AIDE À LA GRÈCE
LUNDI 15
AOUT 2011
L’analyse des aides accordées à la
Grèce par la prétendue communauté internationale ne doit être effectuée qu'avec
une extrême prudence.
D'abord, il faut noter deux
caractéristiques majeures et anciennes du système grec, qui ne sont pas mises
en lumière par la presse internationale.
En premier
lieu, la corruption : deux familles ennemies-amies se partagent le pouvoir
depuis des lustres et exploitent le pays au profit de leur clan. Les
privilégiés qui bénéficient de leur soutien échappent à l'impôt et placent
leurs actifs dans des paradis administratifs et fiscaux.
Le résultat est que l'État n'obtient pas d'impôts des riches et doit frapper
les classes moyennes. Mais le pays est, simultanément,
soumis à un socialisme extrêmement virulent et ceci quelle que soit la couleur
apparente des gouvernements. Le produit explosif de ces deux facteurs est que
l'économie grecque se traîne depuis longtemps alors que l'ingéniosité des Grecs
est célèbre dans le monde entier et ne peut s'épanouir normalement.
Inévitablement, il en résulte l'ouragan de dettes qui, justement, conduit à
l'impasse présente.
Je ne
citerai pas de chiffres car ce serait perdre son temps : ils changent tous
les jours et personne ne comprend rien à la valse des milliards ; même
s'ils ne changeaient pas, ils sont pratiquement dénués de signification réelle.
LA DÉMOCRATIE
EN DÉROUTE
Devant le
désastre, cette communauté internationale s'agite pour apporter de l'aide.
Celle-ci est fournie par des États qui, au lieu de porter vraiment remède, se
contentent de replâtrer dans l'attente de leurs propres échéances électorales.
Que ce soit
Georges Papandreou, Merkel, Obama, ou Sarkozy personne ne songe vraiment à une
solution véritable. Chacun à l'œil rivé sur les prochaines élections qu'il
devra subir et sur la température de ces élections sous la forme de sondages
divers. Ils veulent échapper, le moment venu, à une trop grande part de
responsabilité et peu importe le reste : ce qui compte c'est la perception
qu'auront les électeurs de la situation au moment des élections. Il faut
absolument capitaliser sur une certaine image et la valoriser quand le bulletin
de vote glissera dans l'urne. La démocratie n'est pas le
gouvernement au service du peuple, mais le système qui permet au peuple d'avoir
l'illusion d'être, un instant, maitre de son destin. J'ai décrit tout cela
dans un livre intitulé « La démocratie ou le rêve en morceaux ».
Pour ce qui
concerne les mesures financières à prendre pour, soi-disant, sauver la Grèce,
les mêmes prédateurs internationaux se retrouvent également. Tous
fraternellement unis, ils ont l'idée complètement folle de sauver l'euro :
le défaut éventuel de la Grèce conduirait en effet inévitablement à sa sortie
de l'euro ce qui fragiliserait l'ensemble. Mais l'euro n'est qu'un appendice
inutile et néfaste de la construction européenne. En arrière-fond se trouve le
projet de sauver celle-ci, à laquelle ces prédateurs internationaux vouent un
véritable culte, pour des raisons diverses. Ils profitent justement de cette
crise pour pousser l'idée d'une gouvernance économique européenne qui, selon
eux, la ferait avancer.
UNE
INONDATION D'ARGENT
Sur le plan
pratique, ils noient la Grèce sous une avalanche d'argent créé artificiellement
par divers mécanismes expliqués dans la presse et qui d'ailleurs varient au fur
et à mesure du déroulement de l'opération. Trichet, lui-même, s'est mis de la
partie. En fait, c'est de l'argent volé aux citoyens de l'ensemble de
l'Europe et d'ailleurs bien au-delà grâce à l'intervention du FMI. Les
chiffres en ascension constante montrent que l'on verse de l'argent dans un
trou sans fond. Le résultat certain est que l'Europe, déjà fort malade
sur le plan économique, va continuer à se traîner, la France se signalant
particulièrement avec sa panne de croissance.
L'affolement
du pouvoir en France est tel qu'il nous est promis de la « rigueur ».
La vraie rigueur serait de tailler dans le vif des dépenses publiques. Parmi
elles, se trouvent les frais extravagants de la formidable pyramide d'élus,
unique au monde, qui fait crouler l'économie : il n'est pas question d'y
toucher. Tout tourne autour du choix de nouveaux
impôts : voir le rabotage des niches fiscales, présenté mensongèrement
comme une façon d'économiser !
Le pire est
que le résultat espéré ne répond pas du tout aux attentes : L'incendie
n'est nullement contenu, mais se propage en Espagne, en Italie, au Portugal, à
l'Irlande et peut-être bientôt ailleurs. Quant au marché, il montre bien qu'il
n'attache aucun crédit à ce comportement : nul ne peut lutter longtemps
contre le marché.
Le FMI,
quant à lui, poursuit le rôle néfaste qu'il a toujours joué. Il est attaché
uniquement à l'équilibre des comptes de l'État et ne se préoccupe pas de la
libération nécessaire de l'économie. L'équilibre recherché dévaste l'économie
et punit durement le peuple grec poussé au désespoir.
IL NE
FALLAIT PAS AIDER
Dans
l'hystérie générale qui agite les prédateurs publics et aussi l'opinion
générale malaxée par la presse, il est nécessaire pourtant de dire qu'il ne
fallait pas aider la Grèce.
Deux
objections peuvent être éventuellement formulées. D'abord, il est grave qu'un
État fasse défaut : il est facile de répondre que les méthodes choisies
conduisent précisément à un défaut de la Grèce malgré toutes les apparences. Il
y a aussi le problème des banques dont, par exemple, certaines banques
françaises qui se sont aventurées ; certes, cela existe mais il est
probable qu'elles peuvent parfaitement supporter ; en outre il est bon de
châtier les mauvais banquiers. La méthode actuelle a un effet parfaitement
contraire : elle revient à délivrer à tous les banquiers du monde une
sorte de permis de mauvaise gestion puisqu'ils croient avoir une garantie
implicite des États, quelle que soit leurs choix.
Si la Grèce
n'était pas aidée, elle trouverait certainement, étant donné l'ingéniosité du
peuple grec, la façon de s'en sortir et même peut-être de rembourser ses
dettes.
VERS
L'INFLATION
En regard,
nous avons deux perspectives. D'abord l'incendie qui s'étend partout. Ensuite
nous nous trouvons devant une grande probabilité d'inflation même si, par
diverses combinaisons, elle ne semble actuellement pas en vue ; dans
l'histoire, on n'a jamais vu des États surendettés arriver à payer leurs dettes
sinon par de l'inflation : il existe des exemples fameux et pas si
lointains.
En
conclusion, les contribuables-spectateurs de ce cirque ridicule, seraient
avisés de prévoir quelque part dans la gestion de leurs intérêts, modestes ou
non, la probabilité d'une inflation éventuellement importante, à une date
difficile à prévoir.
Michel de Poncins
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