enfin du ciel. Vivre dès à présent de cette espérance, c’est accomplir un acte d’espérance dans l’union transformante. L’espérance implique le corps, l’acte de foi implique l’union transformante dans la lumière, (et c’est la spiritualité de sainte Thérèse d’Avila) et la charité implique l’union totale dans la nuit du cœur d’un amour total. Le cœur est ouvert dans la nuit et il en sort l’eau, le sang, l’Esprit-Saint (telle est la spiritualité de saint Jean de la Croix).

Nous découvrons comment ces trois vertus théologales, la foi, l’espérance, la charité, nous conduisent à travers l’action de l’Esprit-Saint dans l’union transformante. Et nous devons sentir la place qu’y occupe le corps pour comprendre pourquoi nous devons vivre de l’au-delà purement divin de l’union eucharistique.

On comprend mieux maintenant pourquoi il est de la plus haute importance que l’Église s’intéresse à la question du corps et définisse à quel moment le corps et l’esprit de l’homme deviennent un corps humain par l’Acte créateur de Dieu ; parce que la participation du corps dans cette union transformante terminale est liée à cela.

Or, le principe même de la spiritualité qui prend au moins 80 % des gens d’aujourd’hui, c’est que le corps est animé par l’âme, ce qui aboutit à l’ouverture des chakras, c’est-à-dire de tous les centres corporels. C’est la spiritualité des médiums, des guérisseurs qui disent guérir en priant : c’est diabolique, il faut bien le dire.

Nous devons vivre de l’union eucharistique.

La spiritualité du nouvel âge est basée sur le fait qu’il n’y a qu’une énergie primordiale au moment de la fécondation, qu’il n’y a pas d’esprit. Effectivement, les énergies primordiales de la fécondation qui sont des énergies métapsychiques, sont les mêmes que celles qu’il y a dans l’ovocyte avant la fécondation, si bien qu’on ne repère plus la présence spirituelle dans le corps. Mais si on la repère et si on en vit, cela change tout !

Il faut savoir qu’il va falloir au moins dix ans à quelqu’un qui est entré dans cette spiritualité d’aujourd’hui pendant 30 ou 40 ans, pour ressouder son corps avec la partie spirituelle de son âme qui se sont déchirés par la Kundalini.

Il faut savoir aussi que, dans l’accompagnement des mourants, d’E. Kübler-Ross, il s’agit d’un accompagnement qui chloroforme l’aspect spirituel dans un travail de deuil psychologique, psychique et métapsychique. Et si la mort, du coup, se passe calmement, la personne accompagnée n’aura pas de réveil spirituel au moment de sa mort, ce qui est dramatique ! car la mort est une conséquence du péché originel, et celui qui meurt a besoin d’un amour spirituel de charité, de l’aide de la prière et de l’aide du Christ.

Tout est basé sur la réponse à cette question : « Où mon corps devient-il spirituel ? »

C’est l’urgence des temps modernes.

Tant qu’on n’aura pas étudié clairement cette question, l’Église continuera à rentrer dans une crise épouvantable et il n’y aura plus de conversions. On pourra sauver ce qui était perdu, mais on ne pourra rien pour les petits, les pauvres, ceux qui se sont déboutonnés les chakras. Or, l’Église est là pour évangéliser les assoiffés de Dieu, les chercheurs d’absolu, les chercheurs d’intériorité.

Pour cela, il faut beaucoup faire de métaphysique, il faut beaucoup pratiquer la charité fraternelle et il faut beaucoup prier dans le Corps mystique du Christ, en faisant mémoire de Lui. Voilà le trépied de l’union transformante pour que la Sainte Famille finale puisse faire advenir la Jérusalem céleste qui est déjà en germe maintenant dans notre union transformante.

 

5.    La spiritualité du New Âge est le contraire de l’union transformante.

Il est très important de savoir faire la différence entre le Feu d’en-Haut et le feu d’en-bas.

Le réveil de la kundalini implique le pranayama. Faire du yoga, faire le vide (zazen), c’est anti-métaphysique, c’est le contraire de l’union transformante.

En effet pour faire le vide, le corps doit se mettre en repos, dans des positions telles qu’on ne pense plus à rien. On oublie d’abord ceux qui sont autour de nous (voilà l’anti-charité). Une fois qu’on est séparé de tout (voilà l’anti-métaphysique), on pratique le pranayama ; c’est-à-dire que le souffle de la respiration s’arrête. Et si une puissance intermédiaire peut intervenir par la médiation d’un médium, tous les centres corporels s’ouvrent et c’est le feu d’en-bas qui nous prend corporellement par le point de vue psychique lié au corps (voilà l’anti-mémoire). On rentre alors dans la mémoire des puissances intermédiaires et du « tout » animé par la lumière qui actue le diaphane cosmique.

Or, Dieu a créé Adam en soufflant dans ses narines le souffle de vie. Les narines c’est la finalité, et le souffle c’est la médiation. C’est curieux comme le démon, dans cette spiritualité métapsychique, enseigne d’abord le vide, ensuite la séparation et puis l’arrêt du souffle. À ce moment-là, le feu d’en-bas peut prendre le corps, car à partir du moment où j’ai ouvert mes centres corporels, j’ai le feu du pouvoir angélique déchu dans mon corps et je peux commencer à guérir les gens en disant que c’est Jésus et Marie. La signature, que ceux qui font cela n’est pas de Dieu, c’est qu’ils ne peuvent pas respecter les 10 Commandements de Dieu et de l’Église, nous dit saint Jean. C’est la signature de l’antéchrist qui nie que Jésus soit le Fils de Dieu, qu’il soit le Christ. Or, le Christ est Celui qui accomplit la Torah. Et si l’on permet qu’un seul péché soit en nous, c’est sûr qu’il n’y a rien du Saint-Esprit et que les guérisons viennent du démon. Ce n’est pas difficile à discerner. Saint Jean de la Croix dit bien qu’il ne faut laisser pénétrer aucune tentation :

« Ne touchez plus au mur »

Ne touchez plus au mur du corps spirituel, la Jérusalem céleste ! Ne touchez pas aux 10 Commandements de Dieu ! On est sous le pommier et toute la gloire de la Torah et des invitations divines s’incarne dans notre corps, habite notre corps et le Corps mystique peut entrer.

Il faut donc commencer nos oraisons avec une intelligence très pure, qui a ce désir de voir Dieu et un cœur ouvert à la charité du Christ, pour que se réalise vraiment l’union transformante en nous et que nous puissions réellement faire mémoire du Corps mystique de Jésus dans notre corps, corporellement.

À ce moment-là, nous faisons mémoire du Christ. Voilà la porte d’entrée pour notre vie d’oraison, et c’est sublime de comprendre cela. Parce que la nouvelle pentecôte d’amour, cette union du Père et du Fils qui fulgure l’Esprit-Saint dans le Corps mystique du Christ présent corporellement dans notre corps actuel, dans les temps actuels, peut alors s’accomplir en nous et à travers nous pour la création toute entière.

 

Et nous avons été choisis pour cela !

 

 

 

Annexe 1

 

 

Traduction du Père Cyprien de la Nativité

 

 

1     Où vous cachez-vous, cher Amant

Qui m’avez en ce deuil laissée

Comme un cerf qu’on va poursuivant ?

Vous fuyez m’ayant bien blessée ;

Je sortis après vous criant,

Mais vous alliez toujours fuyant.

 

2     Ô Pasteurs vous qui tournoyez

Ces huttes, gagnant la Colline

Si par rencontre vous voyez

Celui qui brûle ma poitrine,

Dites Lui qu’en mille langueurs

Et mille souffrances je meurs.

 

3     Cherchant les amours de mon cœur,

J’irai par ces monts et rivages,

Sans y cueillir une fleur,

Ni craindre les bêtes sauvages ;

Murs et remparts je forcerai,

Et les frontières passerai.

 

4     Ô sombres forêts que la main

De mon Bien-Aimé a plantées !

Prés, délices de l’œil humain,

Verdures de fleurs émaillées !

Dîtes, sans feinte, mon Époux

N’aurait-Il point passé près de vous ?

 

5     Libéral en ayant versé

Mille doux effets de sa grâce,

D’un pas rapide il a traversé

Ces bois, et y tournant sa face,

Les enrichissait de nouveauté

En leur imprimant sa beauté.

 

6     Hélas ! qui pourra me guérir !

Achève de te livrer sans feinte,

Amour, sans plus aller quérir

Des messagers sur ma complainte ;

Car je ne puis apprendre d’eux,

Ce qu’impatiente, je veux.

 

7     Tous ceux qui s’occupent en vous,

Me vont racontant mille grâces,

Et tant plus me blessent de coups ;

Car ici leurs langues trop basses

Bégaient un je ne sais quoi

Qui me tue et me met hors de moi.

 

8     Pourquoi, mon âme, ne meurs-tu pas,

Ne vivant pas où est ta vie ?

Puisque l’on hâte ton trépas,

Quand Celui dont tu es ravie

Jette ses traits que tu reçois

En ce que de Lui tu conçois.

 

9     Quoi donc ? ayant blessé ce cœur,

Ne guérissez-vous pas sa blessure ?

Me l’ayant volée, cher Vainqueur

Laisserez-vous votre capture ?

N’emporterez-vous par effet

Le butin que vous avez fait ?

 

10   Éteignez donc tous mes ennuis,

Puisque nul autre ne peut le faire ;

Que mes yeux sans ombre et sans nuits

Vous voient, leur clair luminaire,

Puisque pour vous seul, cher Amant.

Je les garde si chèrement.

 

11   Montrez-vous présent à mes yeux,

Et que votre regard me tue !

Un mal d’amour tant ennuyeux

Ne peut guérir, que par la vue

De Celui duquel la beauté

Fait cette aimable cruauté.

 

12   Source d’un cristal précieux !

Si dans tes faces argentines,

Soudain tu formais ces beaux yeux,

Chéris pour leurs grâces divines

Que je tiens avec grand honneur,

Portrait dans le fond de mon cœur.

 

13   Détournez-les, mon cher Époux,

Car je prends l’essor et m’envole.

Retourne Colombe vers nous ;

Le cerf blessé de ta parole

Parait au mont prenant le frais,

Et l’air qu’en volant tu lui fais.

 

14   J’ai en mon bien-aimé les monts

Et les vallées solitaires,

Les fleuves bruyants et profonds

Avec les îles étrangères,

Le souffle des plus doux zéphyrs

Qui rafraîchissent mes désirs.

 

15   La paisible et tranquille nuit

Pareille à l’aube gracieuse ;

La douce musique et sans bruit ;

La solitude harmonieuse ;

Le souper que donne l’amour

Et recrée l’âme à son tour.

 

16   Notre lit est semé de fleurs,

Les lions y ont leur retraite,

Le pourpre fournit ses couleurs ;

Et bâtit d’une paix parfaite,

De boucliers d’or environné,

Il est de gloire couronné.

 

17   Sur les traces de ton marcher

Vont courant des filles pudiques ;

De l’étincelle un seul toucher,

Un goût des vins aromatiques,

Écoulement délicieux

D’un baume dérivé des Cieux.

 

18   Dans le cellier le plus retiré,

De mon Ami, j’ai bu sans peine,

Et par ce nectar désiré,

Surprise, sortant en la plaine,

J’oubliais ce que je savais,

Jusqu’au troupeau que je suivais.

 

19   Là donc il me donna son sein,

Là il m’apprit une science

Savoureuse, et sur son dessein,

Me livrant toute en confiance,

Promis de le servir désormais,

Comme l’épousant à jamais.

 

20   Mon âme avec tout mon pouvoir,

S’emploie à son seul service,

Maintenant je ne veux pourvoir,

Les troupeaux, ni tenir office ;

Aimer est ma vocation

Et n’ai plus d’autre passion.

 

21   Que si désormais en ces prés,

L’on ne me trouve et n’y suis vue,

Et si l’on s’enquiert vous direz

Que vraiment je me suis perdue ;

Qu’éprise d’un amour ardent,

Je me gagnai en me perdant.

 

22   Des émeraudes, et des fleurs

Choisies au frais de l’Aurore

Nous ferons en mille couleurs

De riches chapeaux, que décore

Votre amour, et si je les veux

Lier tous d’un seul de mes cheveux.

 

23   Ce seul cheveu que vous voyez

Comme sur mon col il ondoie,

Vous prit quand vous le regardiez

Et vous tint lié pour sa proie ;

Aussi le trait d’un de mes yeux

Vous blessa d’un coup gracieux.

 

24   Au temps que vous m’envisagiez,

Vos beaux yeux m’imprimaient leur grâce.

Pour cela vous me chérissiez,

Et mes yeux voyant votre face,

En cela même ils méritaient

D’adorer ce qu’ils y voyaient.

 

25   Ami, ne me méprisez pas,

Car si vous m’avez trouvé brune,

Maintenant me verrez à point,

Puisque votre vue opportune,

Avec la grâce m’a empreint

La beauté qui change mon teint.

 

26   Qu’on nous prenne ces renardeaux

Puisque notre vigne est fleurie,

Faisant un feston de monceaux

De roses fraîchement cueillies,

Nous voulons que sur ce coupeau

Ne paraisse homme, ni troupeau.

 

27   Morte bise arrête ton cours ;

Lève-toi, ô Sud, qui réveilles

Par tes souffles les saints amours,

Faits par mon jardin tes merveilles ;

Car en répandant ses odeurs,

Mon ami paîtra dans les fleurs.

 

28   L’Épouse est entrée au Jardin,

Ce beau Paradis de délices ;

Et repose en l’Époux divin,

Pour lequel sont tous ses services,

Mettant son col dessus ses bras,

Où elle trouve mille appâts.

 

29   Ce fut à l’ombre du pommier

Que je te pris pour mon Épouse ;

Et pour te tirer du fumier,

Je te donnai ma main jalouse

De réparer là ton bonheur

Où tomba ta mère en malheur.

 

30   Hôtes de l’air, légers oiseaux,

Lions, cerfs, chèvres sauvages,

Monts, vallées, airs, claires eaux

Et vous délicieux rivages,

Ardeurs qui causez tant d’ennuis,

Et craintes des blanches nuits.

 

31   Je vous conjure par les luths,

Et par le doux chant des sirènes

D’arrêter votre courroux, et que plus

Touchant le mur, les frayeurs vaines

Ne puissent causer le réveil

De celle qui prend son sommeil.

 

32   Nymphes de Judas, cependant

Que le plus doux parfum de l’ambre

Et des rosiers va se répandre,

Ne touchez le seuil de ma chambre ;

Demeurez, il est à propos,

Dans les faubourgs en repos.

 

33   Tenez-vous caché, cher Époux,

Tournez vos yeux sur les montagnes,

Et gardez ce secret pour nous.

Toutefois voyez les compagnes

De celle qui s’en va ranger

Les îles d’un monde étranger.

 

34   La blanche Colombe en ce jour

Avec son rameau vert d’olivier,

Est dans l’Arche, de retour ;

Là sur la rive verdoyante,

La tourte trouve retiré

Son Ami qu’elle avait désiré.

 

35   En solitude, elle vivait,

Son nid est dans la solitude,

En solitude la pourvoit

L’Auteur seul de sa quiétude :

Lui qu’un même amour a pressé

Et en solitude, blessé.

 

36   Ô Ami, allons pour nous voir,

Et pour considérer nos faces,

En vos beautés, ce clair miroir,

Où l’on découvre toutes grâces :

Au mont d’où l’eau plus pure sourd,

Au bois le plus épais et plus sourd.

 

37   Aussitôt nous nous en irons.

Gagner les grottes de la pierre,

Les plus hautes des environs,

Et les plus secrètes de la terre.

Nous entrerons dans ces celliers

Buvant le moût des grenadiers.

 

38   En ce lieu vous me montrerez,

Tout ce que prétendait mon âme.

Ô vie ! vous me donnerez

Ce pourquoi mon cœur vous réclame,

Et que déjà d’un pur amour

Vous me donnâtes l’autre jour.

 

39   Les zéphyrs et la douce voix

De l’agréable Philomèle,

L’honneur et la beauté des bois,

En la nuit plus calme et plus belle,

La flamme qui va consommant,

Et ne doit point de tourment.

 

40   Car pas un ne le regardait,

Aminadab n’osait paraître ;

Le grand calme que l’on gardait

Au siège se faisait paraître,

Les troupes avec leurs chevaux

Descendait à l’aspect des eaux.

 

 

Annexe 2

 

 

PARALLÈLE ENTRE LES MYSTÈRES DU CHRIST

&

LES SEPT DEMEURES DE L’UNION TRANSFORMANTE

 

 

Dans la 1ère demeure L’union transformante a son analogué dans l’Incarnation c’est la Foi initiale

 

Dans la 2ème demeure             L’union transformante a son analogué dans la Visitation c’est la vie cachée dans le sein maternel. C’est la période sponsale de la charité fraternelle pour les généreux.

 

Dans la 3ème demeure             L’union transformante a son analogué dans la Nativité, la Naissance de Jésus à Bethléem : C’est la demeure de l’illumination.

 

Dans la 4ème demeure           L’union transformante a son analogué dans la Vie cachée de Jésus, Marie et Joseph, à Nazareth, jusqu’à ce que saint Joseph meure. C’est l’apprentissage de l’obéissance et la prise de conscience de notre pauvreté instrumentale.

 

Dans la 5ème demeure           L’union transformante a son analogué dans la Crucifixion où nous vivons de l’obéissance héroïque. C’est la crucifixion pour notre fausse personnalité en même temps que Jésus nous guérit. C’est à ce moment-là que Jésus se trouve face aux pécheurs et qu’il va vers la Croix, résolument, qu’il fixe Son Visage sur le Golgotha. C’est la vie apostolique, la nécessité d’être disponible et ouvert aux autres.

 

Dans la 6ème  demeure          L’union transformante a son analogué dans les fiançailles où a lieu la Transverbération quand le Corps de Jésus est mis au tombeau et qu’il est lié directement au Verbe de Dieu. C’est la découverte de notre corps spirituel où notre corps est directement animé par le Verbe de Dieu qui est notre Époux.

 

Dans la 7ème demeure             L’union transformante a son analogué dans la Résurrection. C’est le mariage spirituel, l’accomplissement de l’union transformante dans les 7 demeures. C’est la résurrection dans notre corps, dans notre âme, dans notre esprit, de l’intérieur, dans l’oraison.

 

 

ÉPILOGUE

 

Dans le Cantique Spirituel du Corps, nous venons de regarder quel pouvait être l’écho dans notre corps des mariages mystiques totalement spirituels et surnaturels dans le passage des fiançailles et du mariage spirituel.

Car c’est très important que notre corps se réveille !

Dans ce mariage spirituel où il y a une véritable communion des personnes, nous avons vu comment le corps, au lieu d’être un obstacle à notre foi, va être, au contraire, le vecteur de cette danse mystique, de cette transformation d’Amour.

Le Livre de l’Apocalypse est comme une suite, un complément de ce Cantique Spirituel du Corps ; parce qu’il nous révèle ce qu’est la Jérusalem Céleste, à travers un langage marial. Il est comme une révélation sur le mystère de la Femme qui a ce visage splendide de la Jérusalem Céleste ; car il y a comme une harmonique, une espèce de danse extraordinaire entre la Femme de l’Apocalypse, la Jérusalem Céleste et l’Église, Corps mystique du Christ.

Jésus a pris chair de la Vierge Marie et Il est devenu follement amoureux de Son Église, de son Corps mystique. Il a pour elle un amour sensible, fulgurant et flamboyant en même temps que divin et incréé ; c’est pour cela que l’on peut dire que Jésus est réellement amoureux de son Église. Cet amour étant essentiellement personnel, il passe par toute une spiritualité qui est la réponse à l’Amour fou de Jésus.

L’Église est un mystère où le corps est vraiment impliqué, où l’Épouse est impliquée ; on le voit dans le Livre de l’Apocalypse mais aussi dans le Livre du Cantique des Cantiques.

Ce dévoilement, cette révélation est liée à l’Heure. C’est l’heure pour nous de recevoir les flammes amoureuses de l’Amour très sensible de Jésus, comme le disait Paul VI. Ce n’est pas très carmélitain ; avec saint Jean de la Croix, on ne ressent rien, c’est très nocturne, c’est une sponsalité spirituelle, surnaturellement pure.

Ce livre promet une béatitude, une joie, un bonheur que personne ne pourra ravir, à ceux qui le liront, et écouteront ces paroles, à condition qu’ils n’en ajoutent rien ni n’en retranchent rien.

L’Apocalypse est le livre du dévoilement du coup de foudre de Jésus par rapport au mystère du corps de son Église, de son Corps mystique.

« L’Esprit et l’Épouse disent : « Viens ! »

L’Épouse est tellement conjointe à l’Esprit-Saint qu’ils disent à Jésus de les rejoindre dans ce mystère d’épousailles et c’est la fin ! Le dernier mot de l’Apocalypse.

 

MARANATHA !

 

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LE CANTIQUE SPIRITUEL DU CORPS

 

INTRODUCTION

 

CHAPITRE I                   St Joseph et le mystère de l’incarnation

I.         Le 5ème mystère joyeux est la porte d’entrée de l’union transformante dont st Joseph est la clé

II.        St Joseph et l’oraison de quiétude

 

CHAPITRE II                  Le Cantique spirituel (texte)

 

CHAPITRE III                L’union transformante intègre le point de vue du corps

I.         Comment le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont présents, pour ainsi dire, corporellement - Le mystère de l’Immaculée Conception

II.        Communions sponsales au Ciel où le corps est impliqué

III.      Charte pour le monde nouveau

IV.      Le but que nous poursuivons

 

CHAPITRE IV                Commentaire du Cantique spirituel de st Jean de la Croix

I.         Comment faire oraison pour rentrer dans l’oraison de quiétude

II.        Intervention des Anges

III.      L’union de volonté - d’après sainte Thérèse d’Avila

IV.      Les trois subsistances

V.        La 5ème demeure

1 - Commentaire de sainte Thérèse d’Avila

2 - La transformation de notre corps en crèche

3 - Commentaire de saint Jean de la Croix

- L’oraison d’abandon

VI.      Comment la course vers l’union transformante implique la dimension du corps...

VII.     Passage de 4ème à la 5ème demeure

- Comment discerner le sommeil végétatif du sommeil de la grâce

- Le raccourci de sainte Thérèse d’Avila

VIII.   Le passage aux fiançailles (de la 5ème à la 6ème demeure)

- La purification passive des sens

- La 12ème strophe nous met à l’orée des fiançailles

- Nous allons passer de la Très Sainte Trinité au Sacré-Cœur de Jésus

- Nous passons de la Très Sainte Trinité au Sacré-Cœur

- La Transverbération est un miracle

 

CHAPITRE V                  L’union transformante avec st Joseph implique la dimension du corps

1 - Les Âmes du Purgatoire

2. L’aspect fondamental du corps

3. La place du corps dans le processus de l’union transformante

 

CHAPITRE VI                La dernière étape de l’union transformante

À partir du moment où on a trouvé son corps spirituel, on peut s’aventurer dans les mystères du Verbe incarné et glorifié

1 - Commentaire de st Jean de la Croix

2 - Le passage aux fiançailles nous introduit dans notre corps spirituel

3 - Lorsque l’union transformante concerne la mémoire, elle devient très proche de l’Eucharistie et de Marie

4 - Nous sommes dans le mariage

5 - La spiritualité du New-Age est le contraire de l’union transformante

 

Annexe 1           Traduction du Cantique Spirituel par le Père Cyprien de la Nativité

 

Annexe 2           Parallèle entre les mystères du Christ et les 7 demeures de l’union transformante

 

ÉPILOGUE

 

 

(1) Voir « Exégèse rabbinique » : Remez signifie « clin d’œil de Dieu » donné à celui qui Le rencontre dans la Révélation écrite.

 

 

 

Rencontre et Action Mariale

Rédaction M.Th. Gravier

Direction Père Nathan

 

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