DSK : Vérité et Mensonge
Tiré du Nouvel Observateur du 16
juin 2011
« Tout le monde savait » mais cela a
rarement été évoqué ouvertement. Cette phrase souvent citée lors de l’affaire
DSK s’applique aux intellectuels qui n’hésitent pas à recourir aux mensonges et
aux contre-vérités pour étayer leurs thèses. Il ne s’agit pas des erreurs que
chacun peut faire, encore que certains le font plus fréquemment que d’autres,
mais de mauvaise foi volontaire et assumée. Des experts recourent à des
arguments auxquels ils ne croient pas eux-mêmes pour mieux convaincre
l’opinion. Ils le font en toute impunité et continuent d’être encensés par les
médias, alors qu’ils ont été pris à de nombreuses reprises en flagrant délit de
mensonge. C’est une nouvelle « trahison des clercs », puisque au lieu
de mettre leur savoir au service de l’information du public, ils le trompent.
L’honnêteté intellectuelle n’est pas un critère qui conditionne l’exposition
médiatique. On pourrait croire qu’en démocratie le souci de vérité devrait être
sacré. Il n’en est rien. Le parler bien est préféré au parler vrai à condition
bien sûr d’aller dans le sens des préjugés dominants. Récemment la
stigmatisation de l’islam fut l’un des plus puissants. La dénonciation du
terrorisme s’est, elle, souvent accompagnée d’amalgames douteux et de libertés
prises avec la rigueur intellectuelle. La percée d’un concept aussi creux que
« islamo-fascisme » (qui alterne avec l’islamo-gauchisme) rappelle l’hitléro-trotskisme d’antan. La justesse des causes ne
devrait pas excuser la déloyauté des moyens. Lorsque les élites mentent,
lorsque la connivence de certains médias protège leurs mensonges, il ne faut
pas s’étonner que le public, qui n’est pas dupe, s’en détourne. Les faussaires
alimentent donc le populisme, qu’ils disent pourtant combattre.
PASCAL BONIFACE*
* Vient de publier « les
Intellectuels faussaires » aux éditions JC Gawsewitch.
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