DEXIA : LA RUINE DES CONTRIBUABLES
Il n'est pas
possible actuellement d'ouvrir un journal sans lire de gros titres sur Dexia.
C'est l'heure des mensonges. Un grand quotidien énonce : « Dexia, la
première banque victime de la crise ». Ce n'est pas vrai, car cette banque
est victime de l'incompétence de ses dirigeants et sans doute de beaucoup de
compromissions. Malheureusement, de nombreuses banques souffrent du fait de la
médiocrité de leurs dirigeants : voir tous ces établissements qui, avec
une légèreté coupable, ont prêté à l'État grec et, ceci, depuis longtemps alors
que les dangers étaient connus des bons analystes.
Un peu d'historique sur Dexia est
nécessaire.
En 1987, il
s'agissait d'une obscure petite division de la Caisse des Dépôts et Consignations,
finançant les collectivités locales. Elle s'en émancipa pour devenir le crédit
local de France, coté en Bourse et privatisé. En 1996, eût lieu un mariage avec
le voisin belge du même métier, l'union recevant un nouveau nom : DEXIA.
L'objectif était de devenir un leader mondial dans le financement des
collectivités locales. L'inconvénient de ce métier est la faiblesse des marges.
Au lieu de chercher à améliorer le cœur du métier, les dirigeants partirent à
l'aventure.
Ce fut,
tout d'abord, la « transformation ». Ils empruntèrent à court terme
pour pas très cher et prêtèrent à long terme pour plus cher ; une
mécanique infernale était lancée. Comme cela faisait de l'argent, les mêmes
mauvais banquiers se lancèrent dans une boulimie d'acquisition d'entreprises,
d'activités, ou même de portefeuilles : Espagne, Italie, Japon, États-Unis
étaient leurs terrains de chasse. Tout baignait, mais ce n'était qu'une
apparence. En 2008, brusquement Dexia eût besoin de 260 milliards d'euros, la
banque n'ayant que quatre jours de liquidités devant elle. Les États belges,
français et luxembourgeois furent appelés au secours. Chemin faisant, l'action
a perdu 94 % de sa valeur...
UN
SAUVETAGE EN URGENCE
Nous en
arrivons à la situation actuelle où le sauvetage est organisé en urgence. Sous
réserve d'autres évolutions, car cela bouge tous les jours, il semble que l'on
s'oriente vers la seule solution logique : vendre tout ce qui est vendable
et cantonner le reste dans une « bad bank », ou banque pourrie, que
le contribuable sera appelé à supporter, bien sûr sans que son avis lui soit
demandé. Cela rappelle de tristes souvenirs des années 1990 : le Crédit
Lyonnais, le Crédit Foncier, la compagnie d'assurances GAN, autres victimes de
scandales d'État.
Les enseignements à tirer de cette triste histoire sont nombreux.
Il y eût
certainement des multiples compromissions. Dans ce monde, où les uns et les
autres se tiennent par la barbichette, les dirigeants principaux n'étaient
certainement pas les seuls à fauter. Avant la découverte soudaine du scandale,
il est évident que des signaux devaient exister : pourquoi le silence ?
Les États
sont directement responsables. Parmi les actionnaires se trouvent non seulement
les États français et belge, mais aussi de faux nez comme la Caisse des Dépôts
et Consignations, instrument tout puissant de l'économie dirigée en France.
LES
MILLIARDS DES CONTRIBUABLES
L'appui des
États pour sauver les meubles a pris de multiples formes : garanties
accordées aux déposants et aux créanciers, perspective d'accroissement des
pourcentages dans le capital : garanties aux futurs emprunts éventuels
lors de la remise en ordre. Personne ne peut, à ce jour, mesurer le nombre de
milliards que les contribuables devront supporter en définitive et tout chiffre
avancé peut être dépassé le lendemain.
Les mauvais
banquiers qui siégeaient avec d'autres dans les conseils d'administration de
Dexia ont été parfaitement enclins à pousser aux secours étatiques, dans
l'espoir que ces États seraient prêts de même à venir au chevet de leur banque
le cas échéant. Simultanément, ils ont été encouragés dans leurs mauvaises
pratiques.
Dans
l'historique nous constatons une boulimie d'acquisitions. Rien de plus
dangereux que de se lancer dans une telle course folle : c'est se heurter
inévitablement au manque de temps et de talents pour analyser les cibles et
mener à bien leur bonne gestion ultérieure, ainsi que la cohérence de
l'ensemble.
Pire
encore, cette voracité s'est réalisée dans un grand nombre de pays ; il
est périlleux de se présenter avec un grand appétit dans un pays étranger que
l'on ne connaît pas. Les nationaux ne manquent pas de vous« refiler »des
patates chaudes ou même des traquenards juridiques car eux seuls connaissent à
fond la loi et les us et coutumes.
LA RUINE
PAR LES COLLECTIVITES LOCALES
Le métier
d'origine, à savoir le financement des collectivités locales, était considéré
comme ne comportant pas de risque : à voire ! En effet, à l'époque,
ces collectivités locales n'étaient pas tellement endettées et ce sont les lois
de décentralisations qui les ont conduites à s'endetter davantage. L'erreur
était funeste car ces collectivités se sont engagées dans des dépenses tout à
fait insensées pour des besoins artificiels parfois même avec des emprunts
toxiques ; des palais ont été bâtis sur endettement public ! La
richesse nationale a gravement souffert de cet emballement.
La
conclusion de cet énième scandale d'État est que si les déposants ou les
créanciers ont pu, éventuellement, être garantis, il n'y a nul espoir pour les
actionnaires. La conséquence malheureuse est de décourager une nouvelle fois
les gens de placer leur argent à la bourse en achetant des actions. C'est
plutôt mélancolique car, dans la déroute actuelle des marchés, c'est justement
le bon moment pour acheter, avec évidemment la plus grande prudence, les plus
belles affaires qui sont littéralement sous évaluée.
Cette
dernière conséquence est particulièrement grave car le développement de
l'actionnariat est une vraie nécessité pour l'accroissement de la richesse nationale.
Michel de
Poncins.
--