Nicolas Sarkozy rétablit la vignette automobile
Il faut croire que les caisses de l'État sont vraiment vides. Christine
Lagarde, le ministre de l'Économie, vient d'obtenir l'aval de Nicolas Sarkozy
pour rétablir dès l'an prochain la vignette automobile ! Un impôt supprimé
en 2001 par... Laurent Fabius, ministre de l'Économie de Lionel Jospin. Comme
si les automobilistes n'étaient pas assez ponctionnés !
La décision ne devait être rendue publique qu'après les élections
européennes, afin de ne pas fragiliser les listes de l'UMP, mais c'était
compter sans les réseaux dont dispose encore le Parti socialiste au sein de
l'administration fiscale. D'où cette fuite, qui redistribue les cartes pour le
scrutin et ne va pas aider à la lisibilité de la campagne, puisque c'est le
Parti socialiste qui va dénoncer la pression fiscale, et l'UMP qui va devoir la
justifier !
Dès l'été 2007, le premier ministre François Fillon avait mis les Français
en garde: « Les caisses sont vides.(1)» Manière de dire aux salariés de la fonction
publique qu'il était vain de réclamer des augmentations de salaires et à ceux
du privé que l'État ne pourrait pas voler à leur secours.
Mais la crise financière mondiale est survenue, et Nicolas Sarkozy a été
obligé de lâcher du lest, au grand dam de Fillon qui, le mois dernier, a lâché :
« On est en train de creuser la
dette dans notre pays, il ne faut pas se raconter d'histoires. » Mais
pour s'endetter, il faut emprunter. Or la note de la France sur le marché
international est en train de se dégrader, de sorte que le coût du crédit est
de plus en plus élevé. Jusqu'à devenir excessif ou qu'à ce que la France ne
trouve plus les liquidités dont elle a besoin ?
Depuis plusieurs mois, Christine Lagarde, mieux placée que quiconque pour
connaître, au-delà de ses discours lénifiants, la situation réelle du pays,
insistait pour que l'on instaure de nouvelles recettes. Refus systématique de
Sarko, soutenu par Éric Woerth, ministre du Budget et grand trésorier de l'UMP,
le chef de l'État ayant même confié, selon des propos rapportés par le Canard
enchaîné : « Cette c.... n'a décidément aucun sens politique !
Un nouvel impôt ? Et pourquoi ne
pas taxer les portes et fenêtres tant qu'elle y est ! » Finalement,
c'est lors d'une réunion qui a eu lieu à l'Élysée le lundi 5 mars au soir,
en présence du premier ministre et des ministres concernés, que Nicolas Sarkozy
a donné son feu vert à Christine Lagarde. À deux conditions : qu'il ne
s'agisse pas d'un nouvel impôt mais du rétablissement d'« une taxe supprimée de façon inconsidérée par la gauche »
(tel sera l'axe de communication) ; et qu'elle ne soit bien sûr rétablie
que « pour une durée limitée »
(l'air est connu), le temps que la
France absorbe la crise mondiale (2).
Jean-Louis Borloo, ministre de l'Écologie, qui était présent, a obtenu que
les « véhicules propres » en soient exemptés, sous réserve, et
c'était une demande de Luc Chatel, le secrétaire d'État à l'Industrie, soucieux
de ne pas affaiblir un peu plus un secteur automobile déjà très fragilisé,
qu'ils aient été acquis à compter du 1er juin 2009.
La nouvelle vignette automobile
entrera donc en vigueur au 1er janvier prochain, et le
texte devrait être promulgué par décret au cours de la deuxième quinzaine de
juin, une fois les européennes passées et juste avant les départs en vacances,
période assez peu propice aux manifestations.
La seule bonne nouvelle est que la proposition de supprimer les
départements a été définitivement enterrée par l'Élysée : la nouvelle
vignette, qui sera disponible chez les débitants de tabac le 1er septembre,
est départementalisée en fonction du lieu de résidence du propriétaire du
véhicule, et chaque conseil général pourra décider du monument qui figurera sur
le pare-brise. Mais c'est tout : les recettes fiscales, elles, iront à l'État
et l'automobiliste continuera d'être une vache à lait.
Bruno Larebière
(1) Et malgré cela, nous
déclarons la guerre à la Lybie !
(2) Qui n'est pas prête de se terminer !
--