CHRISTIANOPHOBIE À BRUXELLES
Scandale : Le Conseil des ministres de l'Union se refuse à parler de "persécutions antichrétiennes"
en Orient. Par lâcheté...
Valeurs actuelles 10 février
2011 page 40
Les vingt-sept
États membres de l'Union avaient condamné, à l'unanimité, les attentats d'octobre et de décembre contre des églises chrétiennes à Bagdad et à Alexandrie. Nicolas Sarkozy avait même évoqué « un plan pervers d'épuration religieuse ». Cette belle union européenne vient de se briser à l'occasion de la réunion des ministres européens des Affaires étrangères tenue à Bruxelles, le 31 janvier, sous la présidence de Catherine Ashton, haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité. La déclaration sur la liberté religieuse et les persécutions antichrétiennes aurait pourtant dû rassembler tout le monde. Il n'en a rien été. Le mot « chrétien » prévu dans le texte a fait
peur. Des ministres - parmi eux, le
Britannique, le Suédois, l'Espagnol, le
Portugais, l'Irlandais, le Luxembourgeois et
le Chypriote - ont expliqué qu'une formulation trop précise pourrait être
utilisée à mauvais escient par les
terroristes. Une idée a été lancée (par
Michèle Alliot-Marie) : mentionner
aussi la communauté chiite !
PRÉSIDENTE : La Britannique Catherine Ashton (avec Pierre Vimont) : "Nous allons réfléchir
au sujet..."
Soutenu par Mme Alliot-Marie, le ministre
italien Franco Frattini s'est insurgé
contre cette dictature du "politiquement correct" : « Ce texte n'inclut aucune mention des chrétiens, comme si nous
parlions d'autre chose ! » Prudente - sinon
timorée -, Catherine Ashton ajournait
la question sine die, affirmant que les Vingt-Sept s'étaient mis d'accord « pour revenir sur le sujet et
réfléchir »... Tout avait
pourtant bien commencé, début
janvier, au lendemain des attentats. Le 5,
quatre ministres adressent une
lettre à Catherine Ashton : Franco Frattini
(Italie) et Michèle Alliot-Marie, rejoints
par Jànos Martonyi (Hongrie) et
Radoslaw Sikorski (Pologne) sont
clairs : « La situation des chrétiens vivant dans certains pays du Proche et du Moyen-Orient connaît une dégradation préoccupante, voire tragique, qui les conduit à l'exil. » Ils demandent
que cette question soit inscrite au
Conseil des ministres du 31 janvier,
appelant Mme Ashton à faire des
propositions pour promouvoir le
respect de la liberté de religion. Un point
épineux apparaît pour certains : la
reconnaissance explicite de la réalité de la persécution antichrétienne.
Le 20 janvier, le Parlement européen invite à son tour l'Union
européenne à débattre sur « la
persécution des chrétiens ».
Sa résolution dénonce « des
manifestations de violence à
l'encontre des
communautés chrétiennes, notamment dans des pays d'Afrique, d'Asie et du Moyen-Orient ». Les termes sont assumés.
"Un langage qui refuse de reconnaître le fait chrétien"
Le même jour, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe adopte lui aussi une résolution sur la liberté religieuse, mais en renonçant à toute mention de "christianisme". Pourquoi ? Pour que la Turquie accepte ce texte, au nom du consensus...
Une semaine plus tard, l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe adopte sa propre recommandation sur « la violence à l'encontre des chrétiens » au Proche et au Moyen-Orient. Le texte rappelle que « la chrétienté
a pris sa source au Proche-Orient il y a
2.000 ans », invoque « la liberté de changer de
religion », affirme enfin que « la disparition des communautés chrétiennes du Proche et du Moyen-Orient serait aussi catastrophique pour l'islam, car elle signifierait la victoire du fondamentalisme ». Sur sa lancée, l'assemblée invite même à
lutter contre « les préjugés antichrétiens et la christianophobie ». C'est dire si l'incident du 31 janvier
a choqué. Le président du Conseil
pontifical pour la nouvelle
évangélisation, Mgr Rino
Fisichella, l'a dit au micro de Radio Vatican : « Le contrôle du langage est devenu insupportable et je ne veux plus respecter un langage qui refuse de reconnaître le fait chrétien. » Directeur national de l'Aide à l'Église en détresse, Marc Fromager regrette lui aussi cette attitude : « Par son refus de spécifier la tragédie de la persécution antichrétienne, l'Europe étale une fois encore son insignifiance politique. »
« C'est de la lâcheté à court terme, et de l'inconséquence à long terme », estime Grégor Puppinck, directeur du Centre européen pour la justice et les droits de l'homme (ECLJ). Le cabinet de Michèle Alliot-Marie se dit mobilisé : « C'est un sujet
qui lui tient suffisamment à cœur
pour qu'elle ne le lâche
pas. »
RAPHAËLLE AUTRIC
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