LEMONDE.FR | 21.09.09 |
19h27 • Mis à jour le 21.09.09 | 19h33
Un remède pire que le mal ? Selon un sondage
IFOP publié lundi 21 septembre par le Quotidien
du médecin, seuls 42% des médecins libéraux seraient prêts à se
porter volontaires pour être vaccinés contre le virus H1N1. Une adhésion faible
pour une catégorie professionnelle désignée comme prioritaire par le ministère de la santé. Même son de cloche du
côté des infirmiers. Selon les résultats d'une consultation menée par le Syndicat national des professionnels
infirmiers, 26 % seulement des infirmières seraient disposées à recevoir le
vaccin.
Le phénomène ne
touche pas que le secteur médical français. Une étude publiée au Royaume-Uni en août 2009 dans le journal
professionnel anglais Nursing Times
révélait déjà que seulement tiers des infirmières britanniques accepteraient de
se faire vacciner contre le virus H1N1 le cas échéant. Même résultat à Hong
Kong, où une étude publiée dans le British medical
journal révèle que 48 % des personnels de santé refuseraient
l'injection. Si le sondage IFOP mené auprès des médecins libéraux souligne un
lien très clair entre le refus de vaccination et la faible inquiétude des
médecins vis-à-vis du virus (89% des médecins interrogés se sont dits "confiants" devant l'arrivée de l'épidémie),
les autres études révèlent en outre les doutes des professionnels quant à
l'innocuité du vaccin.
LES
ADJUVANTS EN QUESTION
Les inquiétudes
liées au vaccin contre le H1N1 sont de deux types. La première concerne le lien
entre la vaccination contre la grippe et le développement du syndrome de
Guillain-Barré, une affection neurologique rare mais potentiellement grave.
Bien qu'avéré, ce risque ne devrait pas empêcher les gens de se faire vacciner.
"La corrélation entre la survenue
de syndromes de Guillain-Barré et la vaccination contre la grippe est établie
et quantifiée", explique
Carmen Kreft-Jaïs, responsable
de la pharmacovigilance à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits
de santé (Afssaps).
"On observe effectivement un à deux cas supplémentaires de Guillain-Barré
par million de personnes vaccinées." Deux cas qui ne justifient pas une
telle méfiance : "L'évaluation
des bénéfices/risques plaide en faveur de la vaccination",
confirme Vincent Enouf,
responsable du Centre national de référence pour la grippe de l'Institut Pasteur.
"D'ailleurs, le nombre de
syndromes de Guillain-Barré n'est pas plus élevé que pour le vaccin contre la
grippe saisonnière", ajoute-t-il.
Autre sujet
d'inquiétude, la présence d'adjuvants dans la composition du vaccin. Les
adjuvants sont des substances ajoutées au vaccin afin de stimuler le processus
immunitaire et favoriser la fabrication d'anticorps. Or, les adjuvants sont
soupçonnés d'être responsables des effets indésirables susceptibles
d'apparaître à la suite d'une vaccination. Ils présentent notamment un risque
pour les jeunes enfants et les femmes enceintes. Autorisés en France et dans de
nombreux autres pays, les adjuvants sont en revanche interdits aux États-Unis,
un argument très largement repris par les adversaires de la vaccination. Le
ministère de la santé américain a récemment accepté d'accorder une immunité juridique aux
laboratoires pharmaceutiques produisant le vaccin contre le virus H1N1. Une
décision aussitôt interprétée par les lobbies anti-vaccination comme une preuve
de la dangerosité du produit.
Face à la
polémique, la ministre de la santé Roselyne
Bachelot se veut rassurante. "Par mesure de précaution, en
attendant que les procédures de vérifications soient faites, nous proposerons
aux femmes enceintes ou aux personnes immuno-déprimées
des vaccins sans adjuvant", a-t-elle déclaré dimanche 20
septembre lors de son intervention dans l'émission Grand
Jury RTL-LCI-Le Figaro. Concernant
les réticences des personnels de santé à se faire vacciner, la ministre s'est
en revanche montrée confiante. "Je
n'imagine pas qu'un professionnel de santé puisse ne pas se faire vacciner",
a-t-elle ajouté, contredisant des chiffres nettement plus pessimistes.
Audrey Fournier
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