La Lettre de Paix Liturgique
LE CARDINAL-PRÉSIDENT DES ÉVÊQUES DE
FRANCE PERD SON CALME
APRÈS LE RECOURS AUX FORCES DE POLICE
LE 23 JANVIER 2010 À PARIS,
« LA GUERRE
OUVERTE ET SANS CONCESSION, DÉFINITIVE ET FÉROCE, ENTRE LE CARDINAL VINGT-TROIS
ET LES TRADIS » SELON GOLIAS
Depuis plusieurs semaines, la question de
l’application du Motu Proprio est devenue encore plus sensible dans les
diocèses de France et en particulier à Paris. Ici et là, on constate des
raidissements épiscopaux contre les fidèles ou les prêtres attachés à la forme
extraordinaire du rite romain, des refus inexplicables à des demandes légitimes
d’application du Motu Proprio, des retours en arrière à une situation
d’apartheid là où les choses commençaient à s’améliorer, le retour des vexations
et des petits gestes qui rendent le quotidien difficile. Pourquoi donc ?
C’est que la pression des chiffres catastrophiques des
séminaires, des catéchismes, de la pratique, du denier du culte moleste en
permanence le monde épiscopal. L’atmosphère des assemblées de Lourdes est
calamiteuse. Certains veulent y calculer la moyenne d’âge du clergé qui
reste : 65 ans ? 70 ans ? 75 ans ? Peut-être plus. Mais
alors, c’est la fin…
Et dans le navire qui prend l’eau, on écope ? Surtout
pas ! Après avoir longtemps nié l’évidente évidence, on accuse maintenant
les accusateurs, ces pelés, ces galeux, qui osent représenter un catholicisme
qui vit encore, comme avant. Mais sacrebleu, il faut les faire taire ! Des
rumeurs, des bruits de couloirs, des menaces, des tensions, du chantage, contre
ceux qui ont le front de produire des vocations, qui ont le culot de remplir
les églises… Quasiment pas une journée ne se passe, sans que le Cardinal
Vingt-Trois n’ait un coup de sang sur une radio chrétienne, dans une conférence
de carême qui tourne au vinaigre, au cours d’un entretien où les journalistes
l’embêtent. Il y a beaucoup d’électricité dans l’air épiscopal français. Et à
Paris, on vous laisse imaginer…
C’est dans ce contexte qu’a paru un article très récent de
Golias (30 mars 2010). Selon les bonnes règles d’herméneutique, il faut
bien sûr rechercher la part d’information juste – souvent de valeur, en raison
des réseaux ecclésiastiques de gauche dont dispose cette revue – derrière la
visée partisane de la revue, hostile pour bien des raisons au cardinal de
Paris, mais bien plus hostile encore au monde du Motu Proprio. En termes
empruntés à la bonne vieille CGT et au bon vieux PC, Golias et le Cardinal sont
pour une part des « alliés objectifs » et il leur arrive de faire
« un bout de chemin ensemble ». Et que « révèle » donc
Golias ? Pour dire vrai, ce que nous savions déjà. Mais nous n’aurions pas
osé présenter ainsi cette torve manœuvre, qui n’est pas jolie du tout. Mais
puisque c’est Golias qui le dit…
Voici la conclusion de l’article de Golias :
« C’est désormais la
guerre ouverte et sans concession, définitive et féroce, entre le cardinal
Vingt-Trois et les tradis. Une guerre à haut risque. Pour les deux
protagonistes.
Vingt-Trois pourrait bien obtenu (ndlr : obtenir ?) une
victoire en faire (ndlr : faisant ?) casser à Rome le recours du curé Michel contre l’évêque d’Evreux. En
tout cas, la crise de crédit moral qui frappe aujourd’hui Benoît XVI à cause
des abus sexuels et l’affaiblit notablement pourrait favoriser d’autres actions
en coulisses du cardinal de Paris contre les tradis les plus violents. À
commencer par un possible « monitum » (avertissement) de Rome même qui rappellerait l’autorité épiscopale.
Par exemple signée par le cardinal préfet de la congrégation des évêques,
Giovanni Battista Re, dont on sait combien il est en colère à cause de la
complaisance du Pape envers les intégristes. »
Nos commentaires, dont on pardonnera
l’humeur, mais trop c'est trop :
1/ Cette histoire de « condamnation » par un « monitum » est en fait une
interprétation transformée de ce qu’avait déjà révélé le blog Summorum
Pontificum, du 5 février dernier http://www.summorum-pontificum.fr : « Mgr Vingt-Trois demande la
condamnation des demandeurs du Motu proprio ». En raison de la fuite
(organisée par Rome ?) sur la démarche du cardinal de Paris, flanqué de
Mgr Simon, auprès du cardinal Levada (et non du cardinal Re, qui boucle ses
valises), le Président de la CEF en a été pour sa courte honte et sa rouge colère.
2/ Golias qui se définit
comme « l’empêcheur de croire en rond » exprime la pensée de la
partie dite « soixante-huitarde » du clergé français actuel
(évaluable à un quart des effectifs, mais très active et bien incrustée dans
les rouages directeurs diocésains) et globalement celle de l’aile gauche
correspondant à ce clergé dans la Conférence des Évêques de France, autrement
dit celle de Mgr Simon, de Mgr Rouet, de Mgr Dagens. Lesquels passent leur
temps à faire sentir au cardinal-président qu’il a besoin de leur appui. Quant on
sait qu’on parle beaucoup dans les milieux ecclésiastiques, et que sur le mode
de l’humour rogue qui est le sien, le cardinal de Paris « lâche »
beaucoup d’informations, qui ne tombent pas dans l’oreille de sourds, on
comprend comment elles arrivent dans les officines lyonnaises de Golias. Lequel
Golias « informe » à sa manière. Mais derrière cette fumée
d’info/désinfo, il y a une part de feu, comme dit le proverbe.
3/ Ces méchants « guerriers » visés par Golias et par
le cardinal ne sont que ces pauvres familles qui depuis quarante-cinq ans ont
dû faire le parcours du combattant pour que soit délivré un catéchisme
catholique à leurs enfants, qui ont avalé dix mille couleuvres pour se faire
concéder une messe à l’ancienne dans une chapelle retirée des bords de la
ville, qui dépensent une immense peine et beaucoup d’argent à organiser des
écoles catholiques (que les écoles catholiques « officielles »
commencent d’ailleurs à imiter), qui engendrent encore autant de vocations
sacerdotales et religieuses qu’avant le Concile, lesquelles sont obligées
d’aller se réfugier presque honteusement dans des communautés
« parallèles ».
Sans l’Emmanuel et les tradis (dont 80% au moins ne sont pas des
tradis d’origine), vous savez bien Messeigneurs, que la France serait dans la
même sécheresse de vocations que la Belgique, l’Allemagne, la Suisse. Et quand,
s’appuyant sur un texte du Pape, ces abominables « guerriers »
demandent respectueusement la concession d’une messe, vous les méprisez, vous
les ignorez, et même il arrive que vous leur envoyiez des cars de policiers –
qui sont très ennuyés, d’ailleurs –, lorsque après avoir tout essayé pour se
faire entendre, ces malheureux osent … venir dire le chapelet dans vos églises.
4/ La question de fond est : comment quarante-cinq ans après
le Concile, et alors que l’on n’a que le « Peuple de Dieu », la
« place des laïcs dans l’Église » à la bouche, peut-on encore ainsi
dédaigner une part des fidèles qui ne demande qu’à vivre dans l’Église et à la
faire vivre, et les traiter comme des opposants à mâter, des personnes indignes
de participer des communautés chrétiennes ? C’est qu’en fait,
quarante-cinq ans après le Concile, pour le Cardinal Archevêque de Paris, le
cléricalisme est plus vivant que jamais : les condamnations romaines
pourraient encore avoir du bon. Et Golias, tout Golias qu’il est, est prêt à
donner un coup de pouce à ce retour de l’Inquisition.
5/ Ce qui horripile au maximum Golias comme le cardinal de Paris,
la gauche comme le centre de l’épiscopat, c’est que ceux qu’on avait
défenestrés sont rentrés par une porte puis par une autre, et puis encore par
une autre (et certains n’étaient jamais sortis). Exclus, ré-exclus,
re-ré-exclus, ils sont toujours là ! Et même, ils sont plus nombreux que
jamais. La preuve ? Tous les sondages réalisés ces dix dernières années, à
travers le temps et l’espace, concordent pour dire qu’au moins 1/3 des fidèles
pratiquant dans les paroisses – vous entendez bien M Terras ? vous
entendez bien Éminence ? 1/3 des pratiquants qui restent dans les
églises ! –, le feraient dans la forme extraordinaire si elle y était
célébrée (voir site de Paix Liturgique). Et demain, sachez-le bien, ils seront
la moitié, avec les prêtres ordonnés aujourd’hui. Oui, c’est bien dommage pour
vous, mais vous avez tout faux !
6/ Alors, il reste bien sûr le coup classique du silence. Tout le
monde sait que le téléphone fonctionne beaucoup entre évêques de France :
« Allo, André, j’ai un groupe qui demande une messe dans une paroisse du
centre du diocèse ? Qu’est-ce qu’il faut faire ? » –
« Surtout, tu ne réponds rien : tu les ignores ! » Comme le
note l’excellent site Summorum Pontificum Observatus déjà cité, à propos de la
dernière Assemblée plénière des Évêques de France réunie à Lourdes en mars
dernier « Dans ce constat de
renouveau (ndlr : le constat du Cardinal Vingt-Trois), deux absents de marque : les groupes
des communautés nouvelles et les traditionalistes. Or, il s’agit aujourd’hui,
avec les milieux du scoutisme traditionnel, qui sont intergroupes, si l’on peut
dire, des deux parties du catholicisme français qui donnent le plus de
vocations et de conversions. (…)
Et, puisque le cardinal-président de
la Conférence des évêques de France se déclare « interrogé par de nouvelles
façons de vivre la foi qui se développent dans les nouvelles générations, et
les communautés », nous pouvons avec respect et fort humblement lui conseiller
de visiter les lieux de culte traditionnel, les monastères et abbayes
traditionnels, les groupes de jeunes traditionnels, etc. Il verra des façons de
vivre la foi, à la fois nouvelles – au regard de ce qui se pratique aujourd’hui
– et anciennes – puisque fidèles à la Tradition catholique. »
Le Cardinal-Président et la majorité des évêques ignorent les
demandeurs de la forme extraordinaire.
Ils les ignorent officiellement. Car dans les couloirs (et même
dans les discussions sur l’enquête de Mgr Planet : voir notre lettre
221 du 14 mars 2010 ils n’ont parlé (presque) que de ça.
Et quand ils iront
faire leur visite ad limina à Rome, en fin d’année, ils ne penseront (presque)
qu’à ça.
MAIS POURQUOI TANT
D'IGNORANCE CHEZ LE CARDINAL DE PARIS ?
Dans un livre récent* (mars 2010) sorti dans
l’indifférence générale, ont été publiés divers entretiens dans lesquels le
Cardinal Vingt-Trois a bien voulu livrer sa pensée sur un certains nombre de
sujets. Nous nous faisons un devoir de faire de la publicité pour ce livre,
spécialement pour les quelques pages, dans lesquelles le Cardinal résume sa
pensée – osera-t-on dire son idéologie ? – avec un mépris rageur et
confondant, sur la question de ce que le journaliste appelle les
« intégrismes »
Voici le texte des pages 208 à 211 que nous reproduisons "In
extenso".
QUE PENSEZ-VOUS DES INTÉGRISTES ?
Les intégrismes sont un phénomène
permanent et commun à toutes les religions. Dans la situation française - et
c'est une particularité -, le mouvement d'intégrisme catholique est
indissociable d'une histoire de la pensée et de la vie publique qui remonte à
la première moitié du XXème siècle. Avec l'Action Française s'est élaborée une
conception de l'État et du rôle de la religion dans l'État telle que Charles
Maurras l'avait imaginée, où la religion est considérée comme un soutien du
fonctionnement de l'État, indépendamment des croyances que l'ont peut avoir.
Donc ce n'était pas la foi qui définissait la place de la religion, mais son
rôle dans la société. En caricaturant à peine, on pourrait dire que Maurras
était partisan du catholicisme, sauf de son contenu.
Et cette tradition philosophique
politique fut pour une bonne part – à quelques notables exceptions près –
associée au régime de Vichy, puis réinvestie plus tard par certains partisans
de l'Algérie française. Nous avons une longue tradition de combats politiques
dans lesquels l'attachement à une forme de la vie de l'Église était
indissociable du militantisme politique.
Là-dessus est venue se greffer la
résistance de Mgr Lefebvre au concile Vatican II, son incapacité à reconnaître
l'autorité du concile.
Il s'est placé en détenteur de la
vérité face à ceux qui ne l'avaient pas. Il ne s'agissait pas simplement de
contester des votes acquis à l'unanimité moins quelques voix, mais d'un
désaccord sur des conceptions fondamentales de la liberté humaine, sur la
relation de l'homme avec Dieu et l'exercice de la liberté de conscience.
Ce mouvement, qui s'est manifesté de
façon privilégiée dans des polémiques sur la liturgie, est en fait porteur
d'une controverse beaucoup plus profonde, comme l'ont montré d'ailleurs les
épisodes récents. Je me réfère aux décrets de Jean-Paul II et de Benoît XVI
visant à libéraliser les usages liturgiques, qui ont fait encore mieux
ressortir que, pour un certain nombre, la question liturgique était relative,
sinon secondaire.
La question fondamentale est assez
simple : est-on dans la communion de l'Église avec le pape et les évêques,
ou est-on dans une « contre-Église » qui veut juger le pape et les
évêques ?
À part cela, un nombre important de
gens de bonne foi ne connaissent pas ce débat de fond, et n'y participent pas.
Ils se déterminent sur des signes extérieurs : à savoir si on dit la messe
tourné vers les fidèles ou non, ou si on la dit en latin ou en français. Ce
sont des gens de bonne foi qui profondément ne veulent pas se détacher de
l'Église. Ils ne voient pas ou ne savent pas qu'il y a un arrière-fond à ce
qu'on leur propose.
Le pape Benoît XVI a mis en route un
processus pour libéraliser la pratique liturgique. Ce qui s'est fait, avec des
tensions ici ou là. Globalement, sa décision a permis d'accueillir plus
largement une demande liturgique différente. Plus profondément, il a dévoilé le
véritable enjeu et mis en place les conditions d'un dialogue théologique.
De la part du pape, nous connaissons
la limite de ce dialogue : la reconnaissance pleine et entière du concile
Vatican II. De la part des intégristes, ce que l'on entend le plus souvent,
c'est le désir de ramener Rome à la vérité. Ce sont les positions de départ.
Le ministère du pape est par
définition un ministère d'unité. Il est normal qu'il se dépense pour éviter de
laisser se cristalliser une fracture et de lui donner une pérennité de
plusieurs siècles. Qu'il réussisse, ce que je souhaite, demandera infiniment de
temps et surtout le désir intérieur de faire l'unité.
RESSENTEZ-VOUS DE LA VIOLENCE CHEZ LES
INTÉGRISTES ?
Je perçois chez certains une
irascibilité et parfois des mouvements violents, au moins verbalement. Je ne
crois pas qu'il y ait une violence physique. C'est plus une violence de
l'esprit, intellectuelle, une espèce d'attachement irrationnel à des positions
définies et une grande difficulté à accepter d'entrer dans une relation de
dialogue.
En étant modeste, 60% de Français se
réclament du catholicisme, soit trente-six millions de personnes. À combien
peut-on estimer le nombre de ceux qui sont résolument attachés à un mouvement
intégriste ?
Personnellement, j'interprète cela
plus comme l'expression d'une détresse d'un certain nombre de gens qui
n'arrivent pas à penser leur situation dans le monde actuel et qui ont besoin
d'être reconnus par leur Église pour s'assurer une certaine sécurité mentale et
humaine.
LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
Charmant, n’est-ce pas ? Ce texte est extrêmement
intéressant puisqu’il résume en quelques pages les préjugés du Cardinal
archevêque de Paris et explique de manière lumineuse les raisons de son
opposition viscérale au Motu Proprio de Benoît XVI.
Le cardinal Lustiger n’aimait pas, lui non plus, les
traditionalistes de tous poils, mais pas au point de déverser en si peu de mots
tant de mépris. Il est vrai que son successeur doit gérer l’effondrement de
l’Église de France et la montée en puissance des communautés nouvelles
(L’Emmanuel) et des traditionalistes. Lorsque Jean-Marie Lustiger devint curé
de Sainte-Jeanne-de-Chantal, en 1969, il eut comme vicaire André Vingt-Trois,
qui devint tout de suite l’alter ego, le conseiller le plus écouté, qui restera
pratiquement durant 30 ans à ses côtés (sauf l’épiscopat de Jean-Marie Lustiger
à Orléans), jusqu’à la promotion d’André Vingt-Trois à l’archevêché de Tours,
en 1999, nécessaire pour le faire accéder au siège de Paris le jour venu.
Professeur de théologie morale à Issy-les-Moulineaux durant sept ans, il y
avait alors une réputation d’homme relativement « avancé ». Dès le
retour de Jean-Marie Lustiger à Paris comme archevêque, en 1981, il devint
immédiatement vicaire général. En 1988, à 46 ans, il est fait évêque
auxiliaire. Il sera le plus parfait des seconds pour le charismatique cardinal.
Le cardinal Lustiger s’était retiré à la Maison Marie-Thérèse où Chateaubriand
écrivait ses Mémoires d’outre-tombe. André Vingt-Trois est comme les Mémoires
d’outre-tombe de Jean-Marie Lustiger. Sans le style Chateaubriand. Ni Lustiger.
1/ Des propos malintentionnés
A l’heure du Motu Proprio il eut été du rôle du Cardinal
archevêque de Paris de nuancer l’appellation peu reluisante
« d’intégrismes » pour aborder la question des fidèles attachés à la
forme extraordinaire du rite romain. Comme le disait le Cardinal Lucas Moreira
Neves, défunt primat du Brésil, ancien préfet de la Congrégation pour les
Evêques « les étiquettes, c'est pour les insectes… ». Cette
globalisation (le cardinal devrait savoir que 80% au moins des familles qui
participent aux pèlerinages de Chartres, celui de Chrétienté et celui de la
FSSPX, ne sont pas des traditionalistes historiques) est d’autant plus
surprenante de la part du Cardinal qu’il ne cesse partout ailleurs dans ce
livre d’expliquer qu’il faut traiter avec nuances les gens (féministes,
personnes homosexuelles…) et qu’il convient de voir au cas par cas. Toujours
accorder l’a priori favorable, conformément à la morale catholique… sauf avec
les catholiques traditionnels en somme…
Par ailleurs, en expliquant sans nuance que l’intégrisme est
« un phénomène commun à toutes les religions », le Cardinal ne fait
rien d’autre que ce que font régulièrement les journalistes qui veulent s’en
prendre à l’Église, à Benoît XVI et aux fidèles attachés à la forme
extraordinaire du rite romain : Intégrisme = terrorisme = messe en latin =
adeptes du Temple Solaire… FSSP, Saint Nicolas du Chardonnet = Ben Laden.
Reductio ad Al Qaida !
2/ Des propos sans nuance
Dès les premières lignes, on est frappé par l’absence de nuance
et la définition magistérielle et infaillible que dresse le Cardinal des
fidèles attachés à la forme extraordinaire du rite romain : ils sont
comme-ci, ils viennent de là, ils veulent cela. Fermez le banc !
Ne sommes nous pas en droit d’attendre de la part d’un Cardinal
Archevêque de Paris, Président de la Conférence des évêques de France, un peu
plus de hauteur, un peu plus de connaissance de son sujet que n’aurait un jeune
adolescent exalté ?
3/ Des propos anachroniques
« Action Française », « Charles
Maurras », « régime de Vichy », « Algérie
française »… ? Le Cardinal Vingt-Trois se prend pour le Cardinal
Lustiger et semble en tous les cas se complaire dans les caricatures du passé.
Son propos en est d’autant décrédibilisé.
Des dizaines de jeunes gens (nés dans les années 1980/90) entrent
actuellement dans les séminaires attachés à la forme extraordinaire du rite
romain ? La faute à Maurras et à Pétain bien sûr !
Un texte fait pour l’Église universelle, un attachement aux
livres liturgiques traditionnels à travers le monde ? Le Cardinal vous le
dit : des maurrassiens ! Les centaines de Franciscains de l’Immaculée
qui ont fait le choix des livres liturgiques traditionnels ? Des
pétainistes on vous dit !
Tout ceci n’est ni sérieux ni crédible.
Si le Cardinal Lustiger a pu – à son époque – se tromper de bonne
foi et se persuader de cette vision politique de la liturgie, une telle posture
n’est plus possible en 2010. Le monde change, les lignes bougent. Le Cardinal
archevêque de Paris dans son palais épiscopal ne s’en rend pas compte. Il sait.
Il enseigne. Les faits lui donnent tort ? Mais quels faits ? Quels
fidèles ?...
4/ Des propos qui entretiennent la
confusion
Pour le cardinal de Paris, les partisans de la messe
traditionnelle sont tous des rebelles (= FSSPX, dont on rappelle au cardinal
que le Pape a levé les excommunications qui pesaient sur les évêques depuis le
21 janvier 2009).
Qui plus est, en 1970 déjà, avant la fondation d’Écône, les
« silencieux de l'Église », aujourd’hui des sondages multiples
réalisés dans l’espace et dans le temps, nous indiquent que les catholiques qui
souhaitent vivre leur foi au rythme de cette liturgie représentent environ 1/3
des catholiques pratiquants des paroisses alors qu'elle est méconnue de la
plupart des catholiques.
Enfin, lorsqu’il est allé demander secrètement en janvier dernier
une condamnation du cardinal Levada des demandeurs du Motu Proprio, ce ne sont
pas des « rebelles » que vise le Président de la CEF.
5/ Des propos blessants
Les femmes et les hommes qui assistent déjà à la célébration de
la forme extraordinaire du rite romain, ceux beaucoup plus nombreux qui
souhaiteraient le faire s’ils en avaient la possibilité (1/3 des pratiquants)
ne sont pas des malades qui ont besoin « d'être reconnus par leur Église
pour s'assurer une certaine sécurité mentale et humaine »...
Ce ne sont pas des autistes « qui n'arrivent pas à penser
leur situation dans le monde actuel » et ils ont même – paraît il – une
âme à sauver !
Ce ne sont pas des hôpitaux psychiatriques à la mode soviétique
dont ces centaines de milliers de fidèles ont besoin mais de la mise en œuvre
du Motu Proprio de Benoît XVI dans leurs paroisses.
Prendre des personnes à ce point pour des imbéciles au motif
qu’elles ont fait des choix liturgiques différents n’est pas l’attitude que
l’on attend d’un pasteur.
Il y a quelques décennies Martin Luther King demandait que
d'abord l'on respecte la minorité noire … ne serait-il pas temps aujourd'hui
que les fidèles qui sont attachés à la forme extraordinaire de la liturgie
latine demandent à leur tour d'être respectés et plus seulement traités au
mieux pour des imbéciles au pire pour des extrémistes politiques ? Un
tiers des catholiques pratiquants seraient des « extrémistes » ?
Un sur trois des assistants à la messe du dimanche devant lesquels prêche le
cardinal seraient des « maurrassiens » ?
6/ Des propos d’auto satisfecit
indécents
Non, il n'est pas possible d’affirmer que le Motu proprio du Pape
« a permis d'accueillir plus largement une demande liturgique
différente ».
L’objectif n’est pas atteint et le Cardinal doit bien savoir
qu'il y a encore 13 diocèses où il n'y a pas une seule célébration
dominicale dans la forme extraordinaire et en parfaite communion avec le saint
Siège et que la plupart des célébrations qui ont été accordées l’ont été dans
des conditions telles que l’expérience soit un échec (célébrations non
hebdomadaires, horaires non familiaux, lieux inappropriés et peu pratiques,
prêtres mal intentionnés…)
Le Cardinal le sait d’autant mieux que dans son propre diocèse de
Paris, 35 groupes sollicitent en vain dans leurs propres paroisses
l’application du Motu Proprio.
Conclusion
La réconciliation entre catholiques n’est pas une matière à
option. Pour cela, il y a une très grande urgence à mieux se connaître, à se
parler, à rejeter les caricatures, à ré-apprendre à vivre ensemble malgré les
différences.
Une fois écartés les calomnies et les coups bas, peut-être
pourra-t-on demander au Président de la Conférence épiscopale d’écouter
honnêtement la demande et d’y répondre autrement que par le mépris ou la
calomnie…
Il faut beaucoup prier pour l'Église de France, qu'elle soit débarrassée de ses sujets qui
jouent double jeu
* Une mission de liberté - Éditions Denoël -18 €
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