LE
CORPS MORTEL EST RÉGI PAR L’ÂME IMMORTELLE
Prière à saint Athanase en fin de page
"Comment, puisque le corps est naturellement mortel, l'homme raisonne-t-il
sur l'immortalité, et désire-t-il souvent la mort pour la vertu ? Ou
encore, comment, puisque le corps est éphémère, l'homme se représente-t-il les
réalités éternelles au point de mépriser les choses présentes et de tourner son
désir vers les autres ? Le corps ne saurait de lui-même raisonner ainsi
sur lui-même, ni sur ce qui est extérieur à lui : il est mortel et
éphémère ; il faut donc nécessairement qu'il y ait autre chose qui
raisonne sur ce qui est opposé au corps et contraire à sa nature. Qu'est cela
encore une fois, sinon l'âme raisonnable et immortelle ? Et elle n'est pas
extérieure au corps, mais lui est intérieure, comme le musicien qui avec sa lyre fait
entendre les meilleurs sons. Comment encore, l'œil étant naturellement fait
pour voir et l'oreille pour entendre, se détournent-ils de ceci et
préfèrent-ils cela ? Qu'est-ce qui détourne l'œil de voir ? ou qui empêche l'oreille d'entendre, alors qu'elle est faite
naturellement pour entendre ? Et le goût, naturellement fait pour goûter,
qu'est-ce qui souvent l'arrête dans son élan naturel ? La main,
naturellement faite pour agir, qui l'empêche de toucher tel objet ?
L'odorat, fait pour sentir les odeurs, qui le détourne de les percevoir ?
Qui agit ainsi à l'encontre des propriétés naturelles des corps ? Comment
le corps se laisse-t-il détourner de sa nature et conduire par les avis d'un
autre, et diriger par un signe de lui ? Tout cela montre que seule l'âme
raisonnable mène le corps. Le corps n'est point fait pour se mouvoir lui-même,
mais il se laisse conduire et mener par un autre, comme le cheval ne s'attelle
pas lui-même, mais se laisse diriger par celui qui l'a maîtrisé. Aussi y a-t-il
des lois chez les hommes, pour leur faire faire le bien et éviter le mal ;
mais les êtres sans raison ne peuvent ni raisonner ni discerner le mal, puisqu’ils
sont étrangers à la rationalité et à la réflexion raisonnable. Ainsi les hommes
possèdent une âme raisonnable ; je pense l'avoir montré par ce qui vient
d'être dit.
Que l'âme soit aussi immortelle, la doctrine de l'Église ne peut l'ignorer,
pour trouver là un argument capable de réfuter l'idolâtrie. On parviendra de
plus près à cette notion, si l'on part de la connaissance du corps et de sa
différence d'avec l'âme. Si notre raisonnement a montré qu'elle est autre que
le corps, et si le corps est naturellement mortel, il s'ensuit nécessairement
que l'âme est immortelle, puisqu'elle est différente du corps. De plus, si,
comme nous l'avons montré, c'est l'âme qui meut le corps, sans être elle-même
mue par d'autres, il s'ensuit que l'âme se meut elle-même, et qu'après que le
corps a été mis en terre, elle se meut encore par elle-même. Car ce n'est pas
l'âme qui meurt, mais c'est quand elle se sépare de lui que meurt le corps. Si
donc elle était mue par le corps, il s'ensuivrait que, le moteur s'éloignant,
elle mourrait ; mais si c'est l'âme qui meut le corps, à plus forte raison
elle se meut elle-même. Et si elle se meut elle-même, nécessairement elle vit
après la mort du corps. Car le mouvement de l'âme n'est pas autre chose que sa vie,
de même aussi que nous disons que le corps vit quand il est en mouvement, et
que c'est la mort pour lui quand il cesse de se mouvoir. On verra cela encore
plus clairement à partir de l'activité de l'âme dans le corps. Quand l'âme est
venue dans le corps et lui est enchaînée, elle n'est pas resserrée et mesurée
par la petitesse du corps, mais bien souvent, alors que celui-ci est couché
dans son lit, immobile, et comme endormi dans la mort, l'âme, selon sa propre
vertu, est éveillée, et s'élève au-dessus de la nature du corps ; comme si
elle s'en allait loin de lui, bien que restant dans le corps, elle se
représente et contemple des êtres supra-terrestres ;
souvent même elle rencontre ceux qui sont au-dessus des corps terrestres, les
saints et les anges, et s'en va vers eux, se confiant dans la pureté de
l'esprit. Comment donc, à plus forte raison, détachée du corps quand le voudra
Dieu qui l'avait liée à lui, n'aura-t-elle pas une connaissance plus claire de
l'immortalité ? Si, quand elle était liée au corps, elle vivait une vie
étrangère au corps, à plus forte raison, après la mort du corps, elle vivra et
ne cessera de vivre, parce que Dieu l'a ainsi créée par son Verbe, notre
Seigneur Jésus-Christ. C'est pourquoi elle pense et réfléchit aux choses
immortelles et éternelles, puisqu'elle aussi est immortelle. De même que, le
corps étant mortel, ses sens contemplent des choses mortelles, ainsi l'âme qui
contemple des réalités immortelles et raisonne sur elles,
doit-elle nécessairement être immortelle et vivre éternellement. Les pensées et
considérations sur l'immortalité ne la quittent jamais, mais demeurent en elle
comme un foyer qui assure l'immortalité. C'est pourquoi elle a la pensée de la
contemplation de Dieu, et devient à elle-même sa propre voie ; ce n'est
pas du dehors, mais d'elle-même qu'elle reçoit la connaissance et la compréhension
du Verbe de Dieu."
Saint Athanase, Contre les
Païens, 32 – 33.
Prière :
Dieu, Tu nous as donné une âme immortelle qui
nous distingue des créatures irrationnelles. Aide-nous à la préserver de
l’influence du Mal et de tout ce qui puisse la salir et l’éloigner de Toi.
Fais-la jouir de ta Vérité et accorde-lui de reposer un jour en Toi pour
l’éternité. Nous te le demandons par Jésus le Christ notre Seigneur. Amen !
Par l'Athénée Pontifical "Regina Apostolorum"
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